Certains diront, leur conscience en berne, que la diplomatie française en a vu d’autres. Et pourtant… Le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, a donc posé ses pieds à Paris, hier, reçu en grande pompe par le président de notre République, qui, si elle s’est souvent salie, aurait pu s’éviter de s’aliéner avec l’Histoire en profanant sa propre devise universelle: liberté, égalité, fraternité. Les mots ont un sens. Les actes aussi. Celui de dérouler le tapis rouge, ici et maintenant, à un homme passible de l’accusation de crimes de guerre devant la Cour pénale internationale nous laisse un profond sentiment de déshonneur.
Depuis mars dernier, l’armée israélienne obéit aux ordres, elle tue aveuglément et mutile les Palestiniens de Gaza, qui manifestent pacifiquement pour le respect de leurs droits fondamentaux. Les chiffres macabres donnent le vertige: 120 morts, plus de 13000 blessés, dont certains porteront des séquelles si lourdes que leurs vies sont brisées à jamais. Même le secrétaire général de l’ONU a réclamé une «enquête indépendante» sur l’usage des balles réelles. Est-il nécessaire de rappeler que le pouvoir israélien viole tous les chapitres du droit international depuis si longtemps que des générations entières de Palestiniens n’ont jamais connu autre chose que la ségrégation, l’exclusion par la force et la misère? Oui, nous pouvons et devons critiquer la politique colonialiste du gouvernement israélien, sans être taxés de l’infamant procès d’«antisémitisme». Eh oui, nous déclarons que Netanyahou est un assassin. Il en va des droits humains élémentaires, niés aux Palestiniens.
Voilà pourquoi le premier ministre israélien n’est pas le bienvenu en France. Et le tapis rouge – de sang! – déroulé par Macron restera une tache du quinquennat, qui marquera durablement ceux qui portent l’idéal français, ici et au-delà des frontières. Nous assumons d’écrire et de crier, comme nos aïeux dans d’autres grands moments de l’Histoire: Netanyahou, go home!
[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 6 juin 2018.]
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