Au-delà de l’Iran, la question centrale demeure la même : quand stopperons-nous l’escalade du nucléaire militaire dans le monde ?
Un peu plus d’un mois après le début de son mandat et malgré sa promesse, Joe Biden n’a toujours pas clairement déclaré que son pays réintégrait le précieux accord de paix sur le nucléaire iranien, signé à Vienne en 2015. Pourquoi le président américain avance-t-il plus lentement que prévu, alors que le choix de la désescalade est un impératif absolu pour la stabilité du golfe Persique ? Sans doute parce que l’équation n’est pas simple avec les meilleurs alliés des États-Unis dans la région, Israël, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, farouchement opposés à tout accord avec l’Iran. Souvenons-nous que, en 2018, à la tête d’une coalition israélo-saoudienne qui voulait en découdre militairement et asphyxier le régime, Donald Trump avait rompu unilatéralement l’accord. Outre qu’il s’agissait d’une décision irresponsable et lourde de menaces, elle rendait possible la relance du programme nucléaire militaire iranien…
Ce fut d’ailleurs un camouflet pour l’Union européenne et Emmanuel Macron en particulier, qui, en dépit de son opposition verbale aux sanctions de Trump, les avait néanmoins respectées en mettant fin à la quasi-totalité des échanges commerciaux avec l’Iran. Trois ans plus tard, les dirigeants de Téhéran ne comptent plus sur l’Europe, qu’ils considèrent comme dépendante des États-Unis. Beau gâchis, tandis que les gouvernements français et européens pourraient rejouer un rôle majeur à l’heure de réactiver l’accord de Vienne, le renforcer en l’étendant à d’autres pays, et aider à repenser l’avenir du nucléaire militaire d’une humanité nouvelle.
Car, au-delà de l’Iran, la question centrale demeure la même : quand stopperons-nous l’escalade du nucléaire militaire dans le monde, qui, singulièrement en France, se développe sans aucun contrôle populaire, ni parlementaire ? Le 22 janvier dernier, le traité sur l’interdiction des armes nucléaires (Tian) entrait en vigueur, sous l’égide de l’ONU. Ratifié par 54 pays, mais par aucune des 9 puissances disposant de la bombe (États-Unis, Russie, Royaume-Uni, France, Chine, Inde, Pakistan, Corée du Nord, Israël), ce texte vise à interdire purement et simplement cet arsenal sur la planète. Depuis 1968, l’idée de la non-prolifération avait fait son chemin. Celle de l’éradication revient dans le débat public. Il était temps.
[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 25 février 2021.]
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire