vendredi 17 juillet 2009

La véritable histoire du dopage (chapitre 9)

1996. Jusque-là, mon amour immodéré pour le Tour avait survécu à tout. Y compris à ce que je savais. Mais ce 8 juillet 1996, tandis que le peloton s’ébrouait vers l’Italie et la station de Sestrières en improvisant un trajet qu’à l’improviste les organisateurs avait dû raccourcir à 46 kilomètres et à un seul col, en raison de chutes de neige qui avaient condamné l’accès à l’Iseran et au Galibier, nous avons assisté à l’assassinat de notre Tour.

Un lundi. Je m’en rappelle comme si c’était hier. Faute de chaises, j’étais assis à même le sol dans la salle de presse. A mes côtés, l’écrivain Paul Fournel, chroniqueur pour l’Humanité cette année-là, ne manquait rien lui non plus de la retransmission. Nous sortions d’un week-end tragique où l’on devinait confusément qu’on avait bel et bien changé d’époque...

Le samedi, trois kilomètres avant l’arrivée à la station des Arcs, Miguel Indurain, à qui l’on promettait une sixième victoire de rang, avait craqué, d’un coup, dans l’ascension finale, et soudain nous avions ressenti une émotion si vive que cette mémoire est encore douloureuse aujourd’hui - allez savoir pourquoi. Peut-être la noblesse d’Indurain jusqu’au bout de l’effort. La violence d’une défaite devenue trop humaine pour être honnête. J'avoue une faiblesse sans doute coupable...

Dans la simplicité de son visage meurtri, les traits tirés, on lisait non pas la détresse du Navarrais surpris par la brutalité de la défaillance mais bien l’impuissance d’un homme vaincu par des forces surhumaines. Comme si la sagesse de l’Espagnol, et même son respect des autres coureurs qui fit sa légende (il a offert tant et tant de courses), ne suffisaient plus, soudain, à expliquer l’inexplicable.

Le soir, avant de redescendre dans la vallée vers notre hôtel, nous avions vu de loin Miguel Indurain attablé avec les membres de son équipe Banesto. Nous avions vu un homme ordinaire, pas moins souriant qu’à l’accoutumé. Paul Fournel peut témoigner : Miguel avait même bu un verre de vin…

Le lendemain, le dimanche, un improbable Russe du nom d’Evgueni Berzin s’était emparé du maillot jaune à l’issu d’un contre-la-montre surréaliste vers Val d’Isère. Indurain, qui construisait habituellement ses victoires dans cet exercice en solitaire, n’avait fait que limiter sa perte à venir. J’avais titré mon papier : « Le Tour à toute Berzin. » J’étais loin d’avoir tout vu…

A plus tard...

3 commentaires:

Anonymous a dit…

Indurain a été le premier coureur qui a fait vraiment "tache" dans le palmarès du Tour.

Un coureur de trés grande classe, certes, mais trop lourd pour pouvoir espérer grimper un jour avec les meilleurs.

Jusqu'en 1990 et l'arrivée de l'EPO, il apparaissait trop limité en haute-montagne.

Puis, pour la plus grande tristesse de Luis Herrera, il a inauguré le lancement d'un nouveau style de coureurs: les 80 kg qui font exploser les 60 kg sur les pentes les plus abruptes..

Le début de la tragédie fut Luz-Ardiden 1990, son sommet fut atteint à La Plagne 1995, lors d'une montée qu'Antoine Vayer qualifie d'une des plus grosses mascarades de l'histoire du cyclisme.

Mais aprés Indurain, on ne pensait pas le pire était encore à venir..

Anonymous a dit…

Merci pour cette chronique qui est un véritable régal...cela me change des articles de l'équipe...et cette étape vers Sestrières m' a aussi laissé une impression d'écoeurement en voyant la grande et lourde carcasse de Riis toiser ces adversaires en roue libre dans l' ascension et s' envoler comme une plume ensuite....et 13 ans après on dirait que l' hypocrisie des grands médias va toujours de pair avec les enjeux financiers....et si demain armstrong marchait sur la lune ?...un excellent coup de marketing.....

Anonymous a dit…

Pour ce qui concerne Indurain, il est probable, vu ses problèmes de santé ( les reins..), qu'il a trop abusé des produits de l'époque.

D'ailleurs, est-ce vraiment un hasard si le navarrais a terminé sa carrière précisément l'année précédent les limitations de taux d'hématocrite à 50 ( 1997 ) ??

Au moins, Bjarne Riis ne s'est pas défilé, il a continué. Mais sans jamais obtenir les mêmes résultats...Indurain a été plus intelligent.