Après 10 jours d’une
course folle, les coureurs français sont plus que jamais aux avant-postes. Malgré
certaines fausses modesties, le départ de deux des grandissimes favoris leur
laisse plus que jamais espoirs et champ-libres.
Depuis Oyonnax (Ain).
A
les écoutez, ils ne visent qu’une place dans le Top 10 de cette 101e
édition du Tour. Mais à lire entre les lignes, il apparaît plus qu’étonnant
qu’ils ne se contentent que de ce seul classement d’ici Paris. Avant-hier,
à la Planche des Belles Filles, comme la veille entre Gérardmer et Mulhouse, la
génération montante du cyclisme français a montré de belles qualités et réalisé
des performances de très haut niveau. Avec quatre coureurs aux huit premières places
du classement général à mi-parcours (et deux autres encore dans les vingt
premiers), il y a de quoi espérer. Et pourquoi pas une place sur le podium des
Champs-Elysées?
La
modestie affichée a, en effet, de plus en plus de mal à se cacher derrière la
réalité du terrain, surtout depuis les abandons de deux des grands favoris et
régulateurs de course que sont habituellement Chris Froome et Alberto Contador.
Romain Bardet (AG2R La Mondiale), 4e du général et premier français
a d’ailleurs fini par lâcher le morceau: «J’en ai un peu marre de
suivre. Je ne suis pas encore entré dans mon Tour et j’ai très envie de passer
à l’offensive dans les Alpes.» Bonne
nouvelle pour le cyclisme français, en quête de forts caractères depuis Bernard
Hinault et Laurent Fignon. Mauvaise nouvelle pour son manager, Vincent Lavenu,
qui n’aime que les tirs groupés et rêve en tout premier lieu de ramener, cette
année, le dossard jaune de meilleure équipe de la Grande Boucle. Mais voilà, la
jeune génération a senti le vent du changement souffler et ne veut pas rester à
quai.
Thibaut
Pinot (FDJ), deuxième à la Planche des Belles Filles derrière Vincenzo Nibali
et dorénavant sixième du classement général, ne cachait même pas, derrière des sourires
de façade, la déception de n’avoir pas voulu suivre l’Italien. Il montrait
même, quant à la suite, une certaine impatience: «Les Astana ne vont pas
pouvoir tout le temps contrôler.» Et d’ajouter: «Ces cols
étaient un peu courts pour moi.» Lisez: ceux des Alpes et des
Pyrénées seront à la hauteur de ses ambitions. Dans
ce tableau à trois couleurs, ne peut être oublié Jean Christophe Peraud, autre
AG2R La Mondiale, qui, à 37 ans, sait, plus que jamais, tenir les comptes d’une
course à étapes. Déjà dans le top 10 il y a 2 ans, il est armé pour jouer les
duettistes avec son fougueux compère Romain Bardet.
Derrière,
à quelques encablures, la famille Europcar a, avant-hier sous la pluie, perdu des
bords, alors même que la veille, semblait avoir pris le large. Mais Pierre
Rolland reste un flibustier de haute volée, amoureux des coups de Trafalgar. L’arrivée
sur son terrain de jeu favori pourrait lui redonner des ailes et lui donner
l’idée de prendre les vents ascendants. Retrouver ses jambes du Giro, où il
termina quatrième, n’est pas mission impossible. Accompagné de son fidèle Cyril
Gauthier ou même d’un Thomas Voeckler, pourquoi pas en mode sacrificiel, Pierre
Rolland connaît son cantique alpestre ou pyrénéens sur le bout des
doigts: «Remenber, l’Alpe d’Huez 2012.»
Le
seul bémol à tous ces espoirs de vie en bleu, blanc et rouge, serait que le
cyclisme, qui a tant horreur du vide, l’ait déjà comblé avec un Nibali
omnipotent. Thibaut Pinot, qui sait dorénavant lire dans le texte le petit
manuel du cycliste illustré par Marc Madiot, calme les ardeurs:
«Dorénavant il va y avoir deux courses, une pour le général et l’autre
pour les étapes.» Et laisse ainsi planer l’incertitude du «déjà
vu, déjà entendu». Il est vrai qu’avec le combat acharné qui s'annonce
entre l'Australien Richie Porte (Sky, 2e du général), l'Espagnol Alejandro
Valverde (Movistar, 3e) ou l'Américain Tejay van Garderen (BMC, 7e),
il faudra savoir où et quand corner la page.
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