mercredi 1 novembre 2017

La Sécu en danger !

Ambroise Croizat.
Avec l’adoption en première lecture du budget de la Sécurité sociale, les Français savent-ils ce qui les attend et ce qui, à terme, pourrait jeter à bas la protection sociale à la française, dont les fondements universels plongent loin leurs origines dans l’histoire des luttes populaires nationales?

Une question mérite d’être posée assez brutalement: les Français ont-ils vraiment conscience de ce qui vient de se passer à l’Assemblée nationale? Avec l’adoption en première lecture du budget de la Sécurité sociale, savent-ils ce qui les attend et ce qui, à terme, pourrait jeter à bas la protection sociale à la française, dont les fondements universels plongent loin leurs origines dans l’histoire des luttes populaires nationales? Ont-ils la moindre idée de ce qu’ils risquent de perdre en se laissant déposséder de ce formidable projet de société, qui, selon l’ouvrier communiste devenu ministre Ambroise Croizat, devait «mettre fin à l’obsession de la misère» et voulait que «chacun cotise selon ses moyens et reçoive selon ses besoins»? Pour parvenir à anéantir ce conquis de civilisation jalousé dans le monde, Macron et son gouvernement viennent d’enfoncer l’un des fondements essentiels de notre solidarité: les cotisations sociales. Depuis soixante-dix ans, un continuum de plans de casse n’a cessé de mettre à mal cette pierre angulaire de notre pacte social, qui s’adosse à un principe général consistant à ce que les prestations de Sécurité sociale bénéficient à toutes et tous, sans distinction de revenus, puisque ses recettes sont précisément assises sur des cotisations calculées sur les revenus. 

Le rêve du patronat se transforme en arme gouvernementale! N’écoutez pas les discours dominants. Supprimer les cotisations sociales, ce serait exonérer le patronat de l’augmentation des salaires – dont la cotisation est partie intégrante – et ainsi tarir la source permettant d’assurer en commun la protection sociale, qui n’est ni un coût ni une dépense, mais une production de santé. D’autant que la destination de cette «économie» patronale ne servira qu’à nourrir les actionnaires. À cette atteinte aux salaires s’ajoute une double peine, terrible elle aussi : la hausse de la CSG, qui va alourdir la feuille d’impôt en fiscalisant la protection sociale. Par la fin du mécanisme de solidarité, la mort de la cotisation sociale signifierait celle de la Sécu, ni plus ni moins. Une coquille vide livrée aux requins des assurances privées. La fin de l’égalité et du droit de vivre dignement. 

[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 2 novembre 2017.]

Aucun commentaire: