Emmanuel Macron porte une responsabilité écrasante, devenant en quelque sorte l’incarnation absolue de ce déclin tricolore révélé.
La crise… et toutes les crises. Un an tout juste après le premier confinement, nous avons beaucoup appris de notre pays, de ses capacités collectives comme de ses défaillances égoïstes mues par les lois du «marché» en tant que «modèle de société». Nous avons surtout compris que la gestion de la pandémie avait révélé de si lourdes failles et faiblesses que la nation, en mode accéléré, a donné l’impression de tomber de son piédestal, nous renvoyant de manière brutale un sentiment de désillusion. Une certaine idée du déclin, sinon de déclassement.
Pénuries de moyens et de matériels, hôpitaux et écoles sous tension, absence d’un vaccin développé par notre recherche, industries laminées, décisions confuses ou aléatoires conditionnées par une absence de souveraineté sanitaire et économique, etc. La liste est longue, qui renvoie la sixième puissance mondiale à un rôle de seconde zone, simple sous-traitant de la Chine, de l’Asie, des États-Unis et de tant d’autres pays plus innovants. La France, terre de Hugo et de Pasteur, membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, est-elle encore maîtresse de son destin ?
Chaque citoyen français, plus ou moins confusément, a désormais pris conscience de l’extrême vulnérabilité de notre organisation collective et de la matrice idéologique qui nous gouverne depuis si longtemps. Qu’il le veuille ou non, Emmanuel Macron porte une responsabilité écrasante, devenant en quelque sorte l’incarnation absolue de ce déclin révélé. Et pour cause : jamais président n’aura concentré autant de pouvoir décisionnaire. Du «quoi qu’il en coûte» à tous les choix fondamentaux, il a accumulé les décisions sous les lambris du Palais, découvrant peu à peu que toute la structuration de son idéologie ordo-libérale venait d’être balayée à l’épreuve de la crise. Il eut même cet éclair de lucidité : «Les Français ont réaffirmé leur volonté de prendre leur destin en main, de reprendre possession de leur existence, de leur nation.» Quelle traduction concrète a-t-il donnée, depuis, à ces mots ? Aucune. Et où en sont ses engagements, singulièrement en faveur de l’hôpital ? Nulle part.
L’«après» tant annoncé, qui serait évidemment «différent» et plus jamais le même, a d’ores et déjà les contours de « l’avant », sans doute en pire. Macron n’est que le continuateur paroxystique d’un cycle entamé bien plus tôt, consistant à ce que la France ne soit plus gouvernée au sens de la planification politique, mais comme une entreprise. Qui veut vraiment de ce «nouveau monde» macronien, sauf l’oligarchie de la caste supérieure, qui l’a installé dans la place ?
Le pays ne tient que par le dévouement des personnels, des salariés de tous ordres, des premiers de corvée, de tous ceux qui chérissent le bien commun et le sens du collectif au bénéfice des plus faibles. C’est avec eux, et non contre eux, que le pays se reconstruira.
[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 17 mars 2021.]
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