Avec le projet de loi « asile et immigration », le gouvernement assumera de présenter un durcissement du droit des étrangers sans précédent, au service d’une machine à accélérer les expulsions.
Quand le projet de loi «asile et immigration» sera présenté, ce mercredi, vous entendrez partout ce que les grands communicants nomment «des éléments de langage». Il y aura deux mots, reliés par une simple conjonction, et ils seront martelés façon com afin de justifier la politique gouvernementale de dissuasion migratoire massive: «Fermeté et humanité.» Il suffit de parcourir les principaux axes du texte. «Fermeté et humanité», disent-ils? Nous n’y lisons que répression et dangerosité. Comment dès lors juxtaposer «fermeté» et «humanité», surtout sur ce sujet-là, sinon commettre l’un des pires mensonges en politique à seule fin de satisfaire une partie de l’opinion publique: l’oxymore odieux.
On a beau se convaincre que, non, ce n’est pas la France, celle des Lumières, celle d’Hugo et de Jaurès, celle de nos pères fondateurs du CNR et Mai 68, on a beau se dire que nous n’avons pas voté au second tour d’une élection présidentielle pour se retrouver avec un Sarkozy déguisé en faux centriste, pourtant, la réalité jaillit sous nos yeux. Ainsi le ministre de l’Intérieur assumera de présenter un durcissement du droit des étrangers sans précédent, au service d’une machine à accélérer les expulsions: les délais d’asile réduits à six mois et des recours complexifiés à l’extrême; la durée de rétention rallongée; le recensement des migrants, inscrit jusque dans la loi; l’immigration choisie, surtout pour les étudiants, etc. Tout cela, bien sûr, vise à poursuivre ce qui se passe déjà sur le terrain, la chasse aux immigrés et les pratiques administratives crispées et impitoyables, les traitements scandaleux infligés aux réfugiés à nos frontières, les conditions misérables de l’accueil… Nous avons honte de ce gouvernement!
Mais nous sommes fiers, tellement fiers, de tous ceux qui bravent les dispositifs antimigrants. De Nice à Briançon, de Calais à Bayonne, de Saint-Étienne à Nantes, le mouvement s’amplifie de ces anonymes dont la conscience se révolte. Eux «font société» en tendant la main. Ils tournent le dos à la barbarie montante des États sécuritaires. Ils sont l’honneur de la France. Et ils montrent chaque jour un peu plus que l’entrée en résistance demeure l’un des meilleurs apprentissages citoyens…
[EDITORIAL publié dans l’Humanité du 21 février 2018.]
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