Refuser de voir la réalité procède souvent du péché d’orgueil. Mais rejeter la réalité, au point de lui nier la vérité des faits, s’apparente à un mensonge impardonnable. Dans le genre, Nicolas Sarkozy joue dans la catégorie des champions tout-terrain, et s’il fallait un jour mesurer l’hypocrisie à l’aune du vice, son quinquennat servirait sûrement de maître étalon. Le dernier exemple en date aurait de quoi nous faire sourire, s’il ne s’agissait d’un sujet tragique pour l’avenir de milliers de salariés. L’autre soir, faisant dialoguer l’incompréhensible à la mystification verbale, le prince-président a osé déclarer: «Je peux vous annoncer qu’il n’y aura pas de plan social chez PSA.» La suppression de 6 800 emplois en Europe, dont 5 000 en France, serait donc un pur fantasme ? À cinq mois d’une présidentielle dont l’épicentre s’annonce économique et social, Sarkozy a reçu le patron de PSA, Philippe Varin. Une belle occasion pour l’Élysée d’alimenter ses plans de com. Même le Figaro y va de son couplet: «Le chef de l’État veut s’assurer que les constructeurs automobiles n’utiliseront pas l’emploi comme “variable d’ajustement”.» On croit rêver. Rappelons que le groupe Peugeot-Citroën vient d’annoncer un chiffre d’affaires en hausse de 3,5% au troisième trimestre par rapport à 2010, à 13,4 milliards d’euros…
Ces chiffres, qui pourraient résumer à eux seuls le paradoxe de l’industrie dans notre pays, ont de quoi nous révolter. D’autant qu’un monde sépare les discours officiels prônant un État «stratège» en la matière et ce qui se produit depuis des années. Ce secteur a encore perdu près de 600.000 emplois en moins de dix ans et, malgré l’excellence de certaines filières, ses salariés ne représentent plus que 13% de la population active et 16% seulement du PIB… Face à l’extension planétaire de l’économie marchande, ce qui provoque une nouvelle division internationale du travail, les racines du mal sont connues: politiques de financiarisation ; préférence accordée à la rémunération des actionnaires sur l’investissement et les salaires ; délocalisations décidées par les seuls actionnaires ; fin des politiques sectorielles ; exonération sur les bas salaires, au grand bénéfice des services… Néanmoins, comme si de rien n’était, le Medef vient de dévoiler ses propositions économiques : baisse massive du coût du travail, instauration d’une TVA sociale, limitation des indemnités chômage, suppression des 35 heures – tout cela au nom de la «comparaison» avec l’Allemagne, érigée en modèle… Par contre, pas une ligne sur les 172 milliards d’euros d’aides accordées par l’État aux entreprises en 2010, encore moins sur les contreparties envers l’emploi ou les engagements pour l’avenir. Le PDG de PSA, qui gagne 9.000 euros par jour et a perçu trois milliards d’aide en 2009, connaît pourtant bien le dossier: il vient de s’essuyer les pieds dessus. Il s’était engagé à ne pas licencier? Il licencie. Et l’essentiel de ces suppressions d’emplois concerne la recherche et le développement…
[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 21 novembre 2011.]
(A plus tard...)
1 commentaire:
Marche ou crève mais vote bien à la présidentielle ou ne crève pas....le peuple va trancher ou va crever, la France ouvrière est suppliciée par ce régime monarcho-pseudo-républicain....VITE....VITE...PAT
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