Belle formule... malgré la faute d'orthographe. |
Foessel. Les fêtes s’avancent vers nous. Deux attitudes. La première consiste à leur tourner le dos, à les boycotter «idéologiquement», à tout envoyer balader, les cadeaux et les joyeusetés surjouées dans la mécanique des idioties primaires, surtout les traditions elles-mêmes coincées dans un consumérisme de masse qui dispute l’orgiaque au dépressif…
La seconde attitude consiste à traverser la période avec un air détaché, loin de la rumeur pourrie qui tourne en boucle sur BFMTV et transforme les apeurés en abrutis gavés de conneries. Glisser sur l’événement en somme. Y être sans y être. Y participer de loin sans y participer vraiment. Être là et ailleurs. Pour y parvenir sans fracas et avec intelligence, et surtout avec à l’esprit une forme d’apaisement dont nous avons tous besoin, le bloc-noteur conseille la lecture du dernier essai du philosophe Michaël Foessel, le Temps de la consolation (Seuil, 275 pages). Un livre qui changera votre manière d’entrevoir les douleurs de l’existence et les chocs dus à certaines circonstances, qui nécessitent une question brûlante : pourquoi est-il devenu si difficile de consoler, alors que la consolation reste un acte social et une manière d’être ensemble malgré la séparation? «Le désenchantement moderne suscite la recherche d’un savoir alternatif à ceux que produisent les sciences: une sagesse qui agisse comme un baume», écrit Michaël Foessel, qui a bien compris que le concept actif de «consolation» intéressait les penseurs. Il ajoute: «Si une philosophie de la consolation est nécessaire, c’est parce que l’on console moins la souffrance comme telle que la perte dont elle résulte. Cette perte prend des visages divers, un proche, un idéal politique, une réputation sociale, un amour… Dans tous les cas, il n’y a pas de consolation sans désolation. (…) Existe-t-il une “politique de consolation”, autrement dit une manière d’aborder collectivement les privations dont nous sommes victimes, qui permette de résister à la mélancolie?» Malgré l’abstraction des savoirs modernes, qui peuvent s’avérer désespérants, la vérité elle-même ne doit jamais devenir affligeante. Au contraire. En pensant «la consolation», nous faisons droit «au pouvoir subversif du chagrin, que ni les injonctions au deuil ni les impératifs de résilience ne parviennent à étouffer», écrit le philosophe. Alors? Aidons et convainquons l’Autre qu’il est possible de vivre au-delà d’un point où cela semble impossible.
[BLOC-NOTES publié dans l’Humanité du 18 décembre 2015.]
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