tag:blogger.com,1999:blog-35025051655444072632024-03-06T21:01:12.395+01:00LA ROUE TOURNELE BLOG DE JEAN-EMMANUEL DUCOINJean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.comBlogger1451125tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-84206005113657722502023-05-06T11:14:00.000+02:002023-05-06T11:14:08.849+02:00Braquage(s)<p><span style="font-size: medium;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgb3Zo0zMnE6j8Ib6DiDCSWW3vjJDWAQtgvOSqglqXB5jFWPjZhWYaAU5OdRtnmnwyKgjCwtL7E5srkC3rVyHfgaqmzcK1EjcgZuT6mcCV0EjJw0xBqsgCYWqO6XInURaJgAk2scIgTgGOiJfmKoAtoS9Quhl2AaPdU08VHnrNwJY_m1ISz9U_FzwEwFg/s600/CAPITAL.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="400" data-original-width="600" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgb3Zo0zMnE6j8Ib6DiDCSWW3vjJDWAQtgvOSqglqXB5jFWPjZhWYaAU5OdRtnmnwyKgjCwtL7E5srkC3rVyHfgaqmzcK1EjcgZuT6mcCV0EjJw0xBqsgCYWqO6XInURaJgAk2scIgTgGOiJfmKoAtoS9Quhl2AaPdU08VHnrNwJY_m1ISz9U_FzwEwFg/s320/CAPITAL.jpg" width="320" /></a></i></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>Entre le travail et le capital, le casse du siècle.</i></b></span><p></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Valeur. </b>Vous connaissez la formule: travailler
plus et plus longtemps, pour gagner plus? Toujours sous forme de question, le
bloc-noteur pourrait tourner autrement la problématique: travailler plus et
plus longtemps, mais pour gaver qui? Mac Macron II veut donc obliger les
Français à trimer deux années supplémentaires, au nom d’un sacro-saint argument :
les finances publiques, «la dette», soit le plus traditionnel des arguments de
la droite libérale afin de justifier tous les dispositifs austéritaires qui ont
mis en coupe réglée les droits des travailleurs, les hôpitaux, les écoles, les
services publics, etc. Y croyez-vous encore, à ces mensonges éhontés? Dès
lors, où se trouve ce <i>«pognon de dingue</i>» qui glisse entre les
doigts des citoyens, sans même qu’ils ne le sachent?</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b style="mso-bidi-font-weight: normal;">Silence.</b> Il est
un sujet dont personne – ou presque – ne parle, celui d’un des casses du siècle
les plus monumentaux, puisqu’il représente quelque 300 milliards d’euros!
En effet, en quatre décennies, un braquage s’est opéré dans un silence
assourdissant et néanmoins bien connu des plus éminents éditocrates pseudo-économistes.
Lisez bien: 10% de la valeur ajoutée sont passés du travail au capital en
France. En somme, la part revenant aux salariés a chuté progressivement dans le
pays. Selon l’Insee, elle était de 75% au début des années 1980, elle stagne
désormais autour de 65%. Sachant que le PIB national représente 3000 milliards
d’euros (à peu près), ces 10 points de pourcentage d’écart représentent ainsi
un incroyable magot qu’il n’est pas inutile de répéter à souhait:
300 milliards d’euros! N’importe quel spécialiste un peu sérieux vous le
dirait, la répartition de la valeur ajoutée entre le capital et le travail
constitue un enjeu économique et politique fondamental. D’où l’omerta.</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Coût.</b> En épluchant les notes de l’Insee
attentivement, il existe un point aveugle tout aussi assourdissant, conséquence
directe de ce qui vient d’être écrit. Si la part des salaires a baissé
massivement dans la valeur ajoutée, comme nous venons de le comprendre, il se
trouve que la part des super-profits, elle, a littéralement explosé. Comme vous
le savez, Total, LVMH, BNP et consorts (liste longue) affichent des résultats
en dizaines de milliards de bénéfices. Or, ces magots ont transité directement
du travail au capital. L’Insee l’affirme: dans les années 1980, un salarié
français travaillait en moyenne 9 jours par an pour payer les dividendes des
actionnaires. C’était déjà énorme. Mais accrochez-vous bien. </span><span style="font-size: large;">En 2022, un salarié a travaillé en moyenne 54 jours pour les
actionnaires… Du délire, ni plus ni moins, sachant par ailleurs que
157 milliards d’euros d’argent public sont déversés chaque année dans les
caisses des grandes entreprises, sans aucune contrepartie. À longueur
d’antenne, vous entendez parler du </span><i style="font-size: large;">«coût du travail»,</i><span style="font-size: large;"> des </span><i style="font-size: large;">«taxes»,</i><span style="font-size: large;"> ou
du fait que </span><i style="font-size: large;">«les riches vont se barrer»</i><span style="font-size: large;"> et qu’il n’y a </span><i style="font-size: large;">«pas
d’argent magique»</i><span style="font-size: large;">. N’en jetez plus. Évoque-t-on assez le coût du capital?
De ses conséquences sur le travail? Au passage, voici une autre statistique éloquente:
au sein de l’Union européenne, la part des dividendes dans la valeur ajoutée a
augmenté logiquement de 13 points dans la même période. Sans commentaire…</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Fortunés.</b> Et pendant ce temps-là? Un peu de
mémoire. Souvenons-nous que l’une des mesures phares de Mac Macron I en 2017
fut le remplacement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), qui taxait
quasiment tous les biens, y compris le patrimoine professionnel et les
placements, par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). Ce dernier ne porte que
sur les bâtiments et les terrains à usage personnel, et il ne taxe ni les
œuvres d’art ni les bateaux de plaisance. Cinq ans après sa mise en place,
l’IFI progresse puisque, en 2022, le nombre d’assujettis (ce qui suppose de
posséder des propriétés d’une valeur supérieure à 1,3 million d’euros) a
grimpé de 7,3% pour atteindre les 164000 contribuables. Ajoutons que la valeur
des biens que possèdent les propriétaires fortunés a, elle, progressé plus vite
que leur nombre, à 405 milliards d’euros (+8,6%). L’IFI rapporte à l’État
un peu plus d’un milliard par an. Bien loin des 5 milliards de l’ancien
ISF…</span></p>
<p class="MsoNormal" style="background: white; text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b>
publié dans <i>l’Humanité</i> du 5 mai 2023.]</span><o:p></o:p></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-23144847465473619612023-04-29T12:25:00.002+02:002023-04-29T12:25:34.369+02:00Machine(s) <p><span style="font-size: medium;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgbe6qCMbyqmEpgJwuHE_VTHS8XJJOv-V6-EnWRul-VcHMcRrte9rVoqsgPL7Vj1q9d3vvjxPmxqrIq8r7neav4zSl7N55gZNEbxCS5dNw3m5qsSgjzncmh3xuqEg_gu6NsYvpQTEKu1Oo0BB9EjqggNoZeZbzuZEM7VGKbRDe-10Jca-FogGG_APUeQg/s1024/INTOX%203.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="683" data-original-width="1024" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgbe6qCMbyqmEpgJwuHE_VTHS8XJJOv-V6-EnWRul-VcHMcRrte9rVoqsgPL7Vj1q9d3vvjxPmxqrIq8r7neav4zSl7N55gZNEbxCS5dNw3m5qsSgjzncmh3xuqEg_gu6NsYvpQTEKu1Oo0BB9EjqggNoZeZbzuZEM7VGKbRDe-10Jca-FogGG_APUeQg/s320/INTOX%203.jpg" width="320" /></a></i></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>Intelligence artificielle, attention au vrai
du faux…</i></b></span><p></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Révolution. </b>L’année 2023 file vite
et l’IA, depuis l’apparition dans nos vies quotidiennes de ChatGPT, observe un
bond en avant qui effraie autant qu’il fascine. Jusqu’à un certain point.
L’Intelligence artificielle sort de la brume, malgré son concept encore flou
pour le commun des mortels. Chacun a bien compris désormais, à la lumière de
ChatGPT, que les robots en ligne allaient bouleverser l’agencement de nos
intelligences au point que certains évoquent déjà une “révolution
anthropologique”. Pensez-donc. L’IA dépasse dans nos fantasmagories tout ce que
nous imaginions et permet à n’importe qui de rédiger à la vitesse d’un clavier
au galop un poème, un devoir scolaire, une recette de cuisine, un rapport, une
histoire pour endormir vos enfants, des lignes de code, de la musique, des
photographies sorties de nulle part, bref, tout ce dont vous avez besoin.
Ajoutons sans plaisanter: même un article... </span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Photo. </b>Deux exemples dans
l’actualité viennent littéralement de nous stupéfier. Evoquons, d’abord, le
dernier lauréat 2023 du prestigieux concours Sony World Photography Awards.
L’oeuvre récompensée dans la catégorie “création” s’appelle, en français, «Pseudomnésie:
l’électricienne». Ce magnifique cliché montre deux femmes, l’une contre
l’autre, de deux générations différentes. Unanimité du jury. Problème, son
auteur, l’Allemand Boris Eldagsen, a immédiatement refusé le prix. Avez-vous
deviné pourquoi? L’homme a reconnu que rien n’était réel dans cette image
trompeuse mais d’une illusion parfaite. Elle n’était que le travail d’une
intelligence artificielle. Même les plus avisés peuvent tomber dans le panneau,
la preuve, puisque, selon les spécialistes, rien ne “laissait supposer que
cette photo n’en était pas une”, les coiffures, les vêtements, et surtout la plastique
de l’image, au ton sépia, ressemblait à un document capté dans les années 1950
par un appareil photo argentique. Ayant “minimisé l’ampleur de l’aide de l’IA,
l’auteur a déclaré vouloir susciter “un débat”. L’image primée a depuis été
décrochée en toute hâte d’une exposition officielle. Polémique.</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Musique. </b>Arrêtons-nous maintenant
sur le second cas, non des moindres. Depuis le 14 avril dernier, un clip
musical posté sur le réseau TikTok connaît un succès retentissant, plus de dix
millions de vues. Attribuée dans un premier temps aux artistes canadiens Drake
et The Weeknd et intitulée Heart On My Sleeve, le morceau fait référence à la
chanteuse et actrice Selena Gomez, avec laquelle The Weeknd a entretenu une
brève relation sentimentale. Nouveau problème, aucune des deux stars n’a
participé à l’enregistrement de ce titre. Eux aussi sont tombés de haut:
l’“oeuvre” est le fruit d’une Intelligence artificielle, qui a réussi, et
plutôt magistralement, à imiter leur voix et leur style. Derrière la
supercherie, un pseudonyme, Ghostwriter977. Cet épisode montre à quel point le
secteur musical, lui non plus, n’est pas à l’abri des technologies d’IA
générative, ce qui pose des questions quasi existentielles quant au sacro-saint
respect de la propriété intellectuelle et les possibilités inouïes de
contrefaçons. L’usage de l’IA doit-il être prohibé pour la création musicale? Mais
comment, et à quel titre? L’ineffable David Guetta a déjà utilisé ce genre
d’outil pour écrire une chanson dont les paroles reproduisaient le style et la
voix du rappeur américain Eminem. De nouveaux styles naissent-ils – aussi – par
les nouvelles technologies? Vaste débat. Information importante : avant d’être
retiré, le morceau Heart On My Sleeve avait été publié sur plusieurs plates-formes
musicales et consulté des centaines de milliers de fois... </span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="color: black;"><span style="font-size: medium;"><b>Cerveau.</b> Devons-nous avoir peur, ou
non, de ces machines, capables d’influencer nos comportements comme notre
capacité à réfléchir, sans parler de notre libre arbitre? Avons-nous raison de
craindre que cette technologie octroie aux développeurs du capitalisme une
puissance potentiellement démiurge sur toutes les sociétés de l’humanité?
Précision: inspirée de faits réels mais toutefois alimentés par quelques
écrits, cette chronique a bien été pensée par un seul cerveau humain. Le
bloc-noteur entre en résistance.<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l’Humanité
</i>du 28 avril 2023.]</span><o:p></o:p></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-13701879118636577352023-04-21T19:35:00.003+02:002023-04-21T19:35:43.113+02:00Isolement(s)<p><b><i><span style="font-size: medium;"></span></i></b></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><b><i><span style="font-size: medium;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh_nwvqOY5EMBbUoFPpnB3AjYYXLe3LtK81BQyMBQH7b6UP7WuIe2Vi7BYGPJGREKdh0au9Cs5xgioXNil49tw9SXJSUaUAthckV0KUUgnGaWEVtXY7tBJ056Ivk35j-2dQ_4Z_nxVN5-Y9gnokX7dJyTuJ1KONCXIj47b3nAIxEaw9fKN-ZAqGbWgoyg/s1200/ROSANVALon.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="630" data-original-width="1200" height="168" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh_nwvqOY5EMBbUoFPpnB3AjYYXLe3LtK81BQyMBQH7b6UP7WuIe2Vi7BYGPJGREKdh0au9Cs5xgioXNil49tw9SXJSUaUAthckV0KUUgnGaWEVtXY7tBJ056Ivk35j-2dQ_4Z_nxVN5-Y9gnokX7dJyTuJ1KONCXIj47b3nAIxEaw9fKN-ZAqGbWgoyg/s320/ROSANVALon.jpg" width="320" /></a></span></i></b></div><b><i><span style="font-size: medium;">La charge de Pierre Rosanvallon contre Mac Macron II.</span></i></b><p></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Barricade.</b>
Attention, moment d’Histoire. Quand les «modérés» prennent soudain la parole et
se laissent guider par une forme de «radicalité» – non par effraction
intempestive mais par intense réflexion –, il n’est pas inutile de relayer
ce qu’ils ont à nous dire par temps de crises. Ci-devant, Pierre Rosanvallon,
historien et sociologue, éminent professeur au Collège de France, toujours
directeur d’études à l’École des hautes études en sciences
sociales (EHESS) et membre du très sélect club le Siècle, qui réunit
représentants et pontes des milieux dirigeants de notre pays. N’en jetez plus!
Ces derniers jours, Pierre Rosanvallon a ainsi décidé de s’exprimer, d’abord
dans Libération, puis dans l’émission de télé Quotidien, sur TMC. Du brutal, du
sévère et, à la vérité, du réjouissant. Selon lui, «Emmanuel Macron se
barricade dans le château fort de sa position statutaire» conférée par
l’élection présidentielle. Le spécialiste de la question sociale invite notre
prince-président à «rompre» avec cet isolement, «faute de
cela», prévient-il, «le temps des révolutions pourrait revenir ou bien
ce sera l’accumulation des rancœurs toxiques», qui ouvrirait «la
voie au populisme d’extrême droite». Voilà pour le constat de base,
annonciateur d’une aggravation de la situation.</span></p><p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><o:p></o:p></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Crise.</b> Sur le
fond comme sur la forme, sur la réforme des retraites comme le (mal)traitement
de la démocratie républicaine ou l’exercice du pouvoir depuis le palais, Pierre
Rosanvallon ne prend pas de gants avec Mac Macron II, à tel point que le
bloc-noteur signerait volontiers nombre de ses propos. «Le président ne
voit pas la crise démocratique, pour lui il n’y en a pas», assure-t-il, avant
de déplorer que le chef de l’État ait perdu de vue «l’esprit des lois»,
essentiel pour garder «l’esprit de la démocratie». Cet «esprit est
bafoué!» assène-t-il. Et il enfonce massivement le clou: «Nous
sommes en train de traverser, depuis la fin du conflit algérien, la crise
démocratique la plus grave que la France ait connue. Ce que nous vivons là,
c’est la répétition des gilets jaunes, mais en beaucoup plus grave.
Aujourd’hui, il y a ce même sentiment de ne pas être écouté. Nous sommes entrés
dans une crise qui peut être gravissime parce que c’est une pente glissante.»</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Arrogance.</b> Le
grand problème de Mac Macron II? «Il n’a qu’une expérience sociale et
politique limitée, étant passé directement de l’ombre à l’Élysée», poursuit
Pierre Rosanvallon, ce qui expliquerait son incapacité à trouver des « points
d’arrêt». Plus grave encore: «Il lui a manqué la connaissance et
l’expérience qui enseignent une chose importante: la modestie. Et lui, il n’en
a pas. Il est empreint d’une arrogance nourrie d’ignorance sociale et de
méconnaissance de l’histoire des démocraties.» Concernant les retraites,
pas de doute. «Il est clair qu’il doit faire demi-tour, reconnaît
M. Rosanvallon. Nous vivons une situation de blocage démocratique
relativement inédite dans l’histoire de la Ve République. Rarement un
projet de réforme gouvernementale aura été aussi mal préparé et envisagé sur un
mode aussi technocratique et idéologique. (…) La retraite, c’est le rétroviseur
de la vie. Cette dimension existentielle n’est pas prise en compte dans le
projet actuel.» Souvenons-nous par ailleurs que Mac Macron II avait déclaré
que «la foule qui manifeste n’a pas la légitimité» face «au
peuple qui s’exprime à travers ses élus». Réplique cinglante du
sociologue: «Si cette formule avait été prononcée par un étudiant en
histoire ou en sciences politiques, celui-ci n’aurait probablement pas eu une
bonne note. Le professeur lui aurait expliqué qu’il n’a pas compris ce à quoi
renvoie le terme de peuple. (…) Le peuple n’existe qu’au pluriel, et nul ne
peut s’en prétendre le propriétaire. Il n’est donc pas “la foule”, une masse que
l’on présuppose informe.» Jugeant que, depuis 2017, «les
contre-pouvoirs démocratiques ont fini par être atrophiés par le fait
majoritaire», Pierre Rosanvallon espère l’activation d’une «démocratie
plus délibérative». Et il s’interroge, pessimiste: «Encore faut-il que
le pouvoir accepte le principe de l’interaction avec la société.» À bon
entendeur, salut et merci! À ceux à qui il reste des yeux pour voir, des
oreilles pour entendre et un esprit logique pour comprendre. </span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="background: white;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l’Humanité
</i>21 avril 2023.]</span><o:p></o:p></span></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-74305382271830111032023-04-14T17:40:00.001+02:002023-04-14T17:40:50.476+02:00Peuple(s) <p></p><p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b><i><span style="background: white;"></span></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiCeKBb2zTJOZKlrr6NHKGNLIKJSNMkKHhXGI-aTBqRlGf1AZK4pJRWiWWONAm1fPNrhKToBjgsQYghsxmAm8XDJQEbqusSE9HrHnD7yKizmiPRbGg2K6Apqh77vdJMMHgYRPf-dJ_P4Wy_QvITdVGzTXbsibgAEOHWBVxBvmkdAm6CscwqlJsucIaAuA/s743/PEUPLE.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="450" data-original-width="743" height="194" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiCeKBb2zTJOZKlrr6NHKGNLIKJSNMkKHhXGI-aTBqRlGf1AZK4pJRWiWWONAm1fPNrhKToBjgsQYghsxmAm8XDJQEbqusSE9HrHnD7yKizmiPRbGg2K6Apqh77vdJMMHgYRPf-dJ_P4Wy_QvITdVGzTXbsibgAEOHWBVxBvmkdAm6CscwqlJsucIaAuA/s320/PEUPLE.jpg" width="320" /></a></i></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>Ils ont voulu l’oublier, le
supprimer. Mais il est là, le peuple. <span style="font-family: "Times New Roman","serif";"><o:p></o:p></span></i></b></span><p></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b><span style="mso-bidi-font-family: "Segoe UI";">Peur.</span></b><span style="mso-bidi-font-family: "Segoe UI";"> Salaud de peuple! À la
manière de la célèbre réplique «Salauds de pauvres!» lancée par
le personnage de Grangil incarné par Jean Gabin dans la Traversée de
Paris (1956), adaptation d’une nouvelle de Marcel Aymé (le Vin de
Paris), le bloc-noteur repensa, cette semaine, à la séquence des
trois derniers mois qui viennent de s’écouler en se disant : rien ne sera plus
comme avant. D’un côté, un exécutif buté-borné sur sa réforme des retraites,
accompagné par une cohorte de personnages qui ne ressemblent, en définitive,
qu’à de simples esquisses de «l’art en politique» dans un
paysage de limbes. Au-dessus, donc, Mac Macron et sa première
sinistre en thuriféraires des pires horreurs du jupitérisme.
Du «ferme ta gueule» au «salaud de peuple»,
il n’y a qu’un pas. Largement franchi. Ils ont voulu l’oublier, le peuple, puis
le supprimer à la faveur de l’évolution «sociétale» et consumériste. Mais
il est là, le peuple. Il se réveille et se dresse à nouveau. Forcément,
beaucoup ont peur…<i> </i></span><span style="font-family: "Segoe UI","sans-serif";"><o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Nécessaire.</b> De l’autre côté donc, au cœur
d’une France debout sur ses deux jambes et le poing levé, la réponse des
citoyens. Par des paroles, des gestes, de l’engagement à toute épreuve et des
mobilisations qui ne sont jamais feintes et donnent le change. Des colères
conjuguées ; des foules. Bref, un peuple. Comme dans un rêve éveillé
– presque trop – à la mesure du ressentiment général. Gigantesque
crise politique et sociale. Crise de régime, sur fond d’épuisement
institutionnel. Fin de règne déjà visible. En somme, accumulation de crises
multiples et à tous les échelons de la société, d’autant plus visibles et
durement ressenties que les Français vivent mal dans leur pays lui-même. Et
soudain, le surgissement de l’événement prévisible et nécessaire qui, sans en
rajouter dans l’allégresse, donne une impression de situation
prérévolutionnaire. Avec ses vieux militants que des décennies d’échecs et
d’humiliations avaient laissés blessés, moqués et leurs successeurs pleins
d’énergie, qui se lèvent tôt. D’autres encore, retraités, artistes,
enseignants, médecins, juristes, etc., et beaucoup de jeunes, énormément
de jeunes qui luttent pour leur vie en héritage. Et puis, admirables, ces
syndicalistes couturés mais unis, qui se sont tapé la désindustrialisation à
marche forcée, les charrettes de
licenciements («plans sociaux» et autres «PSE», pardon) et
les savants discours de pseudo-intellectuels grassement rétribués pour
affirmer, sur les plateaux de télé de leurs coadjuteurs-éditocrates, que
le prolétariat et le sous-salariat avaient disparu.<i> </i></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Raison.</b> La
France des «oubliés» et des «invisibles», si exaltés par temps de
pandémie, n’en pouvait plus du fossé qui s’agrandissait entre eux et
les «gagneurs» de tout poil, sans parler de la poignée de puissants qui
dirigent la haute finance mondialisée en choisissant ses poulains comme ses
princes-présidents. Pour ces élites coalisées qui ont nié le sentiment de déclassement
qui étreint nos concitoyens, le peuple continue d’incarner le beauf
d’autrefois, symbole du mauvais goût, de la culture bon marché et de
l’ignorance, cette culture populaire caricaturée, moquée et au fond
méprisée par le gratin de l’intelligentsia dévastatrice de la petite
bourgeoisie – jusqu’au cœur d’une certaine «gauche». Avec sa réforme
des retraites, Mac Macron a provoqué l’incendie. Le bloc-noteur se
souvient des mots de Nicoléon, durant sa campagne de 2007, affirmant qu’il
voulait «reformater les Français». Seize ans plus tard,
la «foule» si odieusement définie par l’actuel prince-président s’est
transformée en peuple. Ce n’est pas que de l’instinct, mais aussi de la raison.
Celle qui conduit à se révolter contre la dictature de l’argent, contre
l’abandon des souverainetés populaires, contre l’injonction souriante qui nous
est faite de se replier chacun dans le narcissisme consommatoire… et
accessoirement contre l’idée de travailler plus longtemps, pour qui, pour quoi.
Salaud de peuple? Vive le Peuple!<i> </i><i><span style="color: #365f91; font-family: "Segoe UI","sans-serif";"><o:p></o:p></span></i></span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b>
publié dans <i>l’Humanité </i>du 14 avril 2023.] </span></p><p></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-66655262960748029272023-04-12T20:13:00.000+02:002023-04-12T20:13:04.012+02:00Fond de l’air<p><em><span style="font-family: Cambria, "serif";"><span style="font-size: medium;"><b></b></span></span></em></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><em><span style="font-size: medium;"><b><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEheBYI7IOYxspDaLzkwvTk_QwGlvkvBQe8yK4STKHhPMrdezLTJ6cepvVaoaA_PJG5Rq1Qff1m3evtqAdqzt85P4dBstoYe43AMOxUjHuJ6JWfye6u3H2sUBCQiGPpV3chfnDPqllCdpzmk40JUEuuyvHg8BS9J-bH27OmmqgdvO8-mrGUWYZiTkKiQRg/s375/REVOLUTION.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="250" data-original-width="375" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEheBYI7IOYxspDaLzkwvTk_QwGlvkvBQe8yK4STKHhPMrdezLTJ6cepvVaoaA_PJG5Rq1Qff1m3evtqAdqzt85P4dBstoYe43AMOxUjHuJ6JWfye6u3H2sUBCQiGPpV3chfnDPqllCdpzmk40JUEuuyvHg8BS9J-bH27OmmqgdvO8-mrGUWYZiTkKiQRg/s320/REVOLUTION.jpg" width="320" /></a></b></span></em></div><em><span style="font-size: medium;"><b>«C’est
à se demander si on n’arrive pas à la fin d’un cycle, celui de la Révolution
française.»</b></span></em><p></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;">Quoi qu’il advienne, ce vendredi
14 avril, dans l’attente de la décision du Conseil constitutionnel –
censure un peu, beaucoup, à la folie, pas du tout –, Emmanuel Macron restera
comme le coupable de son inique réforme des retraites. Un texte illisible et
inadmissible, ayant pour conséquence une pénalité de deux années de travail
supplémentaires pour des millions de citoyens, souvent cumulée à l’allongement
de la durée de cotisation. Une méthode antidémocratique et méprisante, celle du
passage en force avec les articles 49.3 et 47.1, alors que les Français,
depuis janvier, se montrent ultramajoritairement contre et que les foules
hostiles manifesteront une nouvelle fois ce jeudi dans plus de 300 villes. La
crise sociale, devenue crise politique majeure, ressemble désormais à un
tremblement de terre démocratique.</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="color: black;"><span style="font-size: medium;">Dans le fond de l’air fétide, une
impression de fin de régime. Quel que soit le scénario choisi par les sages, de
nombreux macronistes, en coulisse, se disent lucides sur le «moment» et
l’ampleur de la colère populaire, qui ne redescendra pas de sitôt face aux
injonctions surréalistes du pyromane de l’Élysée. À la vérité, comment
s’étonner que le prince-président se refuse à admettre la réalité de cette
crise sans précédent, lui qui a usé et abusé de son autoritarisme jupitérien.
Par son arrogance de classe, il a tout balayé – les corps intermédiaires, la
vie parlementaire, le peuple – en utilisant les moyens les plus vils et les
effets de la dramatisation, ce qui n’est évidemment pas le signe d’une
démocratie mature. Chez Macron, le terme même de «foule» prend ainsi un autre
sens et invisibilise les mobilisations et la démocratie sociale.<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="color: black;"><span style="font-size: medium;">La nécrose du pouvoir et de
l’exécutif irait, nous dit-on, jusqu’au pourrissement des relations entre le
président et sa première ministre, qui a osé évoquer l’idée d’un <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«apaisement»</span></em> et même d’une
période de <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«convalescence»</span></em>.
Après avoir mis le feu au pays, quelle audace! Macron n’est que le produit de
sa politique. Toucher aux retraites a joué en point d’accroche. Prenons bien la
mesure de la situation. Et écoutons le constitutionnaliste Dominique Rousseau,
lorsqu’il déclare : <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«C’est à se
demander si on n’arrive pas à la fin d’un cycle, celui de la Révolution
française.»</span></em> Rien n’est fini.<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>Editorial </b>publié dans <i>l’Humanité </i>du 13 avril 2023.]</span></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-34820523416815290912023-04-07T10:13:00.002+02:002023-04-07T10:13:26.359+02:00Immonde(s)<p><span style="font-size: medium;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi2iF_xOtB0P9SGNXRCx3LzEgR80FO-0qz67tpiPmc6B_L4AoGsN1_FfRGI4bRucu9WTeEWoLhkFXumWfFxKGPzkK9piHM1O5FYxHfHUz20lzo986hzeDN-66r8JmN6HfqKRXcozTI2HkpwQc8KWwnT3ualQ6U9FvL_t5gksvsKQIh9Qv_7Y2zC50mXtA/s446/41Tg1aq1TcL._AC_SY580_.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="446" data-original-width="286" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi2iF_xOtB0P9SGNXRCx3LzEgR80FO-0qz67tpiPmc6B_L4AoGsN1_FfRGI4bRucu9WTeEWoLhkFXumWfFxKGPzkK9piHM1O5FYxHfHUz20lzo986hzeDN-66r8JmN6HfqKRXcozTI2HkpwQc8KWwnT3ualQ6U9FvL_t5gksvsKQIh9Qv_7Y2zC50mXtA/s320/41Tg1aq1TcL._AC_SY580_.jpg" width="205" /></a></i></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>Tesson, Houellebecq, Moix : la littérature et l’extrême
droite.</i></b></span><p></p><p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b><i><o:p></o:p></i></b></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Fascistoïdes.</b> Une
plongée dans la «banalisation» puis la «normalisation» des pires pensées
d’extrême droite par l’un des aspects les plus sacrés de notre Histoire
collective, le monde des Lettres. Voilà à quoi nous convie la lecture de <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">Réactions françaises, enquête sur
l’extrême droite littéraire</span></em> (Seuil, 222 pages), du journaliste
indépendant François Krug. Pour étayer son impitoyable démonstration – qui
donne froid dans le dos par l’ampleur des détails relatés –, l’auteur se
penche sur le compagnonnage des trois écrivains les plus médiatiques de la
place parisienne et du monde de l’édition: Sylvain Tesson, Michel Houellebecq
et Yann Moix. Trois parcours différents, mais un point commun ignoré par la
plupart des lecteurs: leurs liaisons durables et persistantes avec un nombre
incalculable de personnages et autres sectateurs fascistoïdes. Chacun des
trois, à leur manière et en incarnant un vieil archétype du paysage littéraire
français, a <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«fréquenté
l’extrême droite dès (ses) débuts, par goût de la provocation, par curiosité
intellectuelle, par fascination esthétique et parfois par sympathie idéologique»</span></em>,
prévient François Krug. Des cocktails, des rencontres, des accointances et,
surtout, des amitiés qui durent et passent les années sans que personne, ou
presque, ne s’en offusque. Pas même leurs éditeurs, qui comptent parmi les plus
prestigieux.</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Révélations.</b> Le
triptyque littéraire fascinant de François Krug s’étale sur les trois dernières
décennies. Une période durant laquelle les <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«digues
idéologiques ont sauté»</span></em>, écrit-il, permettant progressivement aux
obsessions antisémites, xénophobes, réactionnaires et ultranationalistes de
sortir des «marges» et d’épouser mécaniquement la montée du Front national
alors qu’il était encore politiquement et culturellement impossible sinon
impensable de lui frayer un chemin. Le récit contient quelques révélations
fracassantes et dépeint efficacement la complaisance d’une partie du milieu
culturel mondain avec les idées de la droite la plus radicale. <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«Le sujet est sensible, et aucun des
trois ne souhaite aujourd’hui l’aborder»</span></em>, ajoute- t-il. Aucun n’a
donné suite à ses sollicitations. L’auteur précise: <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«Houellebecq est joueur: il entretient le doute sur son
positionnement politique. Moix estime en avoir assez dit: il s’est repenti
publiquement d’expériences de jeunesse et d’amitiés douteuses. Tesson, admiré
à gauche comme à droite, revendique son indifférence à la politique: il reste
discret sur ses relations avec l’extrême droite la plus radicale.»</span></em></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Nationalistes.</b> Le
bloc-noteur ne peut en quelques lignes tout résumer, mais sachez-le, tout y
passe. Nous croisons ainsi tout ce qu’il y a de plus infréquentable et
d’immonde, par des réseaux qui s’entremêlent entre Tesson, Houellebecq et Moix:
des suppôts de l’Action française à ceux de l’OAS, en passant par ceux du
Grece (Groupement de recherche et d’études pour la civilisation
européenne) ou les royalistes, et évidemment d’autres écrivains ayant depuis
longtemps franchi les limites (Maurice G. Dantec, Richard Millet,
Marc-Édouard Nabe, etc.). Le public sait-il, par exemple, que le premier
voyage de Sylvain Tesson, dont il a tiré son récit <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">On a roulé sur la Terre</span></em> (1996), a été
soutenu financièrement par la Guilde européenne du raid, une confrérie
d’explorateurs créée par d’anciens de l’OAS et des militants nationalistes? Le
même public se souvient-il que Yann Moix, à 21 ans, fut l’auteur d’un
fanzine antisémite intitulé <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">Ushoahïa</span></em>
(<em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«Les juifs étaient heureux
d’aller en camps pour se consumer dans quelque cendrier»</span></em>, peut-on y
lire), et qu’il fréquenta un certain Paul-Éric Blanrue, ex-militant du FN et
grand défenseur du négationniste Robert Faurisson? Les auditeurs de France
Inter, qui écoutèrent Tesson livrer une chronique d’été en 2017 sur Homère,
savent-ils que non seulement il adulait Jean Raspail (auteur de l’odieux <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">Camps des Saints</span></em>), qu’il
fréquentait la Nouvelle Librairie, dont les éditions promeuvent toutes les «plumes»
de l’extrême droite (dont Renaud Camus, théoricien du «grand remplacement»),
mais aussi qu’il anima lui-même, à partir de 1996, une émission sur Radio
Courtoisie, l’antichambre radiophonique de toute l’extrême droite? Dans <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">Blanc </span></em>(2022), son récit
d’une traversée des Alpes, Tesson écrit: <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«Le
paysage répondait à son principe de distinction, de hiérarchie, de pureté.
(…) La verticalité constituait une critique de la théorie égalitaire.»</span></em></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Partition.</b> Les
adulateurs du prix Goncourt savent-ils que Houellebecq est un habitué de <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">Valeurs actuelles</span></em> et que, en
2022, il donna une conférence au siège parisien de l’Action française, ou
qu’il reçut une distinction, en 2018, d’une association belge qui exalte les
actes du philosophe allemand Oswald Spengler (1880-1936), l’un des
penseurs de la «révolution conservatrice» européenne? Dans le maquis de la
nouvelle réaction fascisante, Tesson, Houellebecq et Moix jouèrent donc leur
partition. Le livre de François Krug est d’utilité publique et politique.
À mettre entre toutes les mains – et dans tous les lycées. </span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l’Humanité </i>du 7 avril 2023.]</span></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-3475098409604160852023-04-04T19:34:00.000+02:002023-04-04T19:34:16.482+02:00Lettre(s)<p><span style="font-size: medium;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhxvc6bgoj_yvNZju4Fsgn_P6Cf9OHgPKSMnFhErKks8MljjSgeu5xSoeoL96Uuxwqa0cxN3YTDXrRvU9Fm0rjv5EG3K037c-XghbctEaI1FbfWsVFi-vTLTHMhvi3TqtPk2k_zThAG2DbVQVpv8jfqYCKqS8zKbpT3qWtOozItxzWzPubc0Ud94UFhWA/s644/MATHIEU.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="414" data-original-width="644" height="206" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhxvc6bgoj_yvNZju4Fsgn_P6Cf9OHgPKSMnFhErKks8MljjSgeu5xSoeoL96Uuxwqa0cxN3YTDXrRvU9Fm0rjv5EG3K037c-XghbctEaI1FbfWsVFi-vTLTHMhvi3TqtPk2k_zThAG2DbVQVpv8jfqYCKqS8zKbpT3qWtOozItxzWzPubc0Ud94UFhWA/s320/MATHIEU.jpg" width="320" /></a></i></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>Retraites : quand les écrivains s’engagent.</i></b></span><p></p><p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b><i><o:p></o:p></i></b></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b style="mso-bidi-font-weight: normal;"><span style="color: black;">Barricade.</span></b><span style="color: black;"> <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«La grandeur d’un pays se mesure aussi à
la force d’engagement de ses auteurs»</span></em>, répétait souvent un
professeur (jésuite) du bloc-noteur, qui portait Rousseau, Hugo et Bernanos en
son cœur. La phrase, tel un invariant cher à la tradition française, trouve un
singulier écho à la faveur de la crise sociale et politique actuelle. Le nombre
de personnalités culturelles qui soutiennent les grèves et les manifestations
pour réclamer le retrait de la loi sur les retraites se compte par dizaines,
centaines. Parmi ces femmes et ces hommes, trois se sont particulièrement
distingués, dans la mesure où il était difficile de manquer leurs propos
salutaires au regard de leur statut respectif et de leur aura dans le monde des
lettres. Réjouissons-nous de les retrouver – sans surprise néanmoins – du bon
côté de la barricade ! Par exemple, qui a cosigné ce texte: <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«L’objectif, à rebours de l’histoire
sociale, est de faire travailler plus et plus longtemps des femmes et des
hommes qui aspirent au repos et à donner libre cours à leurs projets dans un
moment privilégié de la vie»</span></em>? Réponse: Annie Ernaux, prix Nobel de
littérature, qui n’a pas caché sa <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«détermination
à combattre ce projet de réforme archaïque et terriblement inégalitaire»</span></em>.<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b style="mso-bidi-font-weight: normal;"><span style="color: black;">Colère.</span></b><span style="color: black;"> Pierre
Lemaitre, prix Goncourt en 2013 pour <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">Au
revoir là-haut</span></em>, s’exprimait pour sa part récemment sur France
Inter. Après avoir certifié qu’il serait dans la rue pour manifester,
l’écrivain ajoutait: <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«On vit
dans une société qui est terriblement fracturée et qui est au-devant
d’événements tellement majeurs: le réchauffement climatique, cette guerre en
Ukraine. Mettre ce sujet à l’avant-plan aujourd’hui, c’est à la limite de la provocation
et de la maladresse.»</span></em> Ce n’était pas la première fois qu’il
remettait en cause la politique – qu’il qualifiait en 2019 de <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«démocratie autoritaire» </span></em>–
de Mac Macron. À l’image de son dernier roman, <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">le Silence et la Colère</span></em>, Pierre Lemaitre
ajoutait qu’il ne voulait <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«pas
rester silencieux»</span></em>, qu’il n’était pas de ceux qui s’assagissent
avec l’âge: <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«Plus le temps
passe et plus ma colère se développe, en tout cas elle est intacte a minima.
(…) Je vois une société qui ne me convient pas, avec une répartition des
richesses qui est scandaleusement disproportionnée.»</span></em><o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b style="mso-bidi-font-weight: normal;"><span style="color: black;">Politique.</span></b><span style="color: black;"> Nicolas
Mathieu ne fut pas en reste. Avant d’accorder un entretien à <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">l’Humanité</span></em>, le prix Goncourt
2018 pour <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">Leurs enfants après
eux </span></em>avait donné un texte explosif à Mediapart dans lequel il
assurait: <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«De ce pouvoir, nous
n’attendons désormais plus rien. Ni grandeur, ni considération, et surtout pas
qu’il nous autorise à espérer un avenir admissible. Nous le laissons à ses
chiffres, sa maladresse et son autosatisfaction.»</span></em> Et il
interrogeait durement la posture même du prince-président: <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«Aujourd’hui, à l’issue de cet épisode
lamentable de la réforme des retraites, que reste-t-il d’Emmanuel Macron, de ce
pouvoir si singulier, sorti de nulle part, fabriqué à la hâte, “task force” en
mission libérale qui a su jouer du rejet de l’extrême droite et de la
déconfiture des forces anciennes pour “implémenter” son “projet” dans un pays où
si peu de citoyens en veulent? Que reste-t-il de ce pouvoir, de son droit à
exercer sa force, à faire valoir ses décisions, que reste-t-il de sa légitimité?»</span></em>
Avant d’évoquer les citoyens: <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«Avez-vous
pensé à ces corps pliés, tordus, suremployés, qui trimeront par votre faute
jusqu’à la maladie, jusqu’à crever peut-être? Avez-vous pensé au boulevard que
vous avez ouvert devant ceux qui prospèrent sur le dépit, la colère, le ressentiment?
(…) Avez-vous pensé à ce monde sur lequel vous régnez et qui n’en pouvait déjà
plus d’être continuellement rationné, réduit dans ses joies, contenu dans ses
possibilités, contraint dans son temps, privé de sa force et brimé dans ses
espérances?»</span></em> Comment décrire mieux ce que nous ressentons? Revint alors
à notre mémoire les mots du philosophe Jacques Rancière, qui expliquait jadis
que l’expression <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«politique de
la littérature»</span></em> implique que la littérature intervient en tant que
littérature dans ce <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«découpage
des espaces et des temps, du visible et de l’invisible, de la parole et du
bruit»</span></em>. Autrement dit, dans ce rapport entre des pratiques, des
formes de visibilité et des modes «du dire» qui découpent un ou des mondes
communs.<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l’Humanité </i>du 31 mars 2023.]</span></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-25293049300047044462023-04-04T19:25:00.001+02:002023-04-04T19:25:52.871+02:00Les prédateurs<p><span style="font-size: medium;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjH095N8PtN8PjA1Ooa_oeBLa4OgBLPGO0nPWNVlY1nJohdpebiy6YJkTY9q2PqhcQVtsw9vurZodu25JPuBzR9Dl62iRo9Asj7YztZxGb-gF7vYWwSSXiEv0REUD2DywX3f8iT5hnDuVJWvqTuNbzY0p_0gXTLlMlMlKeXPGcV14jRCsrTMmmJfb7rhg/s588/TCHAD.png" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="529" data-original-width="588" height="288" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjH095N8PtN8PjA1Ooa_oeBLa4OgBLPGO0nPWNVlY1nJohdpebiy6YJkTY9q2PqhcQVtsw9vurZodu25JPuBzR9Dl62iRo9Asj7YztZxGb-gF7vYWwSSXiEv0REUD2DywX3f8iT5hnDuVJWvqTuNbzY0p_0gXTLlMlMlKeXPGcV14jRCsrTMmmJfb7rhg/s320/TCHAD.png" width="320" /></a></i></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>L’accaparement des terres, une
autre forme de colonialisme. </i></b></span><p></p>
<p class="MsoNormal"><span style="color: black;"><span style="font-size: medium;">Si l’accaparement des terres reste
un phénomène historiquement lié à la colonisation, l’actuelle course folle aux
surfaces cultivées se mêle directement aux structures nébuleuses du système
financier international – soutenues, évidemment, par certains États dont
beaucoup furent des colonisateurs. Jadis, des États s’appropriaient des
territoires entiers et contraignaient les soumis à travailler au profit des
intérêts occidentaux. De nos jours, les nouveaux maîtres siègent dans les
grandes tours de verre des capitales de l’industrie financière et agricole
internationale. Seule constante à travers les siècles: les populations locales
et la nature en subissent toujours les conséquences.<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="color: black;"><span style="font-size: medium;">Au nom du «libéralisme
économique», les prédateurs de la haute finance du capitalisme globalisé ont
inventé une autre forme de colonialisme. L’accaparement des terres conduit à la
faim, à la pauvreté et à la violence. Plus de la moitié des transactions
foncières concernent des terres cultivables ancestrales, sur lesquelles des monocultures
destinées à l’export viennent remplacer les cultures vivrières des habitants,
qui perdent ainsi leur sécurité alimentaire. Qu’importe les droits humains et
l’environnement. Car, contrairement aux mensonges des spoliateurs, les
monocultures sacrifient des forêts, libérant du CO2 dans l’atmosphère et
détruisant la biodiversité. Double avantage pour ces «investisseurs» sans
scrupule: ils profitent d’abord de la vente du bois, puis de la culture de
palmiers à huile, de soja, de canne à sucre, de coton, etc.<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="color: black;"><span style="font-size: medium;">Encouragés par les pays
industrialisés et les institutions financières internationales (Banque
mondiale, FMI, OMC, FAO), les fonds agricoles de grandes banques, les
compagnies d’assurances, les fonds spéculatifs, les fonds de pension et les multinationales
tirent bénéfice de la vente au rabais des ressources naturelles et des terres,
qui, depuis vingt ans, concerne environ 300 millions d’hectares sur la
planète, soit une zone plus vaste que toute la surface agricole utile d’Europe.
Les pays du Sud sont bien sûr les plus frappés, singulièrement l’Afrique:
60% des grands investissements mondiaux dans l’agriculture industrielle
concernent ce continent…<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>EDITORIAL </b>publié dans <i>l’Humanité </i>du 4 avril 2023.]</span></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-45850113600397544892023-03-28T19:16:00.000+02:002023-03-28T19:16:53.898+02:00L’arrogance crasse de l’exécutif <p><span style="font-size: medium;"><b></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEisiURdqG6Az373Cy2dFD1XA68gB4p-q85RElM2WnHN_ZK4IjD8wMH4AV7bqMaHgvGtvyAJpr8xMHrHd3zgw4Crsc260k3ndWWQuxzEVZ3t6Ny2VQKVl_uSxG9JR2M1SCDRLUXw69veBFaDh2NmsvzsRhzZ7g9YefzpcKpVmD7axlCAGMBamFuEOWqUTQ/s1280/EDITO.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="720" data-original-width="1280" height="180" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEisiURdqG6Az373Cy2dFD1XA68gB4p-q85RElM2WnHN_ZK4IjD8wMH4AV7bqMaHgvGtvyAJpr8xMHrHd3zgw4Crsc260k3ndWWQuxzEVZ3t6Ny2VQKVl_uSxG9JR2M1SCDRLUXw69veBFaDh2NmsvzsRhzZ7g9YefzpcKpVmD7axlCAGMBamFuEOWqUTQ/s320/EDITO.jpg" width="320" /></a></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>Emmanuel Macron se vit peut-être
en héros thatchérien dans le secret de son intimité. Il devient surtout le
fossoyeur de la démocratie française.</i></b></span><p></p>
<p class="MsoNormal"><span style="color: black;"><span style="font-size: medium;">Au royaume en perdition du
monarque élu, le mépris n’a donc plus de limites. Alors que la dixième journée
de mobilisation se déroulait, ce mardi 28 mars, avec le succès que nous
connaissons, les thuriféraires du prince-président en ont rajouté dans la
provocation. Le secrétaire général de la CFDT en sait quelque chose. Après
avoir proposé <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«une pause» </span></em>dans
le processus de la loi sur les retraites, Laurent Berger était mandaté par
l’intersyndicale pour une demande de <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«médiation»,
</span></em>sachant qu’un courrier devait être envoyé à l’Élysée. Croyez-le ou
non, mais la manifestation parisienne ne s’était même pas encore élancée que le
porte-parole du gouvernement, dans son compte rendu du Conseil des ministres,
lançait un nouveau bras d’honneur à l’intersyndicale: <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«Nous saisissons la proposition de se
parler, mais nul besoin de médiation», </span></em>expliquait Olivier Véran.
La stratégie du pire et de l’escalade. Au point que nous pouvons désormais nous
demander: où s’arrêtera l’arrogance crasse de l’exécutif?<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="color: black;"><span style="font-size: medium;"><i>«Ça commence à suffire, les fins
de non-recevoir»,</i> répliquait Laurent Berger, jugeant la réponse du
gouvernement <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«insupportable».
</span></em>Une idée sans doute partagée par certains membres de la majorité
présidentielle – du moins ce qu’il en reste. Les députés Modem, par exemple,
n’hésitaient pas à se déclarer <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«favorables»
</span></em>à une médiation. Manière d’affirmer, sans le crier trop fort :
jusqu’où ira le président, qui n’écoute ni la rue, ni les syndicats, ni les
forces politiques, pas même ses partisans?<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="color: black;"><span style="font-size: medium;">Emmanuel Macron, tout seul,
accroché à cette idée sarkozienne selon laquelle le courage en politique (sic)
consiste à affronter la colère populaire et à ne <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«jamais céder», </span></em>se vit peut-être en héros
thatchérien dans le secret de son intimité. Il devient surtout le fossoyeur de
la démocratie française. Comme le dit dans nos colonnes l’écrivain Nicolas
Mathieu: <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«L’idée qu’il se
fait de son rôle et du bien du pays menace la paix civile, parce qu’elle
implique un déni de l’altérité et que l’autoritarisme qui en découle enflamme
des pans entiers de notre société.» </span></em>Et le lauréat du prix Goncourt
2018 précise: <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«Par sa méthode
et son obstination, son mépris et sa surdité, il a libéré des réserves de rage
qu’il n’imagine pas.» </span></em>Rien à ajouter.<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>EDITORIAL </b>publié dans <i>l’Humanité </i>du 29 mars 2023.]</span></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-38237726005443581632023-03-25T11:13:00.000+01:002023-03-25T11:13:30.094+01:00Pulsion(s)<p><b><i><span style="font-size: medium;"></span></i></b></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><b><i><span style="font-size: medium;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj1sCyzjT4yNZh1H_W-puefDVdowcuG0hBwq9om-XjZkTUlNdU_nFgbnTyKjF0YYXdLtRsMj0UXeKDqvegHU8VDQM-8CPy8khnx3zTtgfCfRFd2GpRsE3V710G16hmX0NXxPuuflt4Tg6egXLxc1w-p-R-PjPVz5t04LpSMaf9m8915ceXSNQysxiwxQw/s600/ROI.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="401" data-original-width="600" height="214" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj1sCyzjT4yNZh1H_W-puefDVdowcuG0hBwq9om-XjZkTUlNdU_nFgbnTyKjF0YYXdLtRsMj0UXeKDqvegHU8VDQM-8CPy8khnx3zTtgfCfRFd2GpRsE3V710G16hmX0NXxPuuflt4Tg6egXLxc1w-p-R-PjPVz5t04LpSMaf9m8915ceXSNQysxiwxQw/s320/ROI.jpg" width="320" /></a></span></i></b></div><b><i><span style="font-size: medium;">Le régime est à bout de souffle…</span></i></b><p></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Vérité.</b> Ainsi, la
vieille pulsion est réveillée – et nous nous souvenons, soudain, que la
France reste la France, même quand l’horizon paraît bouché. Donc, cette fois,
le roi est nu: à bas le roi! Après moins de six ans de pouvoir, plus rien ne
changera désormais. Quoi qu’il dise, quoi qu’il fasse, Mac Macron II a
tout perdu à force de tout détruire, jusqu’à la légitimité de sa position comme
de son incarnation. De mépris en coups de menton, le prince-président, en «Nabo »
du XXIe siècle bien plus destructeur que Nicoléon en son temps (c’est
dire), a poussé les feux du libéralisme technocratique au point d’essouffler
définitivement ce qu’il subsistait encore de notre régime. Même en allant
chercher très loin la parole des éditocrates qui, jadis, se complaisaient dans
les plis du présidentialisme absolu, tout républicain un peu sérieux se pose
dorénavant la seule question à la hauteur du moment: la Ve République
a-t-elle vécu? Parvenus à ce point de crispation démocratique, sociale et
institutionnelle, regardons la vérité en face. Le régime du monarque-élu se
trouve totalement à bout de souffle. Et avec lui, le cadre représentatif a été
martelé, humilié, démonétisé en quelque sorte, au point d’entraver l’action
politique et d’attiser, à tous les échelons de la République, cette défiance
croissante. Depuis son arrivée sous les lambris du Palais, Mac Macron I et
II a poussé la verticalité jupitérienne jusqu’à la caricature. Résultat, le
sentiment de fracture entre le chef de l’État et les citoyens connaît une
aggravation si inquiétante et mortifère que tout retour en arrière paraît
impossible, sinon inutile.</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Violent.</b> Ne soyons pas
naïfs, Mac Macron en personne réfléchit à une sortie de crise, à la fin de son
quinquennat, à la suite. Raison pour laquelle il songerait sérieusement cette
fois à une «réforme des institutions» qui s’apparenterait plutôt à un
accommodement de circonstances. Un chantier lancé à bas bruit. Mais pas moins
explosif que celui des retraites. À son corps défendant, le dossier des
retraites, de même que les passages en force au Parlement auront,
paradoxalement, accéléré le processus de conscientisation politique du pays en
tant qu’expérimentation du cadre institutionnel qui est le nôtre, aussi
aberrant que violent. Les citoyens, atterrés, ont découvert dans le détail les
travers de la Constitution, et par ailleurs ce qu’il serait possible d’en faire
entre les mains de l’extrême droite – de quoi frissonner. Soyons réalistes:
la Constitution, l’organisation des pouvoirs publics, la démocratie et donc la
République ne correspondent plus aux attentes ni aux exigences de solidarité,
de justice et à l’aspiration croissante à un nouveau mode de développement.
Nous voilà parvenus à un point de non-retour aussi enthousiasmant que dangereux
pour les équilibres fondamentaux de la nation. Un autre cycle, qui ne
réclamerait pas de demi-mesure, peut-il dès lors s’ouvrir vers une
VIe République? Elle aurait pour principe la compétence normative des
citoyens, à savoir leur capacité d’intervenir personnellement dans la
fabrication des lois et des politiques publiques. Rendons-nous bien compte que,
à l’approche de son soixante-cinquième anniversaire, le régime fondé par le
général de Gaulle est en voie de battre le record de longévité détenu jusqu’à
présent, dans l’histoire constitutionnelle française, par la
IIIe République (1870-1940). Trop, c’est trop…</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Cruel.</b> Certes,
d’autres avant lui avaient déjà bien entamé le travail, mais le fossoyeur de sa
propre fonction porte un nom: Mac Macron. En le regardant s’agiter, et même
parler, cette semaine, le bloc-noteur songea à Victor Hugo, et au portrait
cruel que le grand poète écrivit de Louis Bonaparte dans <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">Napoléon le Petit</span></em>, ce <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«personnage vulgaire, puéril, théâtral et
vain»,</span></em> qui aimait <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«les
grands mots, les grands titres, ce qui brille, toutes les verroteries du
pouvoir»</span></em> et qui mentait <em><span style="font-family: "Cambria","serif";">«comme
les autres hommes respirent». </span></em><em><span style="font-family: "Cambria","serif"; font-style: normal; mso-bidi-font-style: italic;">Le roi est nu. Et la vieille
pulsion réveillée.</span></em></span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l’Humanité
</i>du 24 mars 2023.]</span><o:p></o:p></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-91097029225660298412023-03-18T12:22:00.000+01:002023-03-18T12:22:33.001+01:00Spectre(s)<p><b><i><span style="font-size: medium;"></span></i></b></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><b><i><span style="font-size: medium;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiLMdHqlnFl6HjlwnZSCf747Cs1w0IY6NzoUU7wEPQNDut6rnd1cyOtBKRMyr19Hcsdhfzp6MF9MufxCVRFWFhUgv3wCGeBY6WJ5p-fPPVSx8wJ3L4ayIN50S335KgWJ7_pbQioobgDqQVU_QOsKfw7fNt5nv8XbHGAyFHUMWCMyCLlVJJolXmRg2zFxw/s318/MARX.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="159" data-original-width="318" height="159" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiLMdHqlnFl6HjlwnZSCf747Cs1w0IY6NzoUU7wEPQNDut6rnd1cyOtBKRMyr19Hcsdhfzp6MF9MufxCVRFWFhUgv3wCGeBY6WJ5p-fPPVSx8wJ3L4ayIN50S335KgWJ7_pbQioobgDqQVU_QOsKfw7fNt5nv8XbHGAyFHUMWCMyCLlVJJolXmRg2zFxw/s1600/MARX.jpg" width="318" /></a></span></i></b></div><b><i><span style="font-size: medium;">L’époque fait du «marxisme»
sans le savoir.</span></i></b><p></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Horizon.</b> «L’histoire ne fait rien,
c’est l’homme, réel et vivant, qui fait tout», disait Karl Marx. Cent quarante ans après sa disparition,
le 14 mars 1883, l’auteur du Capital et du Manifeste du Parti communiste continue de nous inciter à penser que
la pertinence d’un choix politique est fonction des échelles d’observation.
D’autant qu’il ajoutait: «Les hommes font l’histoire, mais ils ne
connaissent pas l’histoire qu’ils font.» Dans cette formule rebattue et souvent disputée, la seconde proposition
valide la première. Le «mais» doit en effet se lire comme un «parce que», dans la mesure où aucun homme ne se
mêlerait de «faire l’histoire» s’il savait à l’avance laquelle. Tout combat s’écrit pas à pas, dans la
multitude et la complexité collective. Car si nul ne progresse innocemment, le
regard toujours plus ou moins braqué sur l’horizon, toute prescience nous
dégoûterait du moindre engagement, sachant que Marx lui-même assurait que «l’humanité
ne se pose que les problèmes qu’elle peut résoudre».</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: large;"><b>Philosophe.</b>
Vaste question, non? Qui renvoie directement à une autre phrase en forme
d’injonction qui bouscula le XIXe siècle: </span><span style="font-size: large;">«Jusqu’à présent, les
philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de diverses manières ; ce
qui importe, c’est de le transformer.»</span><span style="font-size: large;"> Beaucoup oublient par ailleurs que Marx, philosophe jusqu’au bout de
l’âme, élabora aussi un travail d’historien politique moins déterministe qu’on
ne le dit parfois. Puisons dans ses grands textes historiques, portant par
exemple sur le déroulement de la révolution de 1848, </span><span style="font-size: large;">Les Luttes de
classes en France, le 18 Brumaire de Louis Bonaparte.</span><em style="font-size: large;"><span style="font-family: Cambria, "serif";"> </span></em><span style="font-size: large;">Tous
montrent que l’événement révolutionnaire ou prérévolutionnaire relève plus de
la contingence que de la nécessité historique. L’actualité de notre «ici et
maintenant» en témoigne parfois cruellement: chaque évolution possède son
propre rythme, sa propre logique. Certains épisodes peuvent déclencher ou
accélérer les confrontations sociales (et politiques). Quelquefois, des
incidents, en apparence absolument mineurs, provoquent des événements
considérables. Même si, la plupart du temps, l’historien constate que les
conditions étaient réunies, rien, jamais, n’oblige à penser qu’un basculement
de l’Histoire se produise nécessairement.</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: large;"><b>Retour.</b> Un
spectre hante encore l’Europe, donc l’humanité tout entière: le spectre de Marx!
Le temps est désormais loin où une presse tapageuse annonçait triomphalement sa
mort. Maladroitement, les dominants exprimaient ainsi à la fois le soulagement
de sa disparition et la crainte qu’il ne revienne. Depuis plus de vingt ans, ce
retour redouté n’est plus à démontrer. Le magazine </span><span style="font-size: large;">Time</span><span style="font-size: large;"> le célébra par ces mots: </span><span style="font-size: large;">«Cette
tour immense dominant les autres dans le brouillard». «Marx avait-il
raison?»</span><span style="font-size: large;"> titrait récemment </span><span style="font-size: large;">Der
Spiegel</span><span style="font-size: large;">, comme en écho à des
manifestants de Wall Street qui, répondant à l’interrogation, crièrent: </span><span style="font-size: large;">«Marx
avait raison!»</span><span style="font-size: large;"> Pour la
génération du bloc-noteur, le come-back survint assez tardivement, bien après
l’un des plus fabuleux livres de Jacques Derrida, </span><span style="font-size: large;">Spectres de Marx</span><span style="font-size: large;">, publié en 1993, qui constitua à
l’époque une onde de choc, une évidence, pour ne pas dire une espèce de
révélation en tant que rappel à l’ordre, afin de nous sortir d’un début de
sommeil – qui aurait manqué de nous endormir collectivement. </span><span style="font-size: large;">«Qu’ils le
veuillent ou non, le sachent ou non, tous les hommes sur la Terre entière sont
dans une certaine mesure les héritiers de Marx»,</span><span style="font-size: large;"> écrivait Derrida. Et Fernand Braudel rappelait à quel
point l’esprit du temps et son vocabulaire étaient imprégnés de ses idées.
Aussi nombreux que tardifs, les hommages restent néanmoins – dans leur masse –
réductibles à une banalisation médiatique, rendant inoffensif ou domesticable
celui qui voulut </span><span style="font-size: large;">«semer des dragons».</span><span style="font-size: large;"> Beaucoup s’y sont essayés, avant d’échouer
lamentablement dans leur tentative de neutraliser l’injonction révolutionnaire.
Car, dans les chaos du XXIe siècle, l’époque ferait du «marxisme» sans le
savoir. Résumons: </span><span style="font-size: large;">le Capital</span><span style="font-size: large;"> fut jadis écrit pour détruire le capitalisme. Cet instrument de lutte
(des classes) est plus vivant que jamais.</span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l’Humanité </i>du 17 mars 2023.]</span></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-76025570951146673442023-03-14T10:28:00.000+01:002023-03-14T10:28:22.419+01:00Bombe(s)<p></p><p class="MsoNormal"><span style="font-size: large;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtxiBPLKR8IvHCWezwOLd0hDn_4wFgRrxZthuztptGW_6kmGwb91yWfoIf_Kim-yW9coNfPKMEYSoP-9PCHO3Cmmaeq13Bsg-o6QEwNJfcRo2wiqIjbOpYXzgCAm4tX2SMYv3aPYOXSgwePjUVHJ4Iv9c23c9V808ylY7TTqwMA0ho4W80i6MSLi_7fA/s3600/RETRAITES.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="2401" data-original-width="3600" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtxiBPLKR8IvHCWezwOLd0hDn_4wFgRrxZthuztptGW_6kmGwb91yWfoIf_Kim-yW9coNfPKMEYSoP-9PCHO3Cmmaeq13Bsg-o6QEwNJfcRo2wiqIjbOpYXzgCAm4tX2SMYv3aPYOXSgwePjUVHJ4Iv9c23c9V808ylY7TTqwMA0ho4W80i6MSLi_7fA/s320/RETRAITES.jpg" width="320" /></a></i></b></div><b><i>Retraites : toutes les catégories sociales
expriment leur refus.</i></b><p></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Nasse.</b> Les mensonges éhontés comme
les ruses politiques de bas étage laissent toujours des traces. Même le
quotidien du soir le Monde, dans un éditorial
assez cinglant, le notait ainsi cette semaine: «Qui comprend encore la
finalité du projet de réforme des retraites qui a été tour à tour présenté
comme le moyen de financer les grands chantiers du quinquennat, puis comme la
condition sine qua non pour sauver le régime par répartition, puis comme une
façon de renforcer “la justice sociale” et “l’équité”?»
Ironique, le journal ajoutait: «Au point d’incompréhension où il est
arrivé, le mieux que peut espérer l’exécutif est que “Les Républicains”
acceptent de lui sauver la mise la semaine prochaine à l’Assemblée nationale.
Il n’en est même pas sûr.» Mac Macron et sa Première
sinistre sont dans la nasse, d’autant que, par une malice délicieusement
orchestrée, la majorité sénatoriale de droite débutait l’examen du report de
l’âge légal de départ à la retraite (le fameux article 7) au lendemain
même où les syndicats réussissaient une nouvelle démonstration de force dans la
rue (plus de 3 millions de manifestants) et par les grèves (massives), une
journée qui constituera, quoi qu’il arrive, l’un de ces moments historiques de
notre Histoire sociale.</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><b>Rejet. </b>Nous voilà donc «aux jours
d’après», assurément les plus décisifs, sachant que la bataille de l’opinion
paraît définitivement perdue pour Mac Macron. Une passionnante enquête
d’opinion réalisée par le collectif de chercheurs Quantité critique conforte ce
qui n’est plus une impression, mais bien une réalité. «L’opposition à la
réforme, qui ne cesse de s’intensifier, touche toutes les catégories d’actifs
et est majoritaire chez toutes les personnes en activité», signale d’emblée l’étude. Ce rejet massif, certes plus
fort dans les professions intermédiaires, les employés et les ouvriers, reste
ultradominant aussi chez les cadres: 64%. Vous avez bien lu! Signalons que
cette opposition est moins nettement dominante chez les 65 ans et plus (43%
favorables, 44% opposés) et évidemment chez les personnes déclarant un niveau
de revenus nets supérieur à 4000 euros par mois (51% favorables, 42%
opposés). Le collectif Quantité critique précise: «Le soutien aux
manifestants, aux grèves et aux blocages atteste de la perte de légitimité du
gouvernement et de la possibilité d’un élargissement de la contestation dans
les jours à venir.» La seule vraie interrogation, en
vérité.</span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;"><span style="color: black;"><b>Tournant.</b> L’étude nous apprend par
ailleurs un fait qui n’a rien d’anodin: le rejet de la réforme est très proche
dans le privé (69%) et le public (74%). Le collectif reconnaît que, </span>«loin
de se concentrer dans des foyers de contestations classiques, le combat touche
toutes les catégories d’actifs à des niveaux très élevés»,<span style="color: black;"> ce qui renverrait directement à </span>«la détérioration
des conditions d’emploi et de travail».<span style="color: black;"> Personne ne
montrera son étonnement de savoir que l’opposition atteint 82% chez celles et
ceux qui ont choisi quatre qualificatifs négatifs parmi les quatre suivants (</span>«stressant»,
«dangereux», «répétitif»<span style="color: black;"> et </span>«fatigant»)<span style="color: black;"> pour décrire leur propre activité professionnelle. Selon
le collectif, pas de doute: </span>«La volonté de s’émanciper de la
marchandisation du travail est au cœur du débat»,<span style="color: black;">
bien qu’il ne faille pas confondre secteurs d’activité (fortement syndicalisés)
et individus. Ces derniers, souvent isolés et pas toujours armés pour se
mobiliser, alimentent l’opposition dans les sondages mais, sans surprise,
constituent dans le même temps une sorte de frein à l’action. Dès lors, nous le
savons tous, le mouvement se situe à un tournant entre «la grève par
procuration», dont témoignent 46% d’actifs soutenant la contestation sans y
participer, et le recours à la grève (40%), à la manifestation (43%) ou aux
actions de blocage (35%). Le bloc-noteur n’oublie pas deux autres chiffres. Le
premier vient lui aussi de l’enquête de Quantité critique: 15% des actifs n’ont
pas encore participé à la mobilisation mais se disent </span>«prêts à le faire».<span style="color: black;"> Le second est issu du sondage Ifop réalisé pour </span>l’Humanité<span style="color: black;">: 65% des Français se déclarent </span>«favorables»<span style="color: black;"> à la grève reconductible. Une véritable bombe sociale et
politique.<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l’Humanité </i>du 10 mars 2023.]</span></p><p></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-66057726864257753912023-03-14T10:15:00.000+01:002023-03-14T10:15:01.379+01:00JO : entre promesses et réalité…<p><span style="font-size: medium;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjX4KT0TVe7-hTThX2RJ3uLwL851W-DLTufxJ8K5iH5Y2f-3YNnIpiqJXj5NMjk8JhQ1rhA7WgNT5h_X80ZJ3KzbYY7OJYsNSigQx_BhyspjZI146huWGC5JKuRFGlAXGSNVjrnLh6ibOcXJjwxVkPzhzRMiF0qkKbWcdOlpE29O9eYUJiGhjSJGOJiFQ/s2960/armada-1.png" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="1480" data-original-width="2960" height="160" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjX4KT0TVe7-hTThX2RJ3uLwL851W-DLTufxJ8K5iH5Y2f-3YNnIpiqJXj5NMjk8JhQ1rhA7WgNT5h_X80ZJ3KzbYY7OJYsNSigQx_BhyspjZI146huWGC5JKuRFGlAXGSNVjrnLh6ibOcXJjwxVkPzhzRMiF0qkKbWcdOlpE29O9eYUJiGhjSJGOJiFQ/s320/armada-1.png" width="320" /></a></i></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>Les jeux Olympiques de Paris 2024 seront populaires… ou pas.</i></b></span><p></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;">Il n’y a jamais de petits symboles… À 500 jours de
Paris 2024, alors que les organisateurs avaient promis des jeux Olympiques «accessibles
à tous» et «populaires», la polémique sur le coût exorbitant de la
billetterie, comme les conditions d’obtention des tickets, laisse des traces et
des doutes légitimes. Avec ses tarifs élevés, son mode de tirage au sort et ses
disciplines reines hors de prix pour le commun des mortels, ces Jeux tant rêvés
oscillent d’ores et déjà entre les promesses initiales et une certaine réalité
concrète.<o:p></o:p></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;">Les principaux acteurs de l’événement, qu’il s’agisse du
Comité d’organisation ou de l’établissement public chargé de la livrais on des
ouvrages, la Solideo, ne manquent pourtant pas d’imagination pour vanter
l’avancement des chantiers et le coup d’accélérateur que ces derniers opèrent
dans le processus du Grand Paris. Infrastructures, transports, développement
économique, emploi: tout est, en effet, dans la boucle de ces Jeux de 2024,
qui ne concernent pas que la capitale. En témoigne la situation en
Seine-Saint-Denis, aux premières loges de ces JO, puisque ce département draine
80% des investissements de la Solideo, avec des projets monumentaux en cours,
tels que le village olympique et celui des médias qui accueilleront le monde
entier. Le discours officiel – volonté de promulguer des Jeux «solidaires»
devant être une «opportunité» pour les territoires d’accueil – peine à
se concrétiser.<o:p></o:p></span></p>
<p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium;">À mi-parcours des travaux de préparation, les retombées
positives en matière d’emploi local restent très en deçà des objectifs fixés.
En 2019, Paris 2024 avait annoncé «150 000 emplois directs créés sur
la période 2018-2024» dans les trois secteurs directement concernés:
événementiel, tourisme et construction. Devant l’omerta des grandes
entreprises, singulièrement celles du BTP, personne ne se risque à quantifier
les emplois effectivement créés. Seule indication, très modeste, la Solideo se
félicite d’avoir impliqué 2 222 personnes éligibles aux clauses sociales,
dont 1 007 en Seine-Saint-Denis. Selon certaines indiscrétions, il fut même «laborieux»
d’en arriver là… Au stade suprême du néolibéralisme sportif et des intérêts
capitalistiques, les JO de 2024 pourront-ils vraiment être populaires? Rien
n’est gagné. </span></p><p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="color: #3d85c6; font-size: x-small;">[<b>EDITORIAL </b>publié dans <i>l'Humanité </i>du 14 mars 2023.]</span></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-2816057174668857752023-03-04T14:11:00.000+01:002023-03-04T14:11:37.578+01:00Héritage(s)<p><span style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3vOEb0YfqdyWZJLxxE2ejWdE645E_WctUUZEF2xMEagG814KS3nDkzOTOeOs9njzeg4Y-pjIiRQF6PSMEzC8J-3Dcdf3Zo8ErODE8YXyGW32SVw7-FwqC5bLyFb0wme-wclUogmXiouHbnObPb5BGQIqN5PybMHPnk7x2DLam6GIA30XEoS5aIYMQGQ/s2000/NRTFWAL4MF7MG4OWXC74C7JYBY.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="1333" data-original-width="2000" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3vOEb0YfqdyWZJLxxE2ejWdE645E_WctUUZEF2xMEagG814KS3nDkzOTOeOs9njzeg4Y-pjIiRQF6PSMEzC8J-3Dcdf3Zo8ErODE8YXyGW32SVw7-FwqC5bLyFb0wme-wclUogmXiouHbnObPb5BGQIqN5PybMHPnk7x2DLam6GIA30XEoS5aIYMQGQ/s320/NRTFWAL4MF7MG4OWXC74C7JYBY.jpg" width="320" /></a></i></b></div><b><i>Un paysage social et politique en mutation.</i></b><p></p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px;"><b>Gamins.</b> Dès le 7 mars, tout peut changer. Mobilisations, grèves, manifestations de masse… et pourquoi pas blocage du pays. Le peuple ne veut pas de cette maudite réforme des retraites – et rien, absolument rien ne viendra modifier cette réalité, pas même la bataille parlementaire dont l’issue reste incertaine, puisque l’exécutif n’exclut pas un passage en force. Mardi, nous retrouverons donc le chemin des rues et des pavés, avec au cœur et à l’esprit tous les possibles. Sans doute croiserons-nous, de nouveau, comme à chaque fois depuis le début de ce mouvement inédit, des portraits d’Ambroise Croizat brandis souvent par nos gamins. Les combats et leur appropriation modifient les paradigmes. Nous ne venons pas de nulle part, une longue lignée nous pousse dans le dos, à condition de ne pas lâcher notre fil d’Ariane – la lutte pour la justice – reposant sur l’«union du populaire et du régalien», la moins mauvaise des définitions acceptables, sur le long terme, de la gauche hexagonale en héritage. Le bloc-noteur, mélancolique d’époques qu’il n’a étudiées que dans les livres, a quelquefois suggéré que jamais la politique en France n’avait été aussi «déshistorisée». À se demander si une certaine négligence pour le peuple et une certaine indifférence pour l’Histoire (avec sa grande H) n’entretiennent pas quelque secret rapport. D’ailleurs, n’est-ce pas singulier que, au moment où «démocratie» est dans toutes les bouches, «peuple» sente le soufre, sans parler d’un autre mot, «syndicaliste»? Jusqu’à en effrayer les puissants…<u></u><u></u></p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px;"><br /></p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px;"><b>Revanchard.</b> Les syndicats sont de retour. Et avec eux, de loin en loin, se tisse une sorte de «front populaire» assez revanchard. Ne nous emballons pas, certes. Mais regardons avec lucidité ce paysage social et politique en mutation. Jusqu’à il y a peu, les arriérations de notre ici-et-maintenant voulaient nous inciter à croire que la lutte sociale – pour ne pas dire la lutte des classes – était devenue vieille lune, une pratique ringarde à laisser aux oubliettes. Patatras. Le mouvement de contestation en cours contre la réforme des retraites nous prouve tout le contraire et nous éclaire sur un point fondamental. Quand une mobilisation authentiquement populaire redevient centrale, la caste libérale nihiliste peut être repoussée dans les cordes. L’avenir de nos retraites a fonctionné, de manière ultraconsciente, en point d’accroche fondamental, révélant une colère profonde et légitime. Celle qui demande – toujours dans notre pays ! – l’inaltérable exigence d’égalité. Cette égalité qui, périodiquement, secoue les consciences et broie les résignations. <i>«Une société est un éparpillement de mémoires, un amoncellement de poches à rancune et de comptes à régler»</i>, écrivit un jour Régis Debray. Et il ajoutait: <i>«Un peuple est une histoire longue, ou plus exactement l’unité de cette histoire. (…) Le peuple sans société devient une mystification et la société sans peuple, un capharnaüm.»</i><u></u><u></u></p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px;"><i><br /></i></p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px;"><b>Philosophie.</b> Il y a bientôt quatre-vingts ans, nos aïeux du Conseil national de la Résistance (CNR), communistes, gaullistes, syndicalistes, réinventaient à la Libération un pays ruiné par des années de guerre. Des ministres, non des moindres, Ambroize Croizat en tête, allaient appliquer un programme visionnaire. Une idée centrale prévalait, qui les dépassait tous et qu’incarnait Croizat à lui seul: se tourner vers l’horizon, avec la matrice inaliénable de penser à une vie meilleure pour les générations futures – le propre de notre destinée humaine, n’est-ce pas? Où l’on parlait de vie commune et du sens profond que ces mots recouvrent, grande politique et haute philosophie mêlées. Cette histoire populaire révolutionnaire nous a été, en quelque sorte, volée. Et si peu de personnes osent encore voir ce «déjà-là» communiste, pourtant si présent, dans la Sécurité sociale, dans nos retraites, dans ce «régime général» si attaqué depuis des décennies qu’il faudrait le refonder en totalité. Les choses essentielles de la vie de tous doivent rester la propriété de tous. Tel est notre legs, et l’enjeu du combat en cours… </p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px;"><br /></p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px; text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l'Humanité </i>du 3 mars 2023.]</span></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-20544275221369791372023-02-28T21:46:00.002+01:002023-02-28T21:46:41.360+01:00Objectif 7 mars !<p><span style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjjantPMF3nyyGMzr_9r_s1QRsO20uMH23Mmb9BmMKrf1AAwFKAdUuUfjT9lxp7J51rsz3nEbMuzbTdVxBt-TxIlYNweakbcvUf-RwExvRtsc2tsYEfMdJL7Qr_tiHvc9BpDzUju1WNrst6lTIQXvitpKJL7l1biDMKP4fT4WdNZnI7mIuJjf-woDGYxw/s1280/0703381860227-web-tete.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="720" data-original-width="1280" height="180" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjjantPMF3nyyGMzr_9r_s1QRsO20uMH23Mmb9BmMKrf1AAwFKAdUuUfjT9lxp7J51rsz3nEbMuzbTdVxBt-TxIlYNweakbcvUf-RwExvRtsc2tsYEfMdJL7Qr_tiHvc9BpDzUju1WNrst6lTIQXvitpKJL7l1biDMKP4fT4WdNZnI7mIuJjf-woDGYxw/s320/0703381860227-web-tete.jpg" width="320" /></a></i></b></div><b><i>L'exécutif a perdu la bataille de l'opinion...</i></b><p></p><p><span style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif;">Alors qu’Emmanuel Macron entame une tournée africaine en annonçant vouloir faire du neuf tout en activant les vieilles recettes de la Françafrique – s’adapter pour perdurer, en somme –, l’explosif projet de loi sur les retraites est désormais en discussion au Sénat. Entre vacances et rentrée scolaire, le pays, en état d’extrême tension, semble comme suspendu dans l’attente des jours prochains, à la manière d’une sorte de «trêve» durant laquelle chacun retient son souffle pour mieux préparer le retour de la grande bataille. Une date occupe déjà tous les esprits: le 7 mars.</span></p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px;">Ce jour-là, les mobilisations devraient prendre une tout autre forme et sans doute s’installer dans la durée. Des transports au secteur de l’énergie (raffineurs, EDF, etc.), la volonté de «bloquer le pays» n’est pas qu’un affichage, mais bien une réalité sous la forme de grèves reconductibles, d’ores et déjà annoncées çà et là. Ainsi, à la SNCF, l’ensemble des syndicats appellent à l’action dès le 7 mars. Nous connaissions la position de la CGT cheminots et de SUD rail. L’Unsa ferroviaire et la CFDT attendaient de consulter leurs adhérents. Les résultats de « la base » sont sans appel: plus de 80% d’avis favorables! Tous les cheminots rejoignent donc les grévistes de la RATP, qui avaient déjà annoncé, mi-février, participer au durcissement du combat.<u></u><u></u></p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px;"><br /></p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px;">Rien n’est écrit à l’avance. Mais l’affaire risque de se compliquer pour le couple Macron-Borne. D’autant que les sondages ne montrent aucun essoufflement, bien au contraire. Dans la dernière livraison de l’Ifop, seules10 % des personnes interrogées se déclaraient « tout à fait favorables » à la réforme. Du jamais-vu! L’exécutif a définitivement perdu la bataille de l’opinion. L’ampleur du mouvement de contestation nous prouve par ailleurs que la lutte sociale, quand elle redevient centrale, modifie le paysage et instaure en profondeur un nouveau rapport de forces. Toucher aux retraites a joué en point d’accroche, révélant une colère fondamentale et légitime: l’inaltérable exigence d’égalité, celle qui secoue les citoyens et élève les consciences. À rebours de l’histoire, Macron et ses premiers de cordée ont osé envoyer un message mortifère aux générations futures: «Après nous, le déluge!» Le rejet des Français est à la hauteur de ce mépris.</p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px;"><br /></p><p class="MsoNormal" style="background-color: white; font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; margin: 0px; text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>EDITORIAL </b>publié dans <i>l'Humanité </i>du 1er mars 2023.]</span></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-55132049081387626542023-02-24T10:17:00.001+01:002023-02-24T10:17:36.059+01:00Constituante(s)<p><b><i></i></b></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjPzQvPtNV_sBqz6ay4wd2JcDkLv6t8c5vgcUKVnj1pRA4ruTr2tL6-pJYw0pRPAlPBtQ5KDA6yO5D_6d8lQCsjM_Y8VEYXoUhQ8l2IBxyhUOGRD7UKXEFmWIymQpY755IZKckvIeaBFwQtgE1Vl33PQlxsTnq3AagJs3jzcqo6NYnb_oZI_1ADEaZ9hA/s1048/58914.HR.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="700" data-original-width="1048" height="214" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjPzQvPtNV_sBqz6ay4wd2JcDkLv6t8c5vgcUKVnj1pRA4ruTr2tL6-pJYw0pRPAlPBtQ5KDA6yO5D_6d8lQCsjM_Y8VEYXoUhQ8l2IBxyhUOGRD7UKXEFmWIymQpY755IZKckvIeaBFwQtgE1Vl33PQlxsTnq3AagJs3jzcqo6NYnb_oZI_1ADEaZ9hA/s320/58914.HR.jpg" width="320" /></a></i></b></div><b><i>Mac Macron, le monarque de la Ve République.</i></b><p></p><p><b>Institutions.</b> <em>«Penser sans peur»,</em> disait Descartes ; <em>«vivre pour la vérité»,</em> ajoutait Spinoza. Tout républicain digne de ce nom, qui tient à l’universel de sa patrie en agissant ici et partout à l’échelle du monde, doit désormais se poser une question simple mais lourde de signification: la Ve République a-t-elle vécu? Parvenu à ce point de crise démocratique et institutionnelle, regardons la vérité en face. Le régime du monarque-élu se trouve totalement à bout de souffle et, depuis l’arrivée de Mac Macron I et II, du haut de sa verticalité jupitérienne poussée jusqu’à la caricature, le sentiment de fracture entre le chef de l’État et les citoyens a connu une aggravation si inquiétante que tout retour en arrière paraît impossible. Autant le dire, la défiance croissante n’atteint plus seulement l’Élu des urnes, quelles que soient les circonstances du suffrage, mais bel et bien «la» politique en général – donc, en quelque sorte, tous les élus eux-mêmes, percutant de plein fouet cette sacro-sainte « représentation » qui leur est légitimement conférée. Ne soyons pas naïfs, Mac Macron en personne y réfléchit. Raison pour laquelle, si l’on en croit les dernières consultations au Palais, il songerait sérieusement cette fois à une «réforme des institutions», comme l’assurent certains conseillers. Un chantier lancé à bas bruit. Mais pas moins explosif que celui des retraites…</p><h4>Constitution.<span style="font-weight: normal;"> Aussi incroyable que cela puisse paraître eu égard au climat social et politique (sans parler de l’affaiblissement de la majorité au Parlement), Mac Macron voudrait en effet montrer qu’il n’a pas renoncé à un projet censé <em>«redonner de la souveraineté populaire» </em>(sic), idée qui figurait dans son programme. Après avoir consulté Nicoléon et Normal Ier il y a quelques semaines<em>, </em>le prince-président réfléchirait au retour du septennat, au calendrier électoral, à la proportionnelle, voire à un nouveau redécoupage des super-régions. Mi-janvier, lors d’un dîner avec des éditocrates triés sur le volet, Mac Macron avait précisé sa pensée en ces termes: <em>«Il faut se donner pour ambition de faire quelque chose de grand, sinon je ne suis pas pour le faire.» </em>Dilemme. Si le chantier ne saurait se résumer à un simple toilettage de la Constitution, comment le concevoir alors que le pays est sens dessus dessous et que les conditions à réunir pour une modification de la Constitution (qui doit être approuvée par les deux Chambres en vote identique, puis à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés par l’ensemble du Parlement réuni en congrès) semblent inatteignables. Sauf par référendum. Solution improbable, évidemment, puisque l’auteur de la question deviendrait la cible – et sans doute la victime – de toutes les attaques.</span></h4><div><span style="font-weight: normal;"><br /></span></div><h4>Crise.<span style="font-weight: normal;"> Mac Macron s’apprêterait donc à assumer un big-bang institutionnel? Attention aux mots, soyons sérieux. Il s’agirait au mieux d’un «accommodement». Car, de toute évidence, la Constitution, l’organisation des pouvoirs publics, la démocratie et donc la République ne correspondent plus aux attentes ni aux exigences de solidarité, de justice et à l’aspiration croissante à un nouveau mode de développement. Nous voici parvenus à un point de non-retour dangereux pour les équilibres fondamentaux de la nation. Nous sommes au bout d’un cycle, celui d’une démocratie représentative pensée à la fin du XVIIIe siècle, qui ne reconnaît au citoyen que la compétence d’élire des représentants qui vont vouloir pour lui. Un autre cycle s’ouvre et il ne réclame pas de demi-mesures: il a pour principe la compétence normative des citoyens, à savoir leur capacité d’intervenir personnellement dans la fabrication des lois et politiques publiques. À l’approche de son soixante-cinquième anniversaire, le régime fondé par le général de Gaulle est en voie de battre le record de longévité détenu jusqu’à présent, dans l’histoire constitutionnelle française, par la IIIe République (1870-1940). Un réajustement juridique soumis à une représentation nationale contestée, serait insuffisant pour rénover la Ve République. Seule une (r)évolution citoyenne pourrait permettre le vrai big-bang salutaire, par l’élaboration d’une Constituante, pleine et entière. Tout autre chemin nous conduit au chaos. </span></h4><div style="text-align: right;"><span style="color: #3d85c6; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l'Humanité </i>du 24 février 2023.]</span></div>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-12544660527674983212023-02-16T21:47:00.001+01:002023-02-16T21:47:28.396+01:00Mensonge(s)<p><b><i><span style="font-size: medium;"></span></i></b></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><b><i><span style="font-size: medium;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi2BugHAc-WRzmg2AegAynk78fdCXlII96NtRxf2gCLJ0w8kcjhUMuLXs7RBYOZbUDwRbElc4JIOPioQoyQiJif4zj61q6a5p7o1FNipiMDcJnqW1ahunXRiQOTD_HPrvf751EeyToudxAdJPO74vhQ0dRckQ3wI9HRZ8oPL_PvGrZkvfqT8v2F3r6TYw/s1600/photo-d-illustration-sipa-romain-doucelin-1675975130.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="1068" data-original-width="1600" height="214" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi2BugHAc-WRzmg2AegAynk78fdCXlII96NtRxf2gCLJ0w8kcjhUMuLXs7RBYOZbUDwRbElc4JIOPioQoyQiJif4zj61q6a5p7o1FNipiMDcJnqW1ahunXRiQOTD_HPrvf751EeyToudxAdJPO74vhQ0dRckQ3wI9HRZ8oPL_PvGrZkvfqT8v2F3r6TYw/s320/photo-d-illustration-sipa-romain-doucelin-1675975130.jpg" width="320" /></a></span></i></b></div><b><i><span style="font-size: medium;">Retraites: le mensonge originel des 1200 euros...</span></i></b><p></p><p><span style="font-size: medium;"><b>Langage.</b> Et soudain, le surgissement de l’événement imprévisible… Il a donc fallu attendre des semaines et de longs jours de quiproquos et de polémiques, puis le début du débat parlementaire, pour connaître – enfin – la vérité. Pour ne pas dire l’arnaque, pensée, voulue et relayée par les principaux éditocrates de notre cher et beau pays. Souvenez-vous. Peu après la présentation par la première sinistre du projet de loi de réforme des retraites, qui constitue une sorte de clef de voûte du quinquennat de Mac Macron II sans laquelle tout pourrait s’effondrer autour de lui, nous avions entendu cet argument:<em> «Pas de retraite en dessous de 1 200 euros.»</em> Combien de ministres et autres thuriféraires ont-ils répété cet « élément de langage », jusqu’à y croire eux-mêmes sans doute, comme si défilaient sous leurs yeux des paysages imaginés servant une unique cause: convaincre le bon peuple, forcément crédule et prêt à gober n’importe quoi. Sauf que l’arnaque était là, nichée dans l’énoncé. La pension à 1200 euros brut minimum ne concerne que… 0,002% des salariés, avec une carrière complète au Smic ! Précision : en toute logique, parmi les 20% des retraités les plus pauvres, 9 sur 10 n’ont pas eu une carrière complète. Vous avez bien lu.</span></p><h4><span style="font-size: medium;">Privilégiés.<span style="font-weight: normal;"> Au fond, tout s’explique dans cette rhétorique « mobilisatrice » de la Macronie : voler deux années à tous les travailleurs et travailleuses, en moyenne 36210 euros par personne, et augmenter de moins de 100 euros une personne sur 50000. Joli calcul. Au résultat tangible: 93% des Français rejettent son projet. Équilibre, justice, progrès: derrière les mots de la première sinistre, une entreprise de communication. Appelons cela le «service avant-vente». Nous imaginons, sous les lambris de la République, les soirées à phosphorer pour trouver le slogan passe-partout. Décryptons-le sommairement. Équilibre: contraindre les citoyens à travailler plus longtemps afin de soi-disant «combler» un déficit qui n’existe pas, ou pas vraiment. Justice: toutes les classes populaires – l’ultramajorité de notre société – travailleront deux années de plus pour financer les sympathiques longues années de retraite à profusion des plus privilégiés. Progrès: le minimum retraite à 1200 euros. Nous y voilà.</span></span></h4><h4><span style="font-size: medium;"><br /></span></h4><h4><span style="font-size: medium;">Pathétique.<span style="font-weight: normal;"> Tromperie totale. Même le montant a été avancé comme un mensonge. En réalité, du moins pour ceux qui sont concernés, il s’agit de 1 193 euros brut, donc 1150 euros net… En d’autres occasions, nous aurions pu en rire. L’affaire s’avère trop sérieuse pour sombrer dans la désinvolture. Prenez l’ineffable Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, pris en flagrant délit de mensonge originel et dénoncé publiquement, comme ses collègues à portefeuille, par l’économiste Michaël Zemmour en direct dans la matinale du 7 février de France Inter – notons au passage la « déontologie » à géométrie variable de la coprésentatrice Léa Salamé. Interpellé un dimanche matin sur les mêmes ondes, mais par un autre présentateur, M. Véran fut dès lors mis au pied de ses contradictions. Plusieurs jours après, Léa Salamé devait admettre l’approximation coupable, sans aucune vérification ni travail en profondeur, reconnaissant finalement que<em> «même nous, journalistes, on doit balayer devant notre porte».</em> Dont acte. Question: le mensonge ainsi dévoilé l’aurait-il été sans l’intervention salutaire de Michaël Zemmour? Il y eut d’ailleurs plus grave. Selon l’économiste, avant que le débat parlementaire ne débute, <em>«les députés étaient privés des données du débat»</em>, puisque le gouvernement avait sciemment omis de présenter aux élus les statistiques, pourtant connues, qui leur auraient permis d’estimer l’impact dudit projet, singulièrement sur les prévisions de croissance et l’emploi des seniors. Il ajoutait: <em>«L’étude d’impact ne disait pas qu’environ une femme sur quatre serait concernée par un décalage de deux ans pour une pension quasi inchangée.»</em> Avant de préciser: <em>«Les chiffres présentés par l’exécutif, ou au contraire absents, étaient systématiquement sélectionnés non pas pour éclairer la réforme, mais pour en faire la réclame.» </em>Au matin du mercredi 15 février, toujours sur France Inter, le ministre en charge, Olivier Dussopt, des trémolos dans la voix, dut finalement tout admettre en bloc. En y mettant les formes. Trop tard: l’homme fut pathétique. Ce n’était plus le surgissement de l’événement imprévisible, mais bien le surgissement de l’événement nécessaire…</span></span></h4><div style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l'Humanité </i>du 17 février 2023.]</span></div>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-31608982070627952182023-02-09T17:38:00.002+01:002023-02-09T17:38:41.717+01:00Valeurs(s)<p class="MsoNormal" style="line-height: normal;"><span style="background: white; mso-bidi-font-size: 17.0pt;"><span style="font-size: medium;"><b><i></i></b></span></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhD7bERvX3mRM9H6uZool_0gxPirWWL6Lvx9iQxI8xIKhDnOk7nCPPQhkqYHH-IUzG8HUEfVtuLj99HxWuAHqtbdK7GCvRMQiAevV5G1IsTTl8cc-pjHDEUIOf4kFuxD6ayaKdPaUon7GCcP1G_Kmo7WT2JBPTOUt7tqlCXHdzEPVrpmbkYI5z_xtxMsQ/s574/Couv-prenons-le-pouvoir-sur-nos-retraites-410x574.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="574" data-original-width="410" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhD7bERvX3mRM9H6uZool_0gxPirWWL6Lvx9iQxI8xIKhDnOk7nCPPQhkqYHH-IUzG8HUEfVtuLj99HxWuAHqtbdK7GCvRMQiAevV5G1IsTTl8cc-pjHDEUIOf4kFuxD6ayaKdPaUon7GCcP1G_Kmo7WT2JBPTOUt7tqlCXHdzEPVrpmbkYI5z_xtxMsQ/s320/Couv-prenons-le-pouvoir-sur-nos-retraites-410x574.jpg" width="229" /></a></i></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>Retraites : un essai décapant de Bernard Friot. <o:p></o:p></i></b></span><p></p><p><span style="font-size: medium;"><b>Pension.</b> Dans son dernier livre, un essai revigorant et formateur intitulé <em>Prenons le pouvoir sur nos retraites</em> (éd. la Dispute), le sociologue et économiste Bernard Friot expose une interrogation bien dérangeante: <em>«Pour une classe dirigeante qui tire tout son pouvoir de son pouvoir sur le travail, qui a le monopole de la décision sur la production et qui l’impose aux travailleurs, que ceux-ci soient indépendants ou dans l’emploi, sans qu’ils puissent décider rien de fondamental sur le travail, la question absolument vitale est la suivante: les retraités sont-ils d’anciens travailleurs retrouvant dans leur pension le différé de leurs cotisations et libérés du travail?» </em>Ceux qui connaissent les travaux essentiels de Bernard Friot pourraient anticiper la suite. <em>«La réponse, non moins vitale, de la bourgeoisie capitaliste est évidemment que les retraités sont d’anciens travailleurs.»</em> Et il ajoute aussitôt que, selon lui, le drame viendrait du fait que <em>«leurs opposants»</em> auraient la <em>«même</em> <em>réponse»</em>, précisant ce petit point d’Histoire: <em>«Drame d’autant plus lourd que les opposants à la réforme sont les héritiers de celles et ceux qui, à la CGT et au Parti communiste surtout, ont construit au cours du siècle dernier la pension comme continuation d’un salaire de référence, sans que soit tenu compte des cotisations, ce qu’elle est toujours dans sa large majorité.»</em></span></p><h4><span style="font-size: medium;">Pouvoir.<span style="font-weight: normal;"> Non sans une douce provocation, le décor est planté. Ou presque. Reste à préciser l’essentiel, avant d’en débattre sérieusement. </span><em style="font-weight: normal;">«Un tel salaire de la libre activité, déconnecté de l’emploi, met en cause le monopole de la bourgeoisie sur la définition et l’organisation de ce qu’elle produit, </em><span style="font-weight: normal;">écrit Bernard Friot. </span><em style="font-weight: normal;">Les réformateurs capitalistes sont évidemment vent debout contre ce salaire de la libre activité, puisque leur puissance de classe repose sur l’absence de réelle liberté au travail des travailleurs.» </em><span style="font-weight: normal;">Pour l’économiste, </span><em style="font-weight: normal;">«c’est en défendant la retraite comme “hors travail” et en posant eux aussi les retraités comme “anciens travailleurs” que les opposants à la réforme perdent»,</em><span style="font-weight: normal;"> car </span><em style="font-weight: normal;">«ils sont alors sur le terrain des réformateurs»</em><span style="font-weight: normal;">. La salve, volontaire, s’applique-t-elle à nous remettre en cause sur la forme, ou à revisiter le sens profond de l’ambition héritée, par exemple, du programme du Conseil national de la Résistance? Les deux, vous avez compris. Le travail ne devrait donc pas être considéré comme </span><em style="font-weight: normal;">«la fin du travail» </em><span style="font-weight: normal;">mais comme </span><em style="font-weight: normal;">«un levier formidable pour conquérir le pouvoir sur le travail»</em><span style="font-weight: normal;"> qui inviterait </span><em style="font-weight: normal;">«à une passionnante mutation de ce que sont le salaire, le travail, le travailleur et la travailleuse»</em><span style="font-weight: normal;">. Le mode d’emploi? </span><em style="font-weight: normal;">«Remplacer la prétendument nécessaire “avance en capital” par l’avance en salaires et mettre la production sur ses pieds: les travailleurs. Prendre le pouvoir sur nos retraites, c’est prendre le pouvoir sur le travail.» </em><span style="font-weight: normal;">Inventer le salaire à vie, en somme.</span></span></h4><div><span style="font-size: medium;"><span style="font-weight: normal;"><br /></span></span></div><h4><span style="font-size: medium;">Civilisation.<span style="font-weight: normal;"> Le bloc-noteur ne l’oublie pas, le travail est la part de nos activités réputées productives, puisque le travail produit de la valeur économique à l’occasion de la production de valeur d’usage. Bernard Friot le confirme, </span><em style="font-weight: normal;">«dans le capitalisme, l’objet exclusif du travail est de produire de la valeur pour la valeur, pour mettre en valeur du capital dans une folle fuite en avant qui instrumentalise les valeurs d’usage : elles n’ont pas de fin en soi, la valeur d’usage n’est pas l’objet du travail. L’activité qui devient productive perd son objet de valeur d’usage.» </em><span style="font-weight: normal;">Anthropologiquement, affirmons dès lors que, plus que la contrainte ou la pénibilité, cette </span><em style="font-weight: normal;">«absence d’objet propre»</em><span style="font-weight: normal;"> pour ceux qui exercent une activité </span><em style="font-weight: normal;">«caractérise le travail dans le capitalisme»,</em><span style="font-weight: normal;"> puisque la finalité ne repose que sur la production de survaleur au profit de la bourgeoisie capitaliste. Le geste de Croizat qui consistait à supprimer le lien entre le niveau de pension et la somme des cotisations, déliant salaire et emploi, ne fut qu’une première étape. Près de quatre-vingts ans plus tard, n’est-il pas temps de passer à la seconde étape en supprimant les annuités, mais en préservant un âge légal de départ? Petite indication: en 1982, 75% des Français se disaient </span><em style="font-weight: normal;">«persuadés»</em><span style="font-weight: normal;"> que la retraite se prendrait bientôt à 55 ans pour tous. C’était une évidence de «civilisation». Aurions-nous renoncé à tout?</span></span></h4><div style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l'Humanité </i>du 10 février 2023.]</span></div>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-69711166870562070422023-02-07T09:55:00.004+01:002023-02-07T09:55:48.290+01:00Combat pour nos vies en héritage<p><span style="font-size: medium;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjHT-wl9R61zqLnsvMZr2oj63Z7ycPvDrIydHxaMOmOfGBIcwg8IccLFreUExfrVhHcz9egQvrH64ympY8b_OIEVu4DppK8hkJwU9l7mP5jM49n-Hjrg91xjLh_o2BXj916R37rjFMrt0sloCKbFDVBtp8JfYKQvWX7FcmMTCn3yX_uUSzUUGLd4wQuSQ/s948/329731757_1568684676950304_2516212338281457637_n.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="948" data-original-width="780" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjHT-wl9R61zqLnsvMZr2oj63Z7ycPvDrIydHxaMOmOfGBIcwg8IccLFreUExfrVhHcz9egQvrH64ympY8b_OIEVu4DppK8hkJwU9l7mP5jM49n-Hjrg91xjLh_o2BXj916R37rjFMrt0sloCKbFDVBtp8JfYKQvWX7FcmMTCn3yX_uUSzUUGLd4wQuSQ/s320/329731757_1568684676950304_2516212338281457637_n.jpg" width="263" /></a></i></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>Sortir de la dérive libérale ouverte dans les années 1980 n’est pas un rêve impossible.</i></b></span><p></p><h4><span style="font-weight: normal;"><span style="font-size: medium;">Ainsi donc, l’exécutif ne cherche même plus à convaincre une opinion publique perdue, mais tente de bidouiller des aménagements afin d’attirer dans ses filets la droite parlementaire. En essayant de passer en force à tout prix, Macron et Borne assument une sorte de « rupture » avec le pays, à rebours de ce que le peuple leur montre depuis des semaines. Ce mardi, et peut-être plus encore le samedi 11 février sous la forme de mobilisations monstres, le mouvement populaire contre la « réforme » des retraites devrait encore s’élargir. L’équation de la Macronie paraît invraisemblable. Rendons-nous compte. Sept Français sur dix refusent ce maudit texte de loi, pas moins de neuf salariés sur dix, et les syndicats demeurent unis… Nous n’assistons plus seulement à un bras de fer, mais à un combat pour nos vies en héritage, à une bataille capable de renverser les équilibres de la nation. Tous les scénarios, même les plus optimistes, deviennent crédibles.</span></span></h4><div><span style="font-weight: normal;"><span style="font-size: medium;"><br /></span></span></div><h4><span style="font-weight: normal;"><span style="font-size: medium;">Incapable de justifier rigoureusement son projet en termes d’équilibre financier face aux contre-propositions de la Nupes, le gouvernement crée une fausse diversion pseudo-«civilisationnelle» en arguant des prévisions de mortalité dans les décennies futures. Sauf que, dans la plupart des pays développés, les statistiques sont têtues: nous observons une décélération, voire un début de baisse de l’espérance de vie. Voici la logique implacable, partout, du «travailler plus longtemps»…</span></span></h4><div><span style="font-weight: normal;"><span style="font-size: medium;"><br /></span></span></div><h4><span style="font-weight: normal;"><span style="font-size: medium;">Alors que s’ébranle dans les tréfonds de la société un inextinguible désir de justice, affleurent çà et là des références évidentes, celles de 1936, des «Jours heureux» et de 1968. L’histoire ne se répète pas, mais elle trace ces sillons par lesquels chaque génération plante ses désirs et espérances. Dans ce moment si particulier de notre aventure politique et sociale, tandis que les injustices explosent et que les richesses phénoménales se concentrent dans quelques mains, il n’est pas inenvisageable d’inverser la vapeur du «thatchérisme» brutal. Sortir de la dérive libérale ouverte dans les années 1980 n’est pas un rêve impossible. Le chemin de la France, sur le temps long, possède toujours quelque chose de singulier – souvent en tant qu’exemple.</span></span></h4><div><span style="font-weight: normal;"><span style="font-size: medium;"><br /></span></span></div><div style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>EDITORIAL </b>publié par <i>l'Humanité </i>du 7 février 2023.]</span></div>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-9613631520174442172023-02-03T12:20:00.000+01:002023-02-03T12:20:05.785+01:00Hypothèse(s)<p><span style="font-size: 20px;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgdcVwKoxpRataPfEVaon_gt0a0N7qHzbNSIsJ9NGWvKiCmglLJrJ4vCzFoSmv9UmC4SROqS9xTeNcZQMotBnwxB-Dz-JYgom0eAUrGwj4JdL2tpUm64SYlVeJ6u9N39d5-CyvSgtlb6-1wsrbw0ZRuBy1o_kqxrQ26w4TW75wCxkhueKQGiBxMJwew9Q/s693/659017_document.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="462" data-original-width="693" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgdcVwKoxpRataPfEVaon_gt0a0N7qHzbNSIsJ9NGWvKiCmglLJrJ4vCzFoSmv9UmC4SROqS9xTeNcZQMotBnwxB-Dz-JYgom0eAUrGwj4JdL2tpUm64SYlVeJ6u9N39d5-CyvSgtlb6-1wsrbw0ZRuBy1o_kqxrQ26w4TW75wCxkhueKQGiBxMJwew9Q/s320/659017_document.jpg" width="320" /></a></i></b></div><b><i>Retraites: Mac Macron a-t-il déjà perdu?</i></b><p></p><h4><span style="font-size: medium;">Échec.<span style="font-weight: normal;"> Et si Mac Macron avait déjà perdu la partie? La question peut paraître saugrenue, sauf qu’elle se pose désormais. Et la réponse s’y trouve, en quelque sorte. Souvenons-nous que le prince-président, dans son livre-programme au titre ronflant, <em>Révolution</em>, entendait tout changer en politique et qu’il incarnait à lui seul, au moins par sa jeunesse, cette ambition. Il voulait dynamiser les pratiques, responsabiliser, échanger, jusqu’à octroyer du pouvoir au terrain. Six ans plus tard, malgré sa réélection (dont nous connaissons les circonstances), le bilan s’avère catastrophique et mortifère pour la politique elle-même. Sa volonté de passer en force sur les retraites en est le symbole le plus ultime. Certes, l’Histoire pourrait lui donner raison, comme le rappelait cette semaine le chroniqueur politique Thomas Legrand: <em>«Il existe encore dans la Macronie ce petit fantasme sarkozien selon lequel une réforme passée, malgré plus d’un million de manifestants à chaque défilé, serait une preuve de courage et de ténacité politiques.»</em> N’oublions pas, en effet, que le seul échec des libéraux reste la victoire des cheminots contre la mise en cause de leur régime de retraite par Juppé en 1995, sachant que Nicoléon allait imposer la même réforme en 2008. Depuis trente-cinq ans, toutes les «réformes» entreprises ont ainsi été réalisées, sauf celle de 2019, barrée par le Covid et le confinement.</span></span></h4><div><span style="font-size: medium;"><span style="font-weight: normal;"><br /></span></span></div><h4><span style="font-size: medium;">Bilan.<span style="font-weight: normal;"> 2023 ne ressemble en rien au passé, fût-il récent, et quelque chose dans l’air nous laisse à penser que la marge de manœuvre de Mac Macron est si réduite qu’aucun des scénarios possibles ne pourrait lui convenir. Primo : la loi est votée, en échange de «compensations». Mais franchement, face à la colère populaire et à l’ampleur du rejet des mesures phares (64 ans et allongement de la durée de cotisation), nous ne voyons pas quels «gestes» pourraient être assez crédibles pour éteindre le feu sous la marmite. Secundo : Mac Macron et sa première sinistre poussent au coup de force parlementaire jusqu’au bout, le texte est adopté d’une manière ou d’une autre, avec les conséquences sociales que nous connaissons. À l’évidence, ce choix laisserait une telle impression de mépris que ce serait, sans nul doute, l’un des derniers actes du pourrissement généralisé de notre démocratie. L’hypothèse n’a rien d’impossible. Sauf à s’étonner d’entendre la cheffe du gouvernement marteler que le report de l’âge de départ à 64 ans <em>«n’est plus négociable»</em> ou son ministre de l’Intérieur ironiser sur cette société <em>«sans travail»</em> et sans <em>«effort»</em> que prônerait une gauche composée de <em>«bobos»</em> cherchant à <em>«bordéliser»</em> le pays. Bonjour le niveau, alors que Mac Macron s’était promis-juré d’inscrire cette réforme dans son bilan, quitte à donner l’impression d’avoir raison seul contre tous, lui détenant le savoir (sic), et l’ultramajorité des autres n’ayant pas la capacité de comprendre la démarche…</span></span></h4><div><span style="font-size: medium;"><span style="font-weight: normal;"><br /></span></span></div><h4><span style="font-size: medium;">Revers.<span style="font-weight: normal;"> Mais pour le bloc-noteur, il reste évidemment un tertio dans ces scénarios: le retrait du texte, ni plus ni moins, après une mobilisation grandissante et durable. Une victoire du peuple, en somme, qui pourrait même intervenir après le vote de la loi. Un précédent existe: le CPE, adopté au Parlement en 2006, mais jamais appliqué sur décision de l’exécutif en raison des fortes manifestations. Dans ce cas de figure, une formidable crise politique succéderait à cette défaite du prince-président, accusé d’avoir inutilement créé le chaos tout en pulvérisant sa majorité (relative). Dès lors, le second et dernier quinquennat serait lui aussi mort-né, et nous aurions au Palais – souhaitons-le – un astre mort, incapable de gérer les affaires courantes. Une question se pose: peut-il seulement prendre ce risque? Et s’il le prend, ne serait-il pas conduit à dissoudre l’Assemblée nationale, voire carrément à démissionner? Beaucoup de rumeurs circulent ces jours-ci dans les coulisses du pouvoir. Un conseiller d’État nous disait en début de semaine: <em>«C’était déjà vrai avant, mais là il va trop loin en voulant réformer contre le peuple. Il est pris à revers et quoi qu’il se passe, il perd…»</em></span></span></h4><div style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l'Humanité </i>du 3 février 2023.]</span></div>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-27113490447167924272023-01-30T11:25:00.005+01:002023-01-30T11:25:46.876+01:00La bataille<p><span style="font-family: Cambria, "serif";"><span style="font-size: medium;"></span></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhF50XP9bYpvvmDD8Rop1jdlchlHxjUY08B9GYu4TkOv88RyScK-ITLaydGgVnQppbgD3psXGgwHE_r7mTJs4KEL6UpEVHiKXKHSsCMCBFRRbTnWXpkvCsaSSBrWrt_OIBzRB3b4cQQ8CW6KP2OxG52mKCcfZsczl74JUJpk6eYLgoNvlLo0VNWFeS8Rw/s750/phps94y34.jpeg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="750" data-original-width="750" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhF50XP9bYpvvmDD8Rop1jdlchlHxjUY08B9GYu4TkOv88RyScK-ITLaydGgVnQppbgD3psXGgwHE_r7mTJs4KEL6UpEVHiKXKHSsCMCBFRRbTnWXpkvCsaSSBrWrt_OIBzRB3b4cQQ8CW6KP2OxG52mKCcfZsczl74JUJpk6eYLgoNvlLo0VNWFeS8Rw/s320/phps94y34.jpeg" width="320" /></a></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>Depuis quinze jours, le
« service après-vente » de toute la Macronie ne passe pas.</i></b></span><p></p>
<p class="MsoNormal" style="mso-margin-bottom-alt: auto; mso-margin-top-alt: auto; mso-outline-level: 4;"><span style="color: black; font-family: Cambria, "serif";"><span style="font-size: medium;">Élisabeth Borne
ne manque décidément pas de toupet. À la veille du début de l’examen du projet
en commission à l’Assemblée, alors que la France s’attend à vivre l’acte 2
de la mobilisation contre la réforme des retraites, ce mardi 31 janvier,
la première ministre s’est donc exprimée sur France Info. Ses mots en disent
long sur la méthode et confirment que la tentation du passage en force au
Parlement est non seulement actée, mais théorisée. <i>«Ça n’est plus
négociable, la retraite à 64 ans et l’accélération de la réforme Touraine»,</i>
a déclaré la cheffe du gouvernement, ajoutant: <i>«C’est le compromis que nous
avons proposé.»</i> La bataille dans l’Hémicycle n’a même pas débuté, mais
l’exécutif montre déjà les dents. La brutalité comme vraie nature politique.<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal" style="mso-margin-bottom-alt: auto; mso-margin-top-alt: auto; mso-outline-level: 4;"><span style="color: black; font-family: Cambria, "serif";"><span style="font-size: medium;">Et ce n’est pas
tout! Dans une séquence de communication pour le moins téléguidée, il fallait
également lire <i>le Parisien</i> et l’entretien surréaliste du ministre de
l’Intérieur, Gérald Darmanin, qui a accusé la Nupes de vouloir <i>«bordéliser
le pays»,</i> fustigeant au passage ce qu’il appelle le <i>« gauchisme paresse
et bobo »</i>. Selon lui, <i>« ceux-là »</i> auraient <i>«un profond mépris de
la valeur travail»</i>. Avant de préciser: <i>«Le travail n’est pas une
maladie.»</i> Les Français apprécieront, surtout les 74% d’entre eux qui
estiment que la réforme est <i>«injuste», «inefficace» </i>et <i>«pas
nécessaire»</i>.<o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal" style="mso-margin-bottom-alt: auto; mso-margin-top-alt: auto; mso-outline-level: 4;"><span style="color: black; font-family: Cambria, "serif";"><span style="font-size: medium;">Opinion,
Parlement, majorité instable et coincée entre son aile gauche et la nécessité
de trouver des alliés du côté de la droite LR: les pontes du gouvernement
paniquent. Et pour cause. Depuis quinze jours, le «service après-vente» de
toute la Macronie ne passe pas. Au contraire, 57% de nos concitoyens <i>«comprendraient
que les grévistes bloquent le pays»,</i> <i>«seul moyen» </i>à leurs yeux de
faire capoter le projet de loi<i>. </i>La base sociale est perdue, d’où la
volonté de tordre un peu plus la démocratie parlementaire, jusqu’à en bafouer
les usages. Une chose est certaine: mardi, une grande partie de la réponse sera
dans la rue. Laurent Berger lui-même met en garde l’exécutif. Pour le leader de
la CFDT, ne pas tenir compte des mobilisations <i>«serait une faute»</i>.
Macron et Borne sont prévenus… <o:p></o:p></span></span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align: right;"><span style="font-family: Cambria, "serif";"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[EDITORIAL
publié dans l’Humanité du 30 janvier 2023.]</span></span><span style="font-family: "Cambria","serif"; font-size: 14.0pt; mso-ascii-theme-font: major-latin; mso-hansi-theme-font: major-latin;"><o:p></o:p></span></p>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-10976625263583285952023-01-27T13:44:00.000+01:002023-01-27T13:44:00.505+01:00Artificielle(s)<p><span style="font-family: Cambria, "serif"; font-size: 16pt;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhNGL9NK4JXSlAFAi0HykkLVi10FA-ML5MoaqCqhK89rLEhAGuhb2G-dxvdrW30DdNrWK7e0PRNXc2Ur-24qGq4iM1-HlNiBCv2dUQ03r8vRv9LyzTwsK1L5OLUPNJtp3dapDfrLLtPmvIS_-VzyBxxekvdUpE2kQvbRKXde_sjAU9xO3v138nhkA6JPQ/s1280/0702978771372-web-tete.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="720" data-original-width="1280" height="180" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhNGL9NK4JXSlAFAi0HykkLVi10FA-ML5MoaqCqhK89rLEhAGuhb2G-dxvdrW30DdNrWK7e0PRNXc2Ur-24qGq4iM1-HlNiBCv2dUQ03r8vRv9LyzTwsK1L5OLUPNJtp3dapDfrLLtPmvIS_-VzyBxxekvdUpE2kQvbRKXde_sjAU9xO3v138nhkA6JPQ/s320/0702978771372-web-tete.jpg" width="320" /></a></i></b></div><b><i>Que penser de ChatGPT, roi de l’intelligence
artificielle?</i></b><p></p>
<h4 style="name: TX;"><span style="font-size: medium;"><span style="color: black; font-family: Cambria, "serif";">Précision.</span><span style="color: black; font-family: Cambria, "serif"; font-weight: normal;"> Depuis Deep Blue, qui
bouleversa et choqua le monde des échecs (début des années 1990), et le fameux
film de Spielberg, <em><span style="font-family: "Cambria","serif"; mso-ascii-theme-font: major-latin; mso-hansi-theme-font: major-latin;">A.I. Intelligence
artificielle </span></em>(2001)<em><span style="font-family: "Cambria","serif"; mso-ascii-theme-font: major-latin; mso-hansi-theme-font: major-latin;">, </span></em>la
préfiguration d’un monde futur dominé par les superordinateurs restait sinon
abstraite, du moins plutôt confinée au cercle très fermé des spécialistes du
genre. De loin en loin, nous savions bien sûr que l’évolution s’avérait assez
exponentielle, au point de révolutionner bien des domaines: du monde de la
finance à la gestion des armées des grandes nations, algorithmes et autres
logiciels dominent et s’imposent en maîtres absolus. Avec la survenue de
l’année 2023, il semble qu’un bond en avant ait été observé et que, pour le
grand public, l’intelligence artificielle sorte de la brume, malgré son concept
encore flou pour le commun des mortels. Vient en effet de débouler dans nos
vies quotidiennes ChatGPT, un «robot en ligne» capable de produire sur commande,
et en quelques secondes, des textes d’une précision quelquefois étonnante. Ce
petit logiciel, téléchargeable à souhait, dépasse dans nos fantasmagories le
HAL 9000 de <em><span style="font-family: "Cambria","serif"; mso-ascii-theme-font: major-latin; mso-hansi-theme-font: major-latin;">2001: l’Odyssée de l’espace </span></em>(Kubrick,
1968) et permet à n’importe qui de rédiger à la vitesse d’un clavier au galop
un poème, un devoir scolaire, une recette de cuisine, un rapport, une histoire
pour endormir vos enfants, des lignes de code, de la musique, bref, tout ce
dont vous avez besoin. Et même: un article!<o:p></o:p></span></span></h4><div><span style="color: black; font-family: "Cambria","serif"; font-size: 16.0pt; font-weight: normal; mso-ascii-theme-font: major-latin; mso-bidi-font-weight: bold; mso-hansi-theme-font: major-latin;"><br /></span></div>
<h4 style="name: TX;"><span style="font-size: medium;"><span style="color: black; font-family: Cambria, "serif";">Démiurge.</span><span style="color: black; font-family: Cambria, "serif"; font-weight: normal;"> L’aveu mérite qu’on s’y
attarde : le bloc-noteur a renoncé à essayer ce qui se présente déjà comme une <em><span style="font-family: "Cambria","serif"; mso-ascii-theme-font: major-latin; mso-hansi-theme-font: major-latin;">«rupture technologique majeure»,</span></em>
voire un <em><span style="font-family: "Cambria","serif"; mso-ascii-theme-font: major-latin; mso-hansi-theme-font: major-latin;">«bouleversement
civilisationnel». </span></em>Vertigineux progrès? Inquiétant? Menaçant? Un
peu tout à la fois, évidemment. Avec ChatGPT, ne le cachons pas, l’IA donne à
voir sa capacité à devenir un auxiliaire de notre intelligence, au même titre
que la machine, jadis, a permis aux humains de décupler leurs forces physiques
et d’augmenter la productivité. Une (r)évolution stupéfiante, à n’en pas
douter, aussi prometteuse que dangereuse. Pour le meilleur… et pour le pire.
Rendons-nous compte: lycéens et étudiants peuvent désormais lui confier leurs
devoirs, le malade influençable un protocole thérapeutique, le cyberpirate
l’écriture d’un code malveillant, le journaliste la trame d’un récit, etc.
De quoi influencer nos comportements et notre capacité à réfléchir à partir de
notre libre arbitre et ainsi favoriser, de manière plus ou moins consciente,
une sorte de paresse intellectuelle? En somme: jusqu’où laisserons-nous
les «machines» décider à notre place et octroyer aux développeurs du
capitalisme une puissance potentiellement démiurge sur toutes les sociétés de
l’humanité?<o:p></o:p></span></span></h4><div><span style="color: black; font-family: "Cambria","serif"; font-size: 16.0pt; font-weight: normal; mso-ascii-theme-font: major-latin; mso-bidi-font-weight: bold; mso-hansi-theme-font: major-latin;"><br /></span></div>
<h4 style="name: TX;"><span style="font-size: medium;"><span style="color: black; font-family: Cambria, "serif";">Usage.</span><span style="color: black; font-family: Cambria, "serif"; font-weight: normal;"> Créé aux États-Unis par la
start-up californienne OpenAI, ChatGPT n’en est, paraît-il, qu’à ses
balbutiements et ses algorithmes de traitement automatique ultra-performants
qu’aux prémices de leurs possibilités – dont on nous dit qu’elles
deviendront <em><span style="font-family: "Cambria","serif"; mso-ascii-theme-font: major-latin; mso-hansi-theme-font: major-latin;">«infinies»</span></em>. Mais
gardons notre calme et notre sérénité. Considérons même que l’IA, à l’étape
actuelle, demeure sous perfusion de données fixes et périssables, donc
perfectible et sujette à de nombreuses erreurs ou approximations. Une espèce
d’illusion d’intelligence, vraiment artificielle? ChatGPT, alimenté par des
masses de données issues de l’Internet, vient néanmoins de passer un test
grandeur nature pour le moins stupéfiant. À l’initiative d’universitaires, il a
réussi les examens d’une faculté de droit américaine après avoir rédigé des
dissertations sur des sujets allant du droit constitutionnel à la fiscalité en
passant par les délits civils. De quoi effrayer la communauté scolaire.
Certains résultats ont été si convaincants que des enseignants de plusieurs
universités évoquent le risque de tricherie généralisée et de <em><span style="font-family: "Cambria","serif"; mso-ascii-theme-font: major-latin; mso-hansi-theme-font: major-latin;">«la fin des méthodes traditionnelles
d’enseignement en classe»</span></em>. La ville de New York a banni ChatGPT
des écoles. Et l’Europe met en chantier un AI Act, dans l’intention de réguler
son usage. Le mot «usage» étant le bon. L’arrivée de ce prototype d’agent
conversationnel est l’occasion pour nous de réviser notre rapport au
numérique. Avant qu’il ne soit trop tard?</span></span></h4><div style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394;"><span style="font-family: Cambria, "serif";"><span style="font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l'Humanité </i>du 27 janvier 2023.]</span></span><span style="font-family: Cambria, "serif"; font-size: 16pt; font-weight: normal;"> </span></span></div>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-84118363872588131782023-01-25T10:00:00.001+01:002023-01-25T10:00:26.766+01:00Macron et les éditocrates<p><span style="font-size: medium;"><b><i></i></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhtdglJP7cvkNi9eHHitI9NMOJ1q3Hv5iWtJ8dIzWQC3N8iwQV12GP-wMwiqvxIMr1gCOvj_GEyan1aw-q0c1SQljEc8w2qnMbf8IFAi-MnehVb6qaVxGc1QXehCvdlcYzsPyehwRRN5ACQCuuGoKi0ho7P6PEAJWZ4Zri-sf98xlx0H4guu6UxrdgxJw/s1200/big.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="481" data-original-width="1200" height="128" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhtdglJP7cvkNi9eHHitI9NMOJ1q3Hv5iWtJ8dIzWQC3N8iwQV12GP-wMwiqvxIMr1gCOvj_GEyan1aw-q0c1SQljEc8w2qnMbf8IFAi-MnehVb6qaVxGc1QXehCvdlcYzsPyehwRRN5ACQCuuGoKi0ho7P6PEAJWZ4Zri-sf98xlx0H4guu6UxrdgxJw/s320/big.jpg" width="320" /></a></i></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b><i>Le «service après-vente» de toute la Macronie ne passe pas.</i></b></span><p></p><h4><span style="font-weight: normal;"><span style="font-size: medium;">Vu d’en haut, ainsi en est-il de la vie «démocratique» de notre pays, souvent coincée entre les pouvoirs d’influence et un entre-soi si écœurant qu’il renforce le sentiment de défiance général envers les supposées «élites». Bienvenue au Palais, version Jupiter! Ou comment instrumentaliser une partie des médias – pas n’importe lesquels – pour influencer l’opinion. La scène se déroule à l’Élysée, juste avant le 19 janvier, date de la première journée de mobilisation contre la réforme des retraites. À sa demande, Emmanuel Macron recevait discrètement dix éditocrates triés sur le volet afin de leur livrer, de vive voix, quelques bons «éléments de langage». Le but du prince-président? «Vendre» un projet rejeté massivement par le peuple et, surtout, aider ces grands apôtres de la presse libre à psalmodier l’Évangile selon 64 ans. Répétez après nous le prêche adapté à la circonstance: <em>«Travailleurs qui travaillez déjà, travaillez toujours plus et plus longtemps, le monde de la finance vous le réclame!»</em> Pitoyable procédé…</span></span></h4><div><span style="font-weight: normal;"><span style="font-size: medium;"><br /></span></span></div><h4><span style="font-weight: normal;"><span style="font-size: medium;">La révélation de ce repas ultrasecret tombe mal. <em>La Croix</em> vient en effet de publier son 36e baromètre de confiance dans les médias, duquel il ressort que la vaste agora de l’information reste un espace fragile: 22% des Français disent ne pas avoir confiance dans ce que disent les médias, quand 55% affirment entendre toujours parler des mêmes sujets. Les «élus» conviés sous les lambris de l’Élysée se sentent-ils pour autant visés?</span></span></h4><h4><span style="font-weight: normal;"><span style="font-size: medium;"><br /></span></span></h4><h4><span style="font-weight: normal;"><span style="font-size: medium;">Depuis des jours, l’exécutif tente de déminer les sujets qui fâchent avant la prochaine journée de grèves et de manifestations, le 31 janvier, et l’examen du texte à l’Assemblée nationale à partir du 6 février. <em>«Justice, équilibre et progrès»</em>: la rhétorique en forme de triptyque risible de la première ministre s’est étiolée depuis que le projet de loi et son étude d’impact ont été présentés en Conseil des ministres. Le «service après-vente» de toute la Macronie ne passe pas et une très large majorité de Français a intégré les vrais mots-clefs de cette maudite «réforme»: injustice, déséquilibre et régression. N’en déplaise à Macron, les éditocrates du Palais ne changeront rien à cette réalité.</span></span></h4><div style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>EDITORIAL </b>publié dans <i>l'Humanité </i>du 25 janvier 2023.]</span></div>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-9883648816561455322023-01-20T09:46:00.001+01:002023-01-20T09:46:08.938+01:00Questionnement(s)<p><b><span style="font-size: medium;"></span></b></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><b><span style="font-size: medium;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiMl5kfbDGbMvH3Q4FJM8w0qGcHNlG2VA9p9nCtfPGhrIE51hj0ohQnIMEv-D-LT8HLV3OX8XcX4N0HZBpv47MaTs8p4zJJjlCp9iukM84dE4rk_Trx3lZFJKFu1pGU6HX8wKBh-d8Pi-MckF8ogL3n-sKiwJSzsGDyxenZVAkrhAoSY0gBowWbzIT5hQ/s1024/france_2.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="575" data-original-width="1024" height="180" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiMl5kfbDGbMvH3Q4FJM8w0qGcHNlG2VA9p9nCtfPGhrIE51hj0ohQnIMEv-D-LT8HLV3OX8XcX4N0HZBpv47MaTs8p4zJJjlCp9iukM84dE4rk_Trx3lZFJKFu1pGU6HX8wKBh-d8Pi-MckF8ogL3n-sKiwJSzsGDyxenZVAkrhAoSY0gBowWbzIT5hQ/s320/france_2.jpg" width="320" /></a></span></b></div><b><span style="font-size: medium;">Déconstruire les idées reçues des réactionnaires sur la "déconstruction"...</span></b><p></p><p><span style="font-size: medium;"><b>Offensive. </b>«Déconstruction»: et le bloc-noteur y revient, inlassablement, puisqu’il y en va de la vie des Idées et, d’une certaine manière, de notre propension à entrevoir la pensée philosophique active et l’engagement intellectuel «dans» et «par» la société. Nous n’avons pas oublié la polémique de l’hiver dernier. À l’époque, un colloque organisé à la Sorbonne appelait à <em>«</em><em>déconstruire la déconstruction</em><em>».</em> Ces rencontres pour le moins «téléguidées», placées sous l’égide de l’ancien ministre de l’Éducation nationale, l’ineffable Jean-Michel Blanquer, avaient suscité de vives réactions, singulièrement dans le milieu universitaire, certains chercheurs de renom y voyant une nouvelle offensive politique contre les travaux en sciences sociales s’intéressant à la décolonisation, au féminisme et à la lutte contre les discriminations en tout genre. Bref, tout ce qui s’apparente de près ou de loin au mot valise «wokisme», nommé aussi maladroitement «déconstruction», voire «déconstructionnisme». Nous voilà un an plus tard et un autre colloque, qui tombe à raison, se tient jusqu’à ce samedi conjointement à l’École normale supérieure et à la Sorbonne. Intitulées sobrement «Qui a peur de la déconstruction?», ces séances de réunion publique et de conférence n’ont qu’un but, figurant dans l’annonce introductive: <em>«</em><em>Nous ne pouvons pas laisser dire que la déconstruction est destructrice, alors qu’il s’agit d’une démarche affirmative et inventive, qui s’efforce de redonner du jeu et de la vie à la pensée.</em><em>»</em></span></p><h4><span style="font-size: medium;">Derrida.<span style="font-weight: normal;"> Croyons-le ou non, plus de vingt ans après sa disparition, Jacques Derrida n’est pas mort. Et tous les autres non plus, les Michel Foucault ou Gilles Deleuze, dont les personnes et les œuvres majeures en tant qu’héritage intellectuel prépondérant ont été attaquées, détournées de leur sens. L’événement en question ne se veut pas une </span><em style="font-weight: normal;">«</em><span style="font-weight: normal;"> </span><em style="font-weight: normal;">réplique</em><span style="font-weight: normal;"> </span><em style="font-weight: normal;">»</em><span style="font-weight: normal;"> au mouvement réactionnaire et à ses instrumentalisations politiques en cours depuis plusieurs années, mais plutôt une </span><em style="font-weight: normal;">«</em><em style="font-weight: normal;">“tentative” de traiter sérieusement ce qu’on entend sous le mot de “déconstruction” au-delà des polémiques qui condamnent tout un pan des recherches sur le genre ou les études dites “postcoloniales”</em><em style="font-weight: normal;">», </em><span style="font-weight: normal;">expliquait cette semaine, dans </span><em style="font-weight: normal;">Libération,</em><span style="font-weight: normal;"> Anne-Emmanuelle Berger, professeure émérite de littérature française et d’études de genre à l’université Paris-VIII, l’une de ses organisatrices. De quoi remettre quelques pendules à l’heure – souhaitons-le – et réaffirmer les principes inaliénables de la liberté académique, sachant que, dans notre beau pays, la France, nous ne trouvons quasiment aucun cours philosophique concernant les travaux de Derrida, Deleuze ou Foucault. Comme si l’ère du temps, et ses conséquences idéologiques mortifères, agissait sur le «savoir», à la manière du verbe fourre-tout qui revient en boucle dans le langage politique, surtout du côté de la droite identitaire et des pétainistes de toutes tendances: «déconstruire». Sorte de chiffon rouge. Derrida en symbole, accusé avec tant d’autres (n’oublions pas Bourdieu) d’avoir participé à la radicalisation de la pensée philosophique – donc politique – en remettant en question la phénoménologie et la métaphysique traditionnelles comme nouvelle manière de penser les sciences humaines et sociales.</span></span></h4><div><span style="font-size: medium;"><span style="font-weight: normal;"><br /></span></span></div><h4><span style="font-size: medium;">Démarche.<span style="font-weight: normal;"> La mécanique reste identique. Par un contresens volontaire, nous entendons: «Ils déconstruisent la France», «ils déconstruisent notre Histoire», sous-entendu «la France ne sera bientôt plus la France». La célèbre «déconstruction», dont le nom même comme concept vulgarisé dans le monde entier a fini par noyer l’exigence du prima de sa définition. Derrida le démontrait par ces mots: </span><em style="font-weight: normal;">«</em><em style="font-weight: normal;">Il s’agit par là d’analyser quelque chose qui est construit. Donc, pas naturel. Une culture, une institution, un texte littéraire, un système d’interprétation des valeurs. En somme, un “constructum”. Déconstruire n’est pas détruire. Ce n’est pas une démarche négative, mais une analyse généalogique d’une structure construite que l’on veut désédimenter.</em><em style="font-weight: normal;">»</em><span style="font-weight: normal;"> Bref, un mode de questionnement des contradictions et des impensés de la métaphysique occidentale, afin de déjouer les constructions sociales. Une forme «politique» de penser, en quelque sorte. Tout le contraire de ce qui est prétendument attaqué…</span></span></h4><div style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l'Humanité </i>du 20 janvier 2023.]</span></div>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3502505165544407263.post-42678092534112739802023-01-16T10:45:00.002+01:002023-01-16T10:45:18.157+01:00Privilège(s)<p><span style="font-size: medium;"><b></b></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span style="font-size: medium;"><b><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEil9nkxD7SDTa0BMcvSKaC_mEhAsapeAm_7Ah0qYp2hsRjTPMTXb2VwTcmOjwaLjH0T7EqQGsXW-05-y22kcd3lTDpAOqs-PAvGdsMhlAFDag6LWIcXjfuPqQyqRt7nsuS7NiJYmo2D0UF_w4q5oKrwKMk3qge4YQyuEfg49EpKP2nF8XfpKXIn-52DZA/s1200/phpw5a78N_1.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="1200" data-original-width="1200" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEil9nkxD7SDTa0BMcvSKaC_mEhAsapeAm_7Ah0qYp2hsRjTPMTXb2VwTcmOjwaLjH0T7EqQGsXW-05-y22kcd3lTDpAOqs-PAvGdsMhlAFDag6LWIcXjfuPqQyqRt7nsuS7NiJYmo2D0UF_w4q5oKrwKMk3qge4YQyuEfg49EpKP2nF8XfpKXIn-52DZA/s320/phpw5a78N_1.jpg" width="320" /></a></b></span></div><span style="font-size: medium;"><b>Les retraites… et un cours d’économie engagé.</b></span><p></p><h4><span style="font-size: medium;">Florès. <span style="font-weight: normal;"><i>«En 2023, Emmanuel Macron va-t-il de nouveau se tromper d’époque en s’illustrant comme président des riches?»</i> Ainsi débute la dernière chronique de l’économiste Thomas Piketty, dans le Monde de la semaine dernière. Et il ajoute: <i>«C’est malheureusement ce qui se profile avec la réforme des retraites. Lors de son premier mandat, il avait déjà choisi de tout miser sur les “premiers de cordée” et la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune. Avec à l’arrivée un puissant sentiment d’injustice qui avait conduit au mouvement des gilets jaunes.» </i>Quelques jours plus tard, dans le même journal, une autre chroniqueuse affirme que l’une des formules chocs de Piketty avait <i>«de grandes chances de faire florès»,</i> surtout dans le contexte explosif de la contre-réforme des retraites, tandis que la gauche se trouve <i>«sur le pied de guerre» </i>et assumerait sa <i>«nostalgie de Mitterrand»</i> (sic) en prônant, assez unanimement, le retour du droit au départ à 60 ans. Nostalgie mitterrandienne? On croit rêver, mais passons. Revenons plutôt à la phrase de Piketty: <i>«Le gouvernement peut chercher à maquiller les choses: la réalité est qu’il a inventé l’impôt régressif pesant exclusivement sur les moins diplômés.» </i>Directement visé, Mac Macron II. Entre-temps, la première sinistre a présenté le projet. Et nous savons désormais ce qu’il en coûtera sur nos vies dans le seul but d’économiser 20 malheureux milliards par an d’ici à 2030…</span></span></h4><div><span style="font-size: medium;"><span style="font-weight: normal;"><br /></span></span></div><h4><span style="font-size: medium;">Impact.<span style="font-weight: normal;"> Thomas Piketty, avant même les annonces, et avec une malice que le bloc-noteur ne saurait lui reprocher, pointait déjà un phénomène peu connu. L’économiste atteste en effet que les 20 milliards en question pèseront <i>«entièrement sur les plus modestes».</i> Petit rappel un peu technique: actuellement, pour toucher une retraite à plein taux, il y a deux conditions. Avoir l’âge légal de 62 ans et la durée requise de cotisations, soit 42 annuités pour ceux nés en 1961-1962 (elle passera graduellement à 43 d’ici à la génération 1973). Piketty explique: <i>«Prenons une personne née en 1961 et qui aura donc 62 ans en 2023. Si elle a fait des études de niveau master et a commencé à travailler à 23 ans, il lui faut d’ores et déjà attendre 65 ans pour atteindre les 42 annuités.»</i> Avant d’ajouter: <i>«Autrement dit, la réforme consistant à repousser l’âge légal à 64 ou 65 ans n’aura par définition aucun impact sur ces personnes. Sur les 20 milliards, les plus diplômés contribueront exactement zéro centime. Par construction, ces milliards seront prélevés intégralement sur le reste de la population, notamment sur les ouvriers et employés.» </i>Voilà exactement où nous en sommes avec le projet gouvernemental.</span></span></h4><div><span style="font-size: medium;"><span style="font-weight: normal;"><br /></span></span></div><h4><span style="font-size: medium;">Riches.<span style="font-weight: normal;"> Sans perdre de vue son sujet, Thomas Piketty enfonce le clou en parlant du besoin de justice et de transparence. <i>«Il suffit d’ouvrir un magazine pour savoir que les millionnaires et les cadres dirigeants se portent à merveille, </i>écrit-il. <i>En France, les 500 plus grandes fortunes sont passées en dix ans de 200 milliards à 1 000 milliards. Il suffirait d’imposer à 50% cet enrichissement exceptionnel pour rapporter 400 milliards.» </i>Évoquant par ailleurs <i>«l’ampleur de la réserve fiscale disponible», </i>l’économiste n’oublie pas qu’elle serait <i>«encore plus importante si l’on élargissait la focale aux 500 000 contribuables les plus riches (1 % de la population) ou aux 10 % ou 20 % les plus riches». </i>Ce n’est pas tout. Sans doute passera-t-il pour un maudit révolutionnaire exalté, quand il lâche également: <i>«Chacun connaît aujourd’hui ces réalités et ces injustices, au moins aussi bien qu’à l’époque de la Révolution et des privilèges de la noblesse. Prétendre qu’il n’y a rien de substantiel à attendre de ce côté-là n’a aucun sens.» </i>Pour lui, en résumé, les moyens existent pour éviter cette contre-réforme des retraites. Il l’affirme tout simplement: <i>«Espérons que les députés et le mouvement social sauront en convaincre le pouvoir en place.» </i></span></span></h4><div style="text-align: right;"><span style="color: #0b5394; font-size: x-small;">[<b>BLOC-NOTES</b> publié dans <i>l'Humanité </i>du 13 janvier 2023.]</span></div>Jean-Emmanuel Ducoinhttp://www.blogger.com/profile/08529985493268478980noreply@blogger.com0