vendredi 1 juillet 2011

Tour de France 2011 : la prise d'otage !

La 98e édition s’élance ce samedi 2 juillet depuis la Vendée. Le triple vainqueur, l’Espagnol Alberto Contador, sera bien au départ... malgré une menace de sanction.

Depuis Les Herbiers (Vendée).
« Il n’y a pas que des gens honnêtes sur le Tour. » Plus les années filent entre nos plumes et moins Cyrille Guimard adoucit les angles pour parler de la grande légende itinérante, chaque année recommencée. Comme beaucoup d’entre nous, l’ancien coureur et directeur sportif, mémoire vivante d’un demi-siècle de cyclisme encore vivant, cherche parfois ses mots pour dire son amour de juillet. Et s’il garde au cœur une passion privilégiée pour cette Grande Boucle aussi mythique qu’indéchiffrable dans l’âme des fidèles suiveurs, Guimard exprime cette année une froide colère que nous partageons. En cause, « l’affaire Contador ». Qui plombe littéralement le « Grand Départ » de cette 98e édition. Comme si le vélo, après une décennie en enfer, pouvait s’offrir encore le luxe de poser ses boyaux sur des tertres toujours souillés…

Déclaré positif au clenbuterol (un anabolisant) à l’issue du Tour 2010, rien, en effet, n’empêche Alberto Contador de participer à l’épreuve cette année. Après des mois de controverses et de polémiques sur la réalité ou non d’une absorption de viande de bœuf soi-disant contaminée (1), le coureur a été disculpé par la Fédération espagnole de cyclisme, décision contre laquelle l’Union cycliste internationale (UCI) et l’Agence mondiale antidopage (AMA) ont fait appel devant le tribunal arbitral du sport (TAS). Seulement voilà, contre toute attente, ledit TAS a finalement fixé au début août son audience sur ce dossier, alors que, dans un premier temps, il devait rendre sa décision avant la Grande Boucle. Vous avez compris la suite des événements. Ou Contador est définitivement blanchi en août, ou l’appel de l’UCI et de l’AMA est déclaré recevable, et l’Espagnol a du souci à se faire… En attendant? Une épée de Damoclès va planer sur les performances du tenant du titre jusqu’à l’arrivée à Paris… et jusqu’en août. Autant le dire, le Tour 2011 est pris en otage. « Cela veut dire aussi que l’affaire est complexe », commente sobrement le directeur de l’épreuve, Christian Prudhomme, qui, heureusement finit par concéder que « le Tour aurait mérité davantage d’égards, davantage de respect »…

Bien qu’aucun ne puisse sérieusement croire à cette fable de la contamination par la viande, tous les spécialistes claironnent sur tous les tons qu’Alberto Contador (Saxo Bank) est, malgré tout, un crack comme on en fait peu (ou plus du tout) et qu’il pourrait bien « s’amuser », cette année, sur un profil tout-terrain et très montagneux. Trois Grandes Boucles à son actif, deux Giro et une Vuelta : à 28 ans, l’Espagnol présente devant nos yeux embués un palmarès exceptionnel, au moins à la hauteur du talent qu’il exprimait quand il n’était qu’un junior, ce qui, en général, ne trompe pas. Lors du dernier Tour d’Italie, El Pistolero a affiché une telle insolente facilité en montagne, réduisant la concurrence à quelques accessits, qu’il peut se vanter de rester sur une série stupéfiante dans le cyclisme moderne : invaincu lors de ses six dernières participations sur un Grand Tour…

Alors ? Devrons-nous attendre le jugement des instances pour voir vaciller le grand favori, ou un coureur peut-il prétendre le faire plier, avant, à la force des mollets ? Beaucoup comptent sur l’éternel dauphin désigné, le Luxembourgeois Andy Schleck (Leopard-Trek), qui ne trouvera son éventuel salut qu’en haute montagne mais à condition de harceler l’Espagnol loin des arrivées au sommet... Certains misent sur les vieux Cadel Evans (BMC) et Ivan Basso (Liguigas). D’autres enfin osent penser à Robert Gesink (Rabobank), à Damiano Cunego (Lampre), à Luis Leon Sanchez (Movistar), voire à Bradley Wiggins (Garmin) ou Philippe Gilbert (Omega Pharma-Lotto), sachant que les Français, comme toujours, se positionneront en simples baroudeurs…

Et au rayon bonnes nouvelles ? Écartée en 2010, l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) revient sur le Tour. « Un accord en bonne et due forme a été signé le 20 juin » avec l’UCI. De quoi en inquiéter plus d’un ? Espérons-le. Et puisque le chronicoeur du Tour, pour sa vingt-deuxième édition, ne déteste pas la douleur d’une découverte inattendue, un petit fait d’actualité est venu le quérir dans sa torpeur, ce mercredi. Un ancien coureur retiré du peloton depuis 2008, Wim Vansevenant, désormais membre de l’encadrement d’Omega Pharma-Lotto, est soupçonné d’avoir importé des produits dopants depuis l’Australie. Un colis intercepté à l’aéroport de Bruxelles contenait, selon les enquêteurs, « des produits dopants ultra-sophistiqués ». Une enquête a été ouverte en Belgique. « C’était des acides aminés pour ma propre utilisation, pas pour les coureurs », a expliqué Vansevenant. Une affaire Festina couve-t-elle dans les coulisses de la formation Omega Pharma-Lotto, dont le leader n’est autre que Philippe Gilbert, l’un des prétendants au podium ?
La tête encore dans ses valises, voilà le suiveur déjà tout chiffonné. Quoi qu’il écrive, il va se retrouver dans une seringue pendant trois semaines. Une question d’habitude.

(1) L’Espagnol a déclaré ne « plus avoir mangé de viande » depuis son contrôle positif…

[ARTICLE plublié dans l'Humanité du 1er juillet 2011/]

(A plus tard...)

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Contador ne devrait pas être là : le Tour et le cyclisme n'ont pas besoin de ça, en plus du reste... Toute cette génération doit partir !!!

Anonyme a dit…

«On fait notre travail. On fait des vérifications». Avec la fouille car de Quick Step, encore une fois on traine le cyclisme dans la boue. Messieurs les Gendarmes, allez faire un tour dans les vestiaires foot de Ligue 1 et là vous serez crédibles dans votre travail et vos vérifications !
-Bon, merci quand même à JED pour ce qu'il écrit sur le cyclisme : il est intransigeant, mais il aime le vélo, ce qui devient rare.

Anonyme a dit…

Le Tour de France fait partie de ces manifestations complètement perverties, dénaturées, décrédibilisées par le business, l'argent roi, le dopage, la religion industrielle de la communication.
Mais le pire peut-être est qu'en dépit de ces maux qui affectent en profondeur les sports, le Tour continue d'être au fil des années et en attendant la reprise du Foot un puissant narcotique: des millions de gens se massent pendant des heures le long des routes ou devant leur télé pour regarder ce spectacle dont le seul intérêt est qu'il n'en présente que très peu pour eux et beaucoup pour les profiteurs et les marchands.

Anonyme a dit…

Tout a fait d'accord.
Le tour ce n'est pas 10 ans de shoot c'est depuis toujours.
La seule chose intéressante ce sont les images de paysage toujours très belles. Le reste c'est une compétition des labos pharmaceutiques via guignols interposés... et comme je ne suis ni pour la compétition ni pour les labos... alors...