Chacun a pu juger: le plan de com est retombé. Ceux qui ont cru – ou fait semblant de croire – au «grand débat» savent désormais à quoi s’en tenir. Finalement, l’incroyable faculté d’Emmanuel Macron à avoir réponse à tout ne signifie rien ou pas grand-chose, comme dans les quiz de fin de semaine où le plus «sachant» n’a pas toujours la tête du plus «savant». Fini le syndrome Question pour un champion. Après la fascination surjouée du président en bras de chemise tenant le micro durant des heures, voici venu le premier bilan. Il est à l’image de sa lettre aux Français, qui inaugurait bien mal ce cycle de débats. Après avoir promis qu’il n’y aurait «pas de questions interdites», la longue liste des interdits et des contraintes, certes annoncés dans la fameuse missive, balise depuis les prestations publiques, dont on voit trop bien la destination finale. Outre que le chef de l’État se comporte (à longueur d’antenne) en VRP de l’entreprise France disposant de la toute-puissance d’un énarco-technicien de dossiers, il se conduit surtout, à cent jours du scrutin européen, en bateleur de campagne électorale…
La sous-estimation de la question sociale, sans parler de celle de l’enjeu démocratique et citoyen, en dit long sur ses intentions, comme s’il ne sollicitait que les côtés ultraminoritaires d’un mouvement qui lui échappe totalement. D’autant que cette insurrection citoyenne des gilets jaunes tend à prendre depuis peu des formes originales, comme ce fut le cas dans la ville de Commercy, lors d’une Assemblée des assemblées, qui a imposé des thèmes rassembleurs dont le président ne veut pas entendre parler.
Ne le cachons pas: le risque pris par Emmanuel Macron est historiquement périlleux. Pas seulement pour lui, mais pour la France. La déconvenue du faux débat frappe déjà l’opinion en plein cœur; et cette opinion est enflammée. Les effets prévisibles de cette désillusion de grande ampleur risquent de s’ajouter aux conséquences de la répression féroce et intense qui s’abat chaque samedi. Et dire qu’il escompte, de cette manière, poursuivre son remodelage libéral du pays…
[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 29 janvier 2019.]
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire