mercredi 24 février 2016

Gauche: et maintenant ?

Le réquisitoire contre le gouvernement de signataires d’un texte, dont Martine Aubry, peut-il modifier le rapport de forces?

Quoique très tardif, l’impitoyable réquisitoire contre les politiques du gouvernement lu dans une tribune publiée par le Monde et signée de plusieurs personnalités, Martine Aubry en tête, a le mérite sinon l’avantage de mettre les points sur les i et d’aider –du moins ceux qui restent à convaincre– à retourner le cercle de la raison. Le contenu de ce texte, que nous aurions pu signer d’une main ferme, arrive à point nommé et signale à qui veut bien le voir et le croire qu’une forme de divorce est bel et bien consommée entre Hollande et sa gauche, y compris socialiste. Tout y passe. L’emploi et «le marché de dupes» scellé avec le Medef, la loi El Khomri qui «renverse la hiérarchie des normes», les migrants et «l’indécent discours de Munich» de Valls, la déchéance de nationalité, qui «ouvre la voie à toutes les dérives». «Trop c’est trop!» peut-on lire. Ou encore: «Pas ça, pas nous, pas la gauche!» Prenant acte du bilan désastreux et des dérives idéologiques, les signataires ouvrent-ils un nouvel espace de réelle contestation pouvant modifier le rapport de forces, alors même que la colère gronde sur la réforme du droit du travail et qu’un large front syndical tente de se constituer?

Maintenant, chacun ses responsabilités. L’indignation ne suffit plus, même si, cette fois, elle porte plus haut et plus fort et, à l’évidence, au-delà des cercles initiés, ce dont nous nous félicitons. Mais plus noble que l’alerte sur l’échec programmé, qui élude les mécomptes, nous semble le parti pris de la clarification totale, massive et assumée, qui consisterait à essayer de renverser la table tant qu’il en est encore temps. La (vraie) gauche ne demeurera pas sous le tapis, à condition de ne pas casser des assiettes chacun dans son coin, sinon, ce serait une trahison supplémentaire à la permanence de nos idées communes, qui dépérissent si on ne les entretient pas collectivement. Ce que nous appelons la gauche repose sur une passion farouche, celle d’un choix de société qui ne saurait être, en effet, «l’affaiblissement durable de la France» et l’«indignité» permanente faite à la gauche. Nous ne sommes plus seuls à dire, avec virulence s’entend, que Hollande et Valls n’appartiennent plus à ce choix de société. Mais désormais il faut agir. Vite

[EDITORIAL publié dans l’Humanité du 25 février 2016.]

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