jeudi 18 octobre 2012

Le poison eurocrate : quand Bruxelles veut privatiser la Sécu !

Livrer notre Sécurité sociale
à la concurrence transformerait notre système public en un marché d’assurances privées.

Les monstres modernes agissent 
avec la froideur implacable 
de leur époque. La preuve, nous ne nous méfions jamais assez des eurocrates de Bruxelles. Toujours à l’affût d’une occasion pour tenter de constitutionnaliser le libéralisme dans les moindres interstices de leurs directives, ils ont l’art d’immiscer leur poison sous la forme de mots obscurs, en apparence indolores, mais qui, inoculés par surprise, ont la puissance des venins mortels. Ainsi, quelle ne fut pas la surprise de quelques députés européens en découvrant l’une des annexes d’une proposition de directive sur la «passation des marchés publics». Maître d’œuvre, l’ineffable Michel Barnier, alias commissaire européen au Marché intérieur et aux Services. Ce projet propose ni plus 
moins que de livrer la Sécurité sociale à la concurrence. 
Par le biais d’appels d’offres, notre actuel système public 
se transformerait en un marché d’assurances privées.

L’affaire est sérieuse. Introduire des mécanismes dits de «concurrence» au sein d’un secteur jusque-là sanctuarisé autour des principes sacrés de solidarité signifierait la fin d’un des derniers piliers de notre pacte social. La possibilité de soigner gratuitement, quelle que soit la gravité du mal et quel que soit le niveau de vie du malade, reste une prérogative fondamentale de la République que nous ont léguée les membres du Conseil national de la Résistance.
Elle figure même dans le préambule de la Constitution ! Imaginez un instant ce que deviendrait une Sécurité sociale privatisée, avec d’un côté, un opérateur historique réduit à l’os (les caisses d’assurance santé), et, de l’autre, des géants de l’assurance par exemple, ou des mutuelles, voire des banques, qui ne manqueraient pas de s’emparer du marché. La loi du plus riche et l’inégalité deviendraient les règles. Bien sûr, il est difficile de croire que le gouvernement Ayrault puisse envisager le dépeçage de la Sécu, quelle que soit l’ampleur des déficits. L’eurodéputée socialiste Pervanche Berès, spécialiste des questions sociales, ne cache d’ailleurs pas son incrédulité: «Cela paraît tellement gros», commente-t-elle, «cela ne peut pas passer»

Puisque les ambiguïtés de la Commission 
ont de quoi susciter notre méfiance, c’est donc 
au gouvernement Ayrault de nous rassurer, vite, en prenant les mesures qui s’imposent pour que l’assimilation de la Sécurité sociale au secteur marchand cesse immédiatement. D’autant que l’épisode n’est pas sans nous rappeler le sinistre précédent de la «directive services» du célèbre commissaire Frits Bolkestein. Toute l’Europe et tous ses secteurs d’activités se trouvent depuis dans la ligne de mire, en vertu de la logique néolibérale n’ayant pour cohérence que la concurrence (non libre et faussée) des hommes entre eux, sans aucune idée de progrès humain ni limite morale.

Et François Hollande? Dans un long entretien donné à six quotidiens européens, le chef de l’État déclare solennellement que «l’Europe ne peut plus être en retard» mais que «le pire – c’est-à-dire la crainte d’un éclatement de la zone euro – est passé». Les peuples victimes de l’austérité seront contents de l’apprendre! En imposant le vote du nouveau traité européen, le président a lui aussi choisi une stratégie de choc, car ce pacte de classe au service des puissants cadenasse l’Europe dans des politiques aberrantes, injustes et antidémocratiques. Non, François Hollande n’a pas honoré la promesse du candidat: ce n’est pas renégocier un traité que se contenter d’ajouter un paragraphe sur la croissance sans remettre en question son arsenal anti-souveraineté populaire. Le vampirisme des financiers a eu raison de la Grèce. Qu’il s’attaque désormais à la Sécurité sociale n’a rien d’étonnant…

[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 18 octobre 2012.]

2 commentaires:

Anonyme a dit…

force de tirer sur l'education nationale et en précarisant la profession on arrivera au même résultat, cela a deja commencé d'ailleurs, N quantité d'instituts privés, l'école de la République ne sera qu'un vieux souvenir.
faut-il faire quelque chose ou laisser faire?, se battre et comment ou la résignation?

laperlerare a dit…

J'aime votre post poison eurocrate : quand Bruxelles veut privatiser la sécurité sociale les monstres modernes agissent avec froideur implacable de leur temps à nous ignorer assez d'eurocrates de Bruxelles, Merci pour les informations de la preuve.
Titres services Gembloux