Ne touchons pas aux paroles de la Marseillaise. Ce serait rogner un bout de notre histoire républicaine et gommer l'héritage de la Révolution…
Esprit. «La pire faute en politique consiste à laisser en état ce qui doit disparaître alors même qu’on s’attache à détruire ce dont la permanence est la raison d’être et la marque d’une civilisation», disait Paul Valéry. Méditons un instant, sans se trahir soi-même. De la casse de la fonction publique au rugby, de notre bon vieux bac à nos hôpitaux en passant par la SNCF, etc., il semble bien que notre esprit français ait du plomb dans l’aile ces temps-ci, soumis aux coups de boutoir de l’ordo-libéralisme. Ne pas s’y résoudre. Loin de nous l’idée qu’il n’y a de dignité que dans l’abstention, oubliant les combats à mener : luttes sociales, travail d’Histoire et de mémoire, transmission… Plus noble que l’échec moralement sécurisant du repli, qui élude tout mécompte, nous semble le parti pris de l’incertain, ou de l’échec le cas échéant, mais après avoir essayé.
Chant. Essayons, par exemple, de défendre notre Marseillaise (une fois encore). Avez-vous remarqué? À chaque grand événement sportif d’ampleur remonte çà et là l’éternelle «polémique» sur notre hymne national, jugé trop «guerrier», sinon carrément barbare. Contrairement aux idées reçues, le célèbre chant, issu de la Révolution française et sujet à controverses permanentes, a accompagné des causes contradictoires et aura été plus patriotique que national. Pourtant, nous nous battons encore pour ou contre la Marseillaise, on la siffle d’un côté, on la revendique de l’autre… Profitons de l’occasion pour rappeler à ceux qui l’ignorent parfois, comme à ceux qui voudraient l’oublier ou la travestir, qu’elle est à la fois un chant patriotique (pas national) entonné par tous les peuples et révolutionnaires – hymne à la liberté conquise, en lutte contre les despotes. De sa création en 1792 pour galvaniser l’armée du Rhin puis les soldats de Valmy à l’an II, jusqu’à nos jours, la Marseillaise scande durant deux siècles les avancées et les reculs de la liberté: Bonaparte l’oublie à Marengo, mais la redécouvre à Waterloo ; la monarchie de 1815 la proscrit ; Louis-Philippe puis Napoléon le Petit l’interdisent à nouveau.
Mais elle renaît toujours lors des révolutions, celle de 1830, celle de 1848, héroïsant même les communards de 1871, avant que la IIIe République, en 1877, ne l’intronise comme l’une des références républicaines, avec le drapeau, ce qui lui vaut d’être détournée de son sens à des fins belliqueuses, lors de défilés militaires ou de démonstrations officielles, ce qui ne cessera de se produire au XXe siècle ; tantôt exaltation révolutionnaire ou de la Résistance (1936, la Libération, 1968), tantôt cantique des droites réactionnaires. Arrêtons là l’énumération historique. Sauf sur un point essentiel, oublié par beaucoup: les délégués du congrès de la IIe Internationale associèrent à la fois la Marseillaise et l’Internationale (écrite par Pottier). Jaurès lui-même ne voyait-il pas dans l’Internationale la «suite prolétarienne de la Marseillaise»?
Chant. Essayons, par exemple, de défendre notre Marseillaise (une fois encore). Avez-vous remarqué? À chaque grand événement sportif d’ampleur remonte çà et là l’éternelle «polémique» sur notre hymne national, jugé trop «guerrier», sinon carrément barbare. Contrairement aux idées reçues, le célèbre chant, issu de la Révolution française et sujet à controverses permanentes, a accompagné des causes contradictoires et aura été plus patriotique que national. Pourtant, nous nous battons encore pour ou contre la Marseillaise, on la siffle d’un côté, on la revendique de l’autre… Profitons de l’occasion pour rappeler à ceux qui l’ignorent parfois, comme à ceux qui voudraient l’oublier ou la travestir, qu’elle est à la fois un chant patriotique (pas national) entonné par tous les peuples et révolutionnaires – hymne à la liberté conquise, en lutte contre les despotes. De sa création en 1792 pour galvaniser l’armée du Rhin puis les soldats de Valmy à l’an II, jusqu’à nos jours, la Marseillaise scande durant deux siècles les avancées et les reculs de la liberté: Bonaparte l’oublie à Marengo, mais la redécouvre à Waterloo ; la monarchie de 1815 la proscrit ; Louis-Philippe puis Napoléon le Petit l’interdisent à nouveau.
Mais elle renaît toujours lors des révolutions, celle de 1830, celle de 1848, héroïsant même les communards de 1871, avant que la IIIe République, en 1877, ne l’intronise comme l’une des références républicaines, avec le drapeau, ce qui lui vaut d’être détournée de son sens à des fins belliqueuses, lors de défilés militaires ou de démonstrations officielles, ce qui ne cessera de se produire au XXe siècle ; tantôt exaltation révolutionnaire ou de la Résistance (1936, la Libération, 1968), tantôt cantique des droites réactionnaires. Arrêtons là l’énumération historique. Sauf sur un point essentiel, oublié par beaucoup: les délégués du congrès de la IIe Internationale associèrent à la fois la Marseillaise et l’Internationale (écrite par Pottier). Jaurès lui-même ne voyait-il pas dans l’Internationale la «suite prolétarienne de la Marseillaise»?
Sillons. Reste un point à éclaircir, non des moindres. Combien de fois avez-vous entendu pis que pendre de ces paroles: «Qu’un sang impur abreuve nos sillons.» L’interprétation la plus répandue provient, et pour cause, du camp conservateur: il s’agirait, bien sûr, du sang des ennemis supposément «impur» puisque ennemis. Sachant qu’en tout révolutionnaire sommeille forcément un assassin, la Marseillaise elle-même serait indigne puisque héritière des sans-culottes… Théorie aberrante! Il ne s’agit pas là du sang des ennemis mais bien du sang des républicains, celui de ceux qui allaient mourir pour la nation et, de fait, nourrir la terre (« abreuve ») afin de permettre l’éclosion définitive de la République. Répétez-le autour de vous : ce « sang impur » est celui du peuple non noble, en opposition au «sang bleu» de la monarchie. Résumons: la République ou la mort! Changer un bout de la Marseillaise serait ainsi une atteinte à l’esprit de la République. Donc à l’esprit français…
[BLOC-NOTES publié dans l’Humanité du 16 février 2018.]
1 commentaire:
Je suis heureux que tu cites Paul Valery dont ....Louis KALDOR fut l'un des imprimeurs .
Tu liras aussi les phrases de Paul Valéry qui sont en exergue sur les deux frontons du Palais de Chaillot, installées lors du face à face de l'Ouvrier et la Kolkhozienne face à l'aigle fasciste du III ème Reich.
Cette Marseillaise fait partie de notre patrimoine national.
Et l'article 410-1 du code pénal définit les atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation:
Les intérêts fondamentaux de la nation s'entendent au sens du présent titre de son indépendance, de l'intégrité de son territoire,de sa sécurité, de la forme républicaine de ses institutions,des moyens de sa défense et de sa diplomatie, de la sauvegarde de sa population en France et à l'étranger, de l'équilibre de son milieu naturel et de son environnement et des éléments essentiels de son potentiel scientifique et économique ET DE SON PATRIMOINE CULTUREL.
Magnifique programme !!!!
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