Puisque ces temps-ci les armes ne veulent décidément pas se taire, cette confrontation horrible, avec ses meurtres aveugles et ses massacres de masse d’un côté comme de l’autre, aura des prolongements durables pour tous les Ivoiriens et au-delà. Comment oublier que l’effort multilatéral entrepris depuis 2003 avec l’ensemble des États africains a été réduit à néant depuis le dernier scrutin, alors qu’une solution politique de réconciliation était en marche ? En ce domaine, la lucidité est tout le contraire de la naïveté. Discrédité par ses actes de violence et par sa stratégie suicidaire (pour son peuple) du «seul contre tous les impérialistes», ce n’est pas prendre position pour Laurent Gbagbo que de rappeler comment et pourquoi les pressions de la «communauté internationale» l’ont poussé à un raidissement. Rappelons-nous par exemple que la «certification» de la victoire d’Alassane Ouattara par le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies fut juridiquement ambiguë, puisque les Nations unies n’avaient pas sollicité une telle responsabilité et que cette «certification» fut prise au lendemain de la proclamation du Conseil constitutionnel donnant Laurent Gbagbo vainqueur… Beaucoup y ont vu la «main des Occidentaux». Hélas, comment pouvait-il en être autrement ?
Après quatre mois d’une crise postélectorale qui ont laissé le pays exsangue et meurtri par les violences, Alassane Ouattara, ex-directeur Afrique du FMI, a donc pris le dessus, en s’appuyant en grande partie sur les combattants armés de l’ex-rébellion. D’ailleurs, histoire de se convaincre qu’il nous faut regarder cette guerre civile tout en complexité, ne nous étonnons pas que le chef de l’ONU, Ban Ki-moon lui-même, ait exhorté hier Ouattara de prendre «des mesures contre les massacres» et les crimes de guerre perpétrés par ses troupes… Car la raison est restée étrangère à ce conflit. Et autant le dire, les événements récents ne vont rien arranger. Encouragée par Nicolas Sarkozy en personne, la solution militaire est la seule en vigueur et lorsque nous avons appris, hier, que les forces françaises de l’opération «Licorne» avaient pris le contrôle de l’aéroport international d’Abidjan –comme au bon vieux temps – et que la France avait dépêché 300 soldats en renfort, nous nous sommes dit que ce symbole laisserait de nouvelles traces indélébiles. Tous ceux qui ont poussé dans la voie de la confrontation, au mépris de ses risques et de ses conséquences, portent d’ores et déjà une lourde responsabilité. Sur ces terres chargées d’histoires mémorielles, il n’y a rien de pire que le soupçon d’ingérence et de partialité…
[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 4 avril 2011.]
(A plus tard...)
1 commentaire:
Tout est bien qui ne finira pas mal espérons le en entendant le beau discours d'A.OUATTARA hier ...méfions-nous quand même des lendemains qui déchantent...les occidentaux comme partout et toujours dans le monde exercent une forte pression et une présence constante dans cette belle Afrique....nous sommes tous assis sur des poudrières ....une page se tourne dans un pays profondément meurtri...mais à quel prix? ...souhaitons-leur bonne chance....PAT
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