Immuable dans ses grandes lignes, le « milieu » cycliste reste une tradition, un espace balisé – pour le meilleur et pour le pire. Et cette tradition s’est longtemps perpétuée, traversant à son rythme les changements d’époques sans se soucier de son renouvellement, sorte de circuit fermé, comme si le vélo échappait au monde réel en continuant sa propre histoire, répétant sans relâche ses comportements, ses tares et ses vices, acceptant simplement de s’adapter aux rigueurs de la télécratie surgissante – véritable poule aux œufs d’or.
Si le goût du secret confère à ceux qui les détiennent un odieux sentiment de supériorité quand on s’adresse à des profanes, la volonté jusqu’au-boutiste de protéger sa famille, coûte que coûte, impose des contraintes qui abrutissent l’intelligence et poussent les hommes aux mensonges quotidiens, aux accommodements avec la réalité, et pis encore, au déni de soi-même.
Quant une réalité (connue) est volontairement tue et qu’un corps social collectif dans son ensemble décide de la maintenir dans l’ombre, de quoi s’agit-il exactement ? Est-ce la perte de l’innocence ? L’implacable logique d’un esprit mafieux ? Et comment doit-on se comporter en découvrant ce qui se cache derrière le beau rideau des apparences ? Doit-on fuir, tourner le dos ? Ou, de l’intérieur, tenter de modifier ce qui peut l’être ?
Cela étant, l’esprit mafieux du cyclisme – indéniable – n’explique pas à lui seul que le Tour de France soit passé, en moins de vingt ans, du mythe au produit, de la légende à l’ordinaire, de la glorification des Géants de la Route à la raillerie d’hommes-sandwichs sur-vitaminés, à la sauce des Guignols de l’Info par exemple.
De même, l’indécence des pratiques dopantes, sa généralisation, son organisation froidement planifiée avec la complicité et la duplicité de tous (ou presque), ne suffisent pas à régler la question de la possible banalisation d’une épreuve comme le Tour.
Banalisation d’autant moins compréhensible que le dopage n’épargne aucun sport, et que, pour l’instant, ni la magie d’une Coupe du monde de football ni l’universalité des Jeux olympiques ne semblent remises en cause, malgré l’envers du décors, lui aussi connu de tous.
A plus tard...
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