Les jeux Olympiques ne sont-ils devenus qu’artefacts et purs spectacles d’un rêve éventé?
«Le sport va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour en triompher, la difficulté pour la vaincre.» Faut-il donc en appeler à Pierre de Coubertin pour se demander si la glorification de la geste sportive consiste uniquement à la soumettre à la nécessité épique des épreuves, à leur indéfectible incertitude, aux exploits insoupçonnés et aux détresses intimes? À chaque déification sportive, démesurément mise en scène par l’hyper-bulle économico-médiatique, nos interrogations ressurgissent. Plus grands? Plus chers? Moins humains? En somme: esprit olympique, es-tu encore là?
A l’heure où va scintiller la flamme des jeux Olympiques de Londres, brûlant tous les feux cathodiques en mondovision, nous aurions toutes les raisons de nous détourner de ce spectacle outrageant de puissance communicative, penser qu’il n’est plus qu’un théâtre désenchanté par l’appât du gain immédiat, l’antre piétiné d’une humanité ayant perdu le sens de son symbole suprême, jadis nommé «monde amateur», renvoyé depuis aux calendes grecques, squatté par des héros qui, pour beaucoup, ne méritent plus notre mythification…
samedi 28 juillet 2012
lundi 23 juillet 2012
Tour : Wiggins ne pouvait pas laisser passer son Tour
À trente-deux ans, le leader de l’équipe Sky devient le premier Anglais à remporter la Grande Boucle. L’ancien champion olympique de poursuite, parfait rouleur au corps amaigri pour supporter les exigences de la route, a réussi trois semaines parfaites.
Depuis Paris.
«Il m’a fallu beaucoup de temps pour accepter que les gens s’intéressent à moi.» À défaut de toujours se frayer une place en Sagesse pour concurrencer les Illustres, le cyclisme permet de lire les âmes humaines les moins dépliées. «Je ne l’ai jamais vraiment accepté.» Bradley Wiggins s’exprime un peu plus intimement qu’à l’accoutumée, mais une part de sa substance semble encore enfouie en lui, loin, très loin des contingences ordinaires. «Je crois que ça remonte à ma jeunesse, les professeurs à l’école et tout ça, j’étais un peu solitaire et je me demandais toujours pourquoi ils se souciaient de moi.» Les mots à faible volubilité disent la vérité nue. «C’est un sentiment général, c’est difficile à expliquer.» Avec sa façon virtuose d’effleurer l’émotion, Bradley laisse enfin parler les silences. C’est tout un mystère que l’accession d’un gamin londonien à la Légende de Juillet, lustrée par l’épaisseur du temps.
Le chronicœur examine attentivement le héros, ennobli par ce paletot jaune qu’il a longtemps cru trop vaste pour lui au point que, par moments, durant trois semaines de domination pourtant incontestée, nous avons cru que l’onde néfaste des événements pouvait encore traverser ce corps frêle en action.
Depuis Paris.
«Il m’a fallu beaucoup de temps pour accepter que les gens s’intéressent à moi.» À défaut de toujours se frayer une place en Sagesse pour concurrencer les Illustres, le cyclisme permet de lire les âmes humaines les moins dépliées. «Je ne l’ai jamais vraiment accepté.» Bradley Wiggins s’exprime un peu plus intimement qu’à l’accoutumée, mais une part de sa substance semble encore enfouie en lui, loin, très loin des contingences ordinaires. «Je crois que ça remonte à ma jeunesse, les professeurs à l’école et tout ça, j’étais un peu solitaire et je me demandais toujours pourquoi ils se souciaient de moi.» Les mots à faible volubilité disent la vérité nue. «C’est un sentiment général, c’est difficile à expliquer.» Avec sa façon virtuose d’effleurer l’émotion, Bradley laisse enfin parler les silences. C’est tout un mystère que l’accession d’un gamin londonien à la Légende de Juillet, lustrée par l’épaisseur du temps.
Le chronicœur examine attentivement le héros, ennobli par ce paletot jaune qu’il a longtemps cru trop vaste pour lui au point que, par moments, durant trois semaines de domination pourtant incontestée, nous avons cru que l’onde néfaste des événements pouvait encore traverser ce corps frêle en action.
Tour : connaissez-vous le docteur de l’équipe Sky?
Geert Leinders était absent de l’épreuve cette année, mais il travaille 80 jours par an avec la formation du vainqueur Bradley Wiggins. Leinders n’est pas un inconnu. Il était le toubib de Rabobank…
Depuis Paris.
La machine à gagner du Team Sky, qui a tout emporté sur son passage – ou presque – durant le dernier Tour de France, a logiquement attiré les suspicions. De la performance collective des principaux coureurs de l’équipe anglaise, à la débauche de watts constatée dans plusieurs étapes clefs en montagne par quelques spécialistes, le doute persiste sur la nature de la préparation «scientifique» de Bradley Wiggins et de ses équipiers. D’autant qu’une question reste pour l’heure sans réponse, malgré nos sollicitations durant trois semaines : pour Dave Brailsford, le manager de Sky, s’est-il alloué les services d’un médecin au passé pour le moins sulfureux?
Depuis le départ de Liège et jusqu’au Good Save The Queen entonné sur les Champs-Elysées par le premier vainqueur Britannique du Tour, l’ombre d’un homme a en effet plané au-dessus des hommes en noir. Ce personnage obscur s’appelle Geert Leinders, belge de nationalité, médecin de profession, sulfureux de réputation et plutôt discret dans le milieu… Car voyez-vous, Leinders travaillait pour Rabobank au moment des affaires Rasmussen et Dekker, qui, il y a quelques années, laissèrent peu de doutes sur ce qui se tramait dans les coulisses de l’équipe néerlandaise...
Geert Leinders, du temps où il officiait chez Rabobank. |
La machine à gagner du Team Sky, qui a tout emporté sur son passage – ou presque – durant le dernier Tour de France, a logiquement attiré les suspicions. De la performance collective des principaux coureurs de l’équipe anglaise, à la débauche de watts constatée dans plusieurs étapes clefs en montagne par quelques spécialistes, le doute persiste sur la nature de la préparation «scientifique» de Bradley Wiggins et de ses équipiers. D’autant qu’une question reste pour l’heure sans réponse, malgré nos sollicitations durant trois semaines : pour Dave Brailsford, le manager de Sky, s’est-il alloué les services d’un médecin au passé pour le moins sulfureux?
Depuis le départ de Liège et jusqu’au Good Save The Queen entonné sur les Champs-Elysées par le premier vainqueur Britannique du Tour, l’ombre d’un homme a en effet plané au-dessus des hommes en noir. Ce personnage obscur s’appelle Geert Leinders, belge de nationalité, médecin de profession, sulfureux de réputation et plutôt discret dans le milieu… Car voyez-vous, Leinders travaillait pour Rabobank au moment des affaires Rasmussen et Dekker, qui, il y a quelques années, laissèrent peu de doutes sur ce qui se tramait dans les coulisses de l’équipe néerlandaise...
dimanche 22 juillet 2012
Tour : pour Prudhomme, «on a changé d’ère»
Le patron de l’épreuve ne reproche rien à l’équipe Sky, mais reconnaît qu’il s’attendait à plus de suspense.
Depuis Paris.
« Le Tour de France 2012 confirme la montée en puissance du monde anglophone, expliquait Christian Prudhomme, samedi soir. En janvier 2009, j’étais allé à Manchester à l’invitation de Dave Brailsfort, qui souhaitait nous présenter son projet de mener en quatre ans un Britannique pour la première fois vainqueur du Tour. C’est fait. On a changé d’ère. Un an après le premier Australien, Cadel Evans, lui aussi venu d’une autre discipline (VTT), Bradley Wiggins, triple champion olympique sur piste – c’est inédit –, a signé une victoire à la Indurain, ou pour nous, Français, à la Jacques Anquetil. On préfère une sélection par l’avant plutôt que par l’arrière, mais on ne peut pas reprocher à Sky son souci du détail et du travail incroyablement soigné.
Depuis Paris.
« Le Tour de France 2012 confirme la montée en puissance du monde anglophone, expliquait Christian Prudhomme, samedi soir. En janvier 2009, j’étais allé à Manchester à l’invitation de Dave Brailsfort, qui souhaitait nous présenter son projet de mener en quatre ans un Britannique pour la première fois vainqueur du Tour. C’est fait. On a changé d’ère. Un an après le premier Australien, Cadel Evans, lui aussi venu d’une autre discipline (VTT), Bradley Wiggins, triple champion olympique sur piste – c’est inédit –, a signé une victoire à la Indurain, ou pour nous, Français, à la Jacques Anquetil. On préfère une sélection par l’avant plutôt que par l’arrière, mais on ne peut pas reprocher à Sky son souci du détail et du travail incroyablement soigné.
samedi 21 juillet 2012
Tour : Wiggins, boss de la Beauce
Le maillot jaune a écrasé l’ultime contre-la-montre, à Chartres, à la veille de l’arrivée sur les Champs-Elysées. Il remporte sa deuxième victoire d’étape... et le Tour.
Depuis Chartres (Eure-et-Loir).
Juste une mise au poing… Après les 53,5 kilomètres du contre-la-montre à travers la Beauce, le plus long de l’édition 2012, Bradley Wiggins s’est laissé aller à une expression de libération qu’on ne lui connaissait pas jusqu’à ce jour. Et pas n’importe quelle expression. A peine franchissait-il la ligne d’arrivée, que, rageusement, il dressait son poing ganté vers les airs. Une rage de victoire. Une rage de supériorité. Une rage de satisfaction. Une rage. Tout simplement.
Car le maillot jaune, à 50 km/h de moyenne, a écrasé le temps! Le chronicoeur, qui ne s’en vante pas, avait prédit à ses petits camarades sceptiques de la caravane que l’Anglais profiterait de ce parcours idéal pour remettre les pendules à l’heure et les secondes qui vont avec: une minute et seize secondes pour être précis, l’écart qui le séparait sur la ligne de son poursuivant et coéquipier, Christopher Froome. Ceux qui espéraient une «bataille au sommet» entre les deux Sky sur ce chrono rêvaient beaucoup.
Wiggins, taillé pour les chronos. |
Juste une mise au poing… Après les 53,5 kilomètres du contre-la-montre à travers la Beauce, le plus long de l’édition 2012, Bradley Wiggins s’est laissé aller à une expression de libération qu’on ne lui connaissait pas jusqu’à ce jour. Et pas n’importe quelle expression. A peine franchissait-il la ligne d’arrivée, que, rageusement, il dressait son poing ganté vers les airs. Une rage de victoire. Une rage de supériorité. Une rage de satisfaction. Une rage. Tout simplement.
Car le maillot jaune, à 50 km/h de moyenne, a écrasé le temps! Le chronicoeur, qui ne s’en vante pas, avait prédit à ses petits camarades sceptiques de la caravane que l’Anglais profiterait de ce parcours idéal pour remettre les pendules à l’heure et les secondes qui vont avec: une minute et seize secondes pour être précis, l’écart qui le séparait sur la ligne de son poursuivant et coéquipier, Christopher Froome. Ceux qui espéraient une «bataille au sommet» entre les deux Sky sur ce chrono rêvaient beaucoup.
vendredi 20 juillet 2012
Tour : le cav’ se rebiffe
Monumental sprint de Mark Cavendish à Brive. Le champion du monde remporte sa 22e victoire sur le Tour, la quatrième pour l'équipe Sky dans cette édition 2012…
Depuis Brive-la-Gaillarde (Corrèze).
Attention au coup de vent! Lorsque nous vîmes Mark Cavendish débouler dans les ultimes hectomètres d’un sprint attendu, nous n’avons pas pu réfréner un rire. De ces rires qui viennent de loin, à force d’avoir été retenus… Oui, oh oui, Mark Cavendish est toujours là et, visiblement, il avait envie de le faire savoir. Sevré de victoire depuis la deuxième étape à Tournai (que ça paraît loin), contraint comme tout le monde chez Sky d'abattre sa part du boulot pour Bradley Wiggins, le champion du monde n'avait pas vraiment eu l'occasion de briller depuis. Mais ce vendredi, à Brive, il a montré à tout le monde qu'il restait, et de loin, le plus rapide du peloton en vitesse pure. Lorsque le peloton a fondu sur les derniers échappés dans le final, il a chevauché à l’irrésistible. Lui. Et les autres. Matthew Goss et Peter Sagan, qui l’ont accompagné sur le podium du jour, ne l'ont aperçu que de loin dans cette dernière ligne droite. Un véritable coup de vent, on vous dit!
Cavendish, seul au monde... |
Attention au coup de vent! Lorsque nous vîmes Mark Cavendish débouler dans les ultimes hectomètres d’un sprint attendu, nous n’avons pas pu réfréner un rire. De ces rires qui viennent de loin, à force d’avoir été retenus… Oui, oh oui, Mark Cavendish est toujours là et, visiblement, il avait envie de le faire savoir. Sevré de victoire depuis la deuxième étape à Tournai (que ça paraît loin), contraint comme tout le monde chez Sky d'abattre sa part du boulot pour Bradley Wiggins, le champion du monde n'avait pas vraiment eu l'occasion de briller depuis. Mais ce vendredi, à Brive, il a montré à tout le monde qu'il restait, et de loin, le plus rapide du peloton en vitesse pure. Lorsque le peloton a fondu sur les derniers échappés dans le final, il a chevauché à l’irrésistible. Lui. Et les autres. Matthew Goss et Peter Sagan, qui l’ont accompagné sur le podium du jour, ne l'ont aperçu que de loin dans cette dernière ligne droite. Un véritable coup de vent, on vous dit!
Tour : la vieille Angleterre étend son empire
Alejandro Valverde, de retour de suspension, remporte la dernière étape des Pyrénées. Bradley Wiggins et Christopher Froome éparpillent les autres favoris. L’équipe Sky a gagné le Tour…
Peyragudes (Hautes-Pyrénées), envoyé spécial.
Certains jours, les Pyrénées donnent à voir la nécessité de la contemplation. Contrairement à la rumeur publique qui laisserait croire que cette valeur serait devenue surannée pendant le rendez de Juillet, le chronicoeur ne laisse jamais passer son tour pour s’offrir, dans ces espaces de beauté, une place élégiaque qu’aucune manière funeste ne parvient à anéantir. Hier matin, avec un crachin pas malin et des voiles de bruines façon purée de pois, le climat se prêtait à l’ultime chance. Ambiance particulière pour cette dernière étape de montagne, entre Bagnères-de-Luchon et Peyragudes (143,5 km), slalomant entre les Hautes (Garonne et Pyrénées), à travers un théâtre sauvage sublime destiné aux audacieux du genre.
Dès le célèbre col de Menté (1re cat.), nous sentions que chaque virage se prêtait à l’inattendu. Une curieuse alchimie conditionnée par le froid et la pluie, dans les traces-sans-traces des coursiers qui se rapprochaient de l’endroit où Luis Ocana, en 1971, se fracassa sous un déluge de flotte et de boue, maculant pour jamais son beau maillot jaune (1). Ici, les couleurs prennent souvent des atours de tragédie. Et lorsque Vicenzo Nibali (Liquigas), qui grimpe aussi bien qu’il dévale, profita de cette descente détrempée pour prendre une vingtaine de secondes d’avance sur le groupe maillot jaune, un instant, nous crûmes que l’Italien pourrait renverser la journée et l’histoire avec.
Wiggins, dans la roue de Froome. |
Certains jours, les Pyrénées donnent à voir la nécessité de la contemplation. Contrairement à la rumeur publique qui laisserait croire que cette valeur serait devenue surannée pendant le rendez de Juillet, le chronicoeur ne laisse jamais passer son tour pour s’offrir, dans ces espaces de beauté, une place élégiaque qu’aucune manière funeste ne parvient à anéantir. Hier matin, avec un crachin pas malin et des voiles de bruines façon purée de pois, le climat se prêtait à l’ultime chance. Ambiance particulière pour cette dernière étape de montagne, entre Bagnères-de-Luchon et Peyragudes (143,5 km), slalomant entre les Hautes (Garonne et Pyrénées), à travers un théâtre sauvage sublime destiné aux audacieux du genre.
Dès le célèbre col de Menté (1re cat.), nous sentions que chaque virage se prêtait à l’inattendu. Une curieuse alchimie conditionnée par le froid et la pluie, dans les traces-sans-traces des coursiers qui se rapprochaient de l’endroit où Luis Ocana, en 1971, se fracassa sous un déluge de flotte et de boue, maculant pour jamais son beau maillot jaune (1). Ici, les couleurs prennent souvent des atours de tragédie. Et lorsque Vicenzo Nibali (Liquigas), qui grimpe aussi bien qu’il dévale, profita de cette descente détrempée pour prendre une vingtaine de secondes d’avance sur le groupe maillot jaune, un instant, nous crûmes que l’Italien pourrait renverser la journée et l’histoire avec.
jeudi 19 juillet 2012
Tour : avec Valverde, vous reprendrez bien un petit Puerto?
L'Espagnol Alejandro Valverde (Movistar), vainqueur de la 17e étape, est revenu fin 2011 d’une suspension pour son implication dans une affaire de dopage…
Depuis Peyragudes (Hautes-Pyrénées).
Gagner une étape du Tour, était cette année son objectif absolu. «Je suis réaliste, je ne pouvais pas viser mieux», disait-il, ce jeudi soir, en conférence de presse, après sa victoire sur les hauteurs de Peyragudes (1605 m). L'Espagnol, âgé de 32 ans, est revenu cette saison dans le peloton après avoir purgé – tardivement – une suspension de deux ans. Dans le Tour, qu'il n'avait plus disputé depuis 2008, Valverde a remporté la quatrième victoire d’étape de sa carrière. Vainqueur de la Vuelta 2009, Valverde a remporté de nombreuses courses par étapes (Dauphiné 2008 et 2009, Tour de Catalogne 2009, etc.) et des classiques (Liège-Bastogne-Liège 2006 et 2008, Flèche Wallonne 2006, Clasica San Sebastian 2008).
Alejandro Valverde. |
Gagner une étape du Tour, était cette année son objectif absolu. «Je suis réaliste, je ne pouvais pas viser mieux», disait-il, ce jeudi soir, en conférence de presse, après sa victoire sur les hauteurs de Peyragudes (1605 m). L'Espagnol, âgé de 32 ans, est revenu cette saison dans le peloton après avoir purgé – tardivement – une suspension de deux ans. Dans le Tour, qu'il n'avait plus disputé depuis 2008, Valverde a remporté la quatrième victoire d’étape de sa carrière. Vainqueur de la Vuelta 2009, Valverde a remporté de nombreuses courses par étapes (Dauphiné 2008 et 2009, Tour de Catalogne 2009, etc.) et des classiques (Liège-Bastogne-Liège 2006 et 2008, Flèche Wallonne 2006, Clasica San Sebastian 2008).
Tour : et Voeckler cueillit les fruits de la passion
Dans les Pyrénées, le Français d’Europcar remporte l’étape reine du Tour, sa deuxième victoire cette année, et s’empare du maillot à pois rouge. Bradley Wiggins (Sky) poursuit sa domination passive.
Depuis Bagnères-de-Luchon (Haute-Garonne).
La passion sans l’amour, n’est-ce pas, déjà, la mort de la passion? Allez, qu’il est bon d’être vivant à l’engagement, de le voir renaître, changeant mais identique, observé par un regard qui permet toujours de nous reconnaître comme tel. Thomas Voeckler (Europcar) est un catalyseur idéal pour nous remettre en ordre, alors que tout devrait nous disperser. Avec sa façon virtuose d’effleurer le chaos, les paumes en suspens, le visage tiraillé de perdre haleine et son genou tant meulé qu’il disparaît à la douleur d’une tendinite oubliée, il rehausse le récit, le malaxe, le distord. Et nous, nous voulons croire à la belle histoire dans sa répétition – une forme d’acceptation sans résignation.
Rescapé d’une longue échappée partie tôt dans l’étape reine du Tour, entre Pau et Bagnères-de-Luchon (197 km), par une chaleur accablante, le Français n’a pas fait de détail pour larguer son ultime compagnon, Brice Feuillu (Saur-Saujasun), malgré Aubisque (HC), Tourmalet (HC), Aspin (1re cat.) et Peyresourde (1re cat.). La montagne, revancharde aux hommes d’orgueil, aime honorer les tempéraments furibards, les en-furie permanents, les casse-cous des serments suicidaires. Notre «Titi» national cueillit donc les fruits de la passion. Une deuxième victoire d’étape, avec, dans la corbeille, un beau maillot à pois.
Thomas Voeckler. |
La passion sans l’amour, n’est-ce pas, déjà, la mort de la passion? Allez, qu’il est bon d’être vivant à l’engagement, de le voir renaître, changeant mais identique, observé par un regard qui permet toujours de nous reconnaître comme tel. Thomas Voeckler (Europcar) est un catalyseur idéal pour nous remettre en ordre, alors que tout devrait nous disperser. Avec sa façon virtuose d’effleurer le chaos, les paumes en suspens, le visage tiraillé de perdre haleine et son genou tant meulé qu’il disparaît à la douleur d’une tendinite oubliée, il rehausse le récit, le malaxe, le distord. Et nous, nous voulons croire à la belle histoire dans sa répétition – une forme d’acceptation sans résignation.
Rescapé d’une longue échappée partie tôt dans l’étape reine du Tour, entre Pau et Bagnères-de-Luchon (197 km), par une chaleur accablante, le Français n’a pas fait de détail pour larguer son ultime compagnon, Brice Feuillu (Saur-Saujasun), malgré Aubisque (HC), Tourmalet (HC), Aspin (1re cat.) et Peyresourde (1re cat.). La montagne, revancharde aux hommes d’orgueil, aime honorer les tempéraments furibards, les en-furie permanents, les casse-cous des serments suicidaires. Notre «Titi» national cueillit donc les fruits de la passion. Une deuxième victoire d’étape, avec, dans la corbeille, un beau maillot à pois.
mercredi 18 juillet 2012
Tour : « Je suis innocent », clame Fränk Schleck
Fränk Schleck, qui a quitté la Grande Boucle après un « résultat d’analyse anormal », a nié avoir pris une quelconque substance interdite. Il menace de porter plainte pour « empoisonnement ».
Depuis Bagnère-de-Luchon (Haute-Garonne).
«Je nie catégoriquement avoir pris quoi que ce soit d'interdit. Je n'ai aucune explication quant au test et j'insiste donc pour que soit analysé l'échantillon B. C'est mon droit.» Voilà les premiers mots, livrés par communiqué, de l’aîné des frères Schleck, qui, comme vous le savez, a fait l'objet d'un contrôle antidopage positif à un diurétique (Xipamide) à l'issue de la 13e étape, le 14 juillet au Cap d'Agde. Fränk poursuit en ces termes: «Si cette analyse confirme le résultat initial, je pourrais alors penser que j'ai été victime d'un empoisonnement et je porterai plainte.»
Ce mercredi matin à Pau, Christian Prudhomme, le directeur du Tour de France, qualifiait le retrait de la course du coureur luxembourgeois de «décision sage, la seule envisageable». Et il précisait: «Selon les règles de l’Union cycliste internationale, Fränk Schleck aurait pu être au départ ce mercredi matin (car la substance incriminée qui n'entraînait pas obligatoirement son retrait, ndlr). Mais avec son équipe, le coureur a décidé de se retirer. Nous avons appris hier (mardi) que Fränk Schleck avait eu un résultat anormal selon la terminologie du communiqué de l'UCI. Cela ouvre le champ à beaucoup de possibilités de suites sur cette substance dite spécifiée, qui peuvent aller du simple avertissement à la suspension. C'est une palette extraordinairement large.»
Fränk Schleck. |
«Je nie catégoriquement avoir pris quoi que ce soit d'interdit. Je n'ai aucune explication quant au test et j'insiste donc pour que soit analysé l'échantillon B. C'est mon droit.» Voilà les premiers mots, livrés par communiqué, de l’aîné des frères Schleck, qui, comme vous le savez, a fait l'objet d'un contrôle antidopage positif à un diurétique (Xipamide) à l'issue de la 13e étape, le 14 juillet au Cap d'Agde. Fränk poursuit en ces termes: «Si cette analyse confirme le résultat initial, je pourrais alors penser que j'ai été victime d'un empoisonnement et je porterai plainte.»
Ce mercredi matin à Pau, Christian Prudhomme, le directeur du Tour de France, qualifiait le retrait de la course du coureur luxembourgeois de «décision sage, la seule envisageable». Et il précisait: «Selon les règles de l’Union cycliste internationale, Fränk Schleck aurait pu être au départ ce mercredi matin (car la substance incriminée qui n'entraînait pas obligatoirement son retrait, ndlr). Mais avec son équipe, le coureur a décidé de se retirer. Nous avons appris hier (mardi) que Fränk Schleck avait eu un résultat anormal selon la terminologie du communiqué de l'UCI. Cela ouvre le champ à beaucoup de possibilités de suites sur cette substance dite spécifiée, qui peuvent aller du simple avertissement à la suspension. C'est une palette extraordinairement large.»
mardi 17 juillet 2012
Tour : le Luxembourgeois Fränk Schleck positif !
Coup de tonnerre à Pau, au soir de la journée de repos. Le leader de l’équipe Radioschack, Fränk Schleck, a été contrôlé positif à un diurétique. Le début de la fin de la "petite entreprise" Schleck?
Depuis Pau (Pyrénées-Atlantiques).
Il n’y a pas de petits secrets. Ce mardi soir, la plupart des suiveurs étaient déjà attablés lorsque l’info se diffusa comme une traînée de poudre. Le chronicoeur était au Berry, restaurant façon brasserie populaire très en vue qu’une bonne partie des connaisseurs fréquentent à chaque venue du Tour, c'est-à-dire presque tous les ans. Il y avait là des journalistes suisses, le Suiveur de Libération à notre table, Jean-René Bernaudeau pas loin, et même l’ami Jean Cormier, ancien journaliste au Parisien et écrivain (qui fut lui aussi un proche de Laurent Fignon).
Et puis, sur le coup de 20h30, les téléphones portables ont commencé à crépiter. «Fränk Schleck positif.» Juste trois mots. Un certain étonnement. Une incompréhension. Et puis, chacun est parti en catastrophe pour reprendre son labeur de suiveur…
La lecture du communiqué officiel nous apprit toute l’affaire. L’examen d'un échantillon urinaire prélevé le samedi 14 juillet, jour de la treizième étape, a fait l'objet d'un «résultat d'analyse anormal», a annoncé mardi l'Union cycliste internationale (UCI). Le laboratoire de Châtenay-Malabry a décelé dans cet échantillon de Fränk Schleck la présence d'un diurétiquee, le Xipamide, molécule utilisée dans le traitement de l'hypertension et d'oedèmes. «Le règlement antidopage de l'UCI ne prévoit pas la suspension provisoire vu la nature de la substance, qui est une substance spécifiée», précise le communiqué.
Fränk Schleck. |
Il n’y a pas de petits secrets. Ce mardi soir, la plupart des suiveurs étaient déjà attablés lorsque l’info se diffusa comme une traînée de poudre. Le chronicoeur était au Berry, restaurant façon brasserie populaire très en vue qu’une bonne partie des connaisseurs fréquentent à chaque venue du Tour, c'est-à-dire presque tous les ans. Il y avait là des journalistes suisses, le Suiveur de Libération à notre table, Jean-René Bernaudeau pas loin, et même l’ami Jean Cormier, ancien journaliste au Parisien et écrivain (qui fut lui aussi un proche de Laurent Fignon).
Et puis, sur le coup de 20h30, les téléphones portables ont commencé à crépiter. «Fränk Schleck positif.» Juste trois mots. Un certain étonnement. Une incompréhension. Et puis, chacun est parti en catastrophe pour reprendre son labeur de suiveur…
La lecture du communiqué officiel nous apprit toute l’affaire. L’examen d'un échantillon urinaire prélevé le samedi 14 juillet, jour de la treizième étape, a fait l'objet d'un «résultat d'analyse anormal», a annoncé mardi l'Union cycliste internationale (UCI). Le laboratoire de Châtenay-Malabry a décelé dans cet échantillon de Fränk Schleck la présence d'un diurétiquee, le Xipamide, molécule utilisée dans le traitement de l'hypertension et d'oedèmes. «Le règlement antidopage de l'UCI ne prévoit pas la suspension provisoire vu la nature de la substance, qui est une substance spécifiée», précise le communiqué.
Tour : est-il possible de faire plier l'équipe Sky?
Après quinze jours d'une course insipide, la réponse de quelques directeurs sportifs. Pas très optimistes...
Depuis Pau (Pyrénées-Atlantiques).
Si beaucoup d'observateurs affirment que "tout est encore possible" sur le Tour de France, en particulier des événements imprévus, surtout en montagne, ils n'en cachent pas moins leur scepticisme sur la possibilité de battre Bradley Wiggins et son équipe Sky dans les cinq jours de course à venir. Voici les réponses de quelques directeurs sportifs à la question fatidique: "Est-il possible de faire plier l'équipe Sky dans les Pyrnées?"
Valerio Piva, le directeur sportif de l'équipe Katusha: "Si vous m'aviez posé la question au début j'aurais dit oui bien sûr, ils ne vont pas continuer comme cela, c'est impossible. Mais jusqu'à maintenant, ils sont très forts tous les jours, ils ont contrôlé la course sans problème, sans dépenser trop d'énergie. Ils ne seront battus que s'ils font des erreurs eux-mêmes. Sinon, ils ont trop de contrôle. Les Pyrénées ne devraient pas perturber le jeu, sauf intervention d'un élément extérieur. Peut-être la grosse chaleur qui est annoncée."
Depuis Pau (Pyrénées-Atlantiques).
Si beaucoup d'observateurs affirment que "tout est encore possible" sur le Tour de France, en particulier des événements imprévus, surtout en montagne, ils n'en cachent pas moins leur scepticisme sur la possibilité de battre Bradley Wiggins et son équipe Sky dans les cinq jours de course à venir. Voici les réponses de quelques directeurs sportifs à la question fatidique: "Est-il possible de faire plier l'équipe Sky dans les Pyrnées?"
Tour : le clou du spectacle, c’est Pierrick Fédrigo!
Victoire d’étape pour le Français de la FDJ. Mais hier, tout le monde ne parlait encore que du « sabotage » de la veille, des clous de tapissier jetés sous les roues des coureurs, et de l’enquête des gendarmes…
Depuis Pau (Pyrénées-Atlantiques).
«Sabotage sur le Tour.» «Acte criminel.» «Geste ignoble.» Depuis les épisodes du Mur de Péguère, dimanche, le chronicoeur cherche à rentrer dans les clous pour éviter le Tour de vice. Cherchant dans les classiques majeurs quelque réconfort, le maître Roland Barthes s’est de nouveau imposé à l’heure où l’épreuve a frôlé le fait divers en amassant des tonnes d’indignations. Dans ses Mythologies, Barthes traite le Tour comme une comédie classique, un spectacle qui «naît d’un étonnement des rapports humains» (1). Sanctuarisée et glorifiée par l’aménagement de ses propres lois, la Grande Boucle est rarement victime des duperies du monde «de la société civile». Retour à la réalité.
L’affaire des crevaisons à répétition, manifestement provoquée par la malveillance d’une ou plusieurs personnes, est donc prise au sérieux. Pensez donc: soixante-et-un changements de roues en quelques kilomètres, du jamais vu dans l’histoire du Tour. Une pagaille généralisée pour les coureurs et les suiveurs, une course quasi neutralisée alors qu’une bagarre pouvait prendre forme dans le final de l’étape entre Limoux et Foix, et, surtout, de vraies menaces sur l’intégrité physique des casse-cous dévalant à tombeau ouvert la descente du Mur de Péguère. Robert Kiserlovski (Astana) en sait quelque chose. Après avoir donné sa roue à Janez Brajkovic, le Croate fut percuté de plein fouet par Levi Leipheimer (Omega Pharma). Résultat: fracture de la clavicule, abandon. Petar Tomich, technicien américain travaillant pour Mavic (l’assistance dépannage neutre des équipes), témoigne de l’anarchie qui régnait: «C’est la première fois que je vois une course ainsi sabotée. C’était le chaos absolu, la folie, comme si la course avait explosé brutalement!»
La victoire de Pierrick Fédrigo à Pau. |
«Sabotage sur le Tour.» «Acte criminel.» «Geste ignoble.» Depuis les épisodes du Mur de Péguère, dimanche, le chronicoeur cherche à rentrer dans les clous pour éviter le Tour de vice. Cherchant dans les classiques majeurs quelque réconfort, le maître Roland Barthes s’est de nouveau imposé à l’heure où l’épreuve a frôlé le fait divers en amassant des tonnes d’indignations. Dans ses Mythologies, Barthes traite le Tour comme une comédie classique, un spectacle qui «naît d’un étonnement des rapports humains» (1). Sanctuarisée et glorifiée par l’aménagement de ses propres lois, la Grande Boucle est rarement victime des duperies du monde «de la société civile». Retour à la réalité.
L’affaire des crevaisons à répétition, manifestement provoquée par la malveillance d’une ou plusieurs personnes, est donc prise au sérieux. Pensez donc: soixante-et-un changements de roues en quelques kilomètres, du jamais vu dans l’histoire du Tour. Une pagaille généralisée pour les coureurs et les suiveurs, une course quasi neutralisée alors qu’une bagarre pouvait prendre forme dans le final de l’étape entre Limoux et Foix, et, surtout, de vraies menaces sur l’intégrité physique des casse-cous dévalant à tombeau ouvert la descente du Mur de Péguère. Robert Kiserlovski (Astana) en sait quelque chose. Après avoir donné sa roue à Janez Brajkovic, le Croate fut percuté de plein fouet par Levi Leipheimer (Omega Pharma). Résultat: fracture de la clavicule, abandon. Petar Tomich, technicien américain travaillant pour Mavic (l’assistance dépannage neutre des équipes), témoigne de l’anarchie qui régnait: «C’est la première fois que je vois une course ainsi sabotée. C’était le chaos absolu, la folie, comme si la course avait explosé brutalement!»
lundi 16 juillet 2012
Tour : échange d'amabilités entre Wiggins et... Virenque
Le premier accuse le second de disposer d'une popularité illégitime en raison de son passé de dopé. Le second refuse de recevoir des leçons d'un coureur qui n'attaque jamais...
Le chronicoeur reprochera toujours à Richard Virenque son absence d'intelligence devant les faits, sa couardise, sa mauvaise foi et, parfois, son absence totale de discernement concernant ses propres actes. Mais il ne lui reprochera jamais son manque de tempérament... la preuve.
L'ancien chouchou du public français des routes de juillet, désormais consultant pour Eurosport, n'a pas apprécié, mais pas du tout, l'une des chroniques de Bradley Wiggins dans le quotidien britannique The Guardian. Le maillot jaune britannique s'étonnait que l'ancien meilleur grimpeur de la Grande Boucle soit toujours considéré comme un véritable héros en France, malgré l'affaire Festina, malgré ses aveux lors du retentissent procès de Lille, malgré sa suspension pour dopage... Il fallait s'en douter, Virenque a répliqué, méchamment, moquant essentiellement le manque de charisme du nouveau patron du peloton.
Richard Virenque, au micro d'Eurosport. |
L'ancien chouchou du public français des routes de juillet, désormais consultant pour Eurosport, n'a pas apprécié, mais pas du tout, l'une des chroniques de Bradley Wiggins dans le quotidien britannique The Guardian. Le maillot jaune britannique s'étonnait que l'ancien meilleur grimpeur de la Grande Boucle soit toujours considéré comme un véritable héros en France, malgré l'affaire Festina, malgré ses aveux lors du retentissent procès de Lille, malgré sa suspension pour dopage... Il fallait s'en douter, Virenque a répliqué, méchamment, moquant essentiellement le manque de charisme du nouveau patron du peloton.
Tour : punaises, ils ont escamoté le Mur de Péguère!
L’Espagnol Luis-Leon Sanchez remporte l’étape, entre Limoux et Foix (191 km). Le Tour a emprunté pour la première fois le Mur de Péguère, où les favoris ont été incapables de s’attaquer. Des spectateurs se sont vengés…
Foix (Ariège), envoyé spécial.
«On ne trompe pas des yeux avertis.» Nous prêterons cette maxime vélocipédique à quelque littérateur des Illustres, sachant que, dans un peloton, celle-ci n’a pour règle morale que l’expérience et le nombre des années à observer les fessiers des cyclistes en action. A Foix, hier, il suffisait de voir l’Espagnol Luis-Leon Sanchez pour comprendre la matrice secrète dans l’art de pédaler aux frontières de soi-même. Lui, arrive du socle des âmes fortes de l’autre côté des Pyrénées, pas loin, et pourtant, pour sa quatrième victoire d’étapes, à 28 ans, il ne montre ni morgue ni vanité, mais un orgueil en densité rehaussé par l’exploit. Au terme d’une étape de 191 kilomètres disputée entre Limoux et Foix, via le Port de Lers (1re cat.) et le Mur de Péguère (1re cat.), le coureur de Rabobank joua les rescapés solitaires d’une longue échappée de onze courageux (parmi lesquels Sagan, Kruijswijk, Casar, Gilbert, Gautier, Minard, etc.). Le peloton maillot jaune, quant à lui, coupa la ligne avec plus de 18 minutes de retard.
Ascenseur émotionnel. Fini le désoeuvrement stylistique des étapes dites «de plaines» vouées à la monotonie des métronomes laborieux. Quittant les basses-terres, le chronicoeur aime ces envoûtements d’altitude, car l’entrée dans les Pyrénées pourchasse toujours la désorientation latente, même par un froid automnal: moins de 10°.
Cadel Evans, victime de trois crevaisons... |
«On ne trompe pas des yeux avertis.» Nous prêterons cette maxime vélocipédique à quelque littérateur des Illustres, sachant que, dans un peloton, celle-ci n’a pour règle morale que l’expérience et le nombre des années à observer les fessiers des cyclistes en action. A Foix, hier, il suffisait de voir l’Espagnol Luis-Leon Sanchez pour comprendre la matrice secrète dans l’art de pédaler aux frontières de soi-même. Lui, arrive du socle des âmes fortes de l’autre côté des Pyrénées, pas loin, et pourtant, pour sa quatrième victoire d’étapes, à 28 ans, il ne montre ni morgue ni vanité, mais un orgueil en densité rehaussé par l’exploit. Au terme d’une étape de 191 kilomètres disputée entre Limoux et Foix, via le Port de Lers (1re cat.) et le Mur de Péguère (1re cat.), le coureur de Rabobank joua les rescapés solitaires d’une longue échappée de onze courageux (parmi lesquels Sagan, Kruijswijk, Casar, Gilbert, Gautier, Minard, etc.). Le peloton maillot jaune, quant à lui, coupa la ligne avec plus de 18 minutes de retard.
Ascenseur émotionnel. Fini le désoeuvrement stylistique des étapes dites «de plaines» vouées à la monotonie des métronomes laborieux. Quittant les basses-terres, le chronicoeur aime ces envoûtements d’altitude, car l’entrée dans les Pyrénées pourchasse toujours la désorientation latente, même par un froid automnal: moins de 10°.
dimanche 15 juillet 2012
Tour : connaissez-vous le Mur de Péguère?
Après le Grand Colombier, montagne mythique de l’Ain classée hors catégorie, le Tour a innové, ce dimanche 15 juillet, en franchissant cette montée inédite des Pyrénées, classée en 1re catégorie.
Depuis Foix (Ariège).
Le chronicoeur attendait cette journée avec impatience: découvrir le fameux Mur de Péguère (1375 m), dont une partie de la caravane n’arrêtait pas de parler depuis plusieurs jours. Le road-book du Tour est formel: la montée est longue de 9,3 kilomètres à 7,9% de moyenne. La réalité y est plus complexe. Si la première partie de l'ascension s'effectue par le col de Port, très peu sélectives (5-6%), l'escalade vertigineuse de Péguère n’a rien à voir, car elle se situe vraiment dans le col des Cagnous, sur presque quatre kilomètres: 12% de moyenne, avec des passages à 18%!
Le Mur de Péguère était un acte manqué. Car le peloton du Tour devait l’emprunter, en 1973, mais l’étape fut escamotée à la demande du peloton. Les coureurs, dans un état d’épuisement avancé après des étapes dantesques, demandèrent à Luis Ocana en personne de se faire son porte-parole et de demander aux organisateurs de l’annuler de l’étape… Depuis, jamais ce Mur ne fut à l’ordre du jour.
Christian Prudhomme, venu repérer les lieux. |
Le chronicoeur attendait cette journée avec impatience: découvrir le fameux Mur de Péguère (1375 m), dont une partie de la caravane n’arrêtait pas de parler depuis plusieurs jours. Le road-book du Tour est formel: la montée est longue de 9,3 kilomètres à 7,9% de moyenne. La réalité y est plus complexe. Si la première partie de l'ascension s'effectue par le col de Port, très peu sélectives (5-6%), l'escalade vertigineuse de Péguère n’a rien à voir, car elle se situe vraiment dans le col des Cagnous, sur presque quatre kilomètres: 12% de moyenne, avec des passages à 18%!
Le Mur de Péguère était un acte manqué. Car le peloton du Tour devait l’emprunter, en 1973, mais l’étape fut escamotée à la demande du peloton. Les coureurs, dans un état d’épuisement avancé après des étapes dantesques, demandèrent à Luis Ocana en personne de se faire son porte-parole et de demander aux organisateurs de l’annuler de l’étape… Depuis, jamais ce Mur ne fut à l’ordre du jour.
samedi 14 juillet 2012
Tour : au Cap d'Agde, André Greipel se met à nu
L'Allemand André Greipel (Lotto) a remporté au sprint la 13e étape, samedi 14 juillet, entre Saint-Paul-Trois-Châteaux et Le Cap d'Agde (217 km). Abandon de Tony Galopin. Wiggins toujours en jaune.
Depuis Le Cap d’Agde (Hérault).
«Le vélo, c’est un sport de voile», dit souvent Cyrille Guimard. La formule n’est pas qu’ironique. Les rescapés du Tour ont pu s’en apercevoir, ce samedi 14 juillet, dans la grande descente vers la Méditerranée, lorsqu’ils ont affronté un vent si maudit que la fameuse «étape de transition» s’est transformée en journée de toutes les peurs. Et aussi de toutes les étrangetés: celle par exemple de voir le maillot jaune, Bradley Wiggins en personne, mener le peloton pour préparer le sprint de son coéquipier norvégien, Edvald Boasson Hagen (3e).
Durant cette étape de plaine qui, croyez-nous, a rencontré un succès populaire un peu plus visible que ces derniers jours (c'est la vérité), sous la chaleur retrouvée, une échappée de huit coureurs s’était formée en plusieurs temps (Urtasun, Dumoulin, Ladagnous, Morkov et Curvers, Engoulvent et Bouet ensuite, J. Pineau), s’assurant vite près de dix minutes d'avance. En vain. Lorsque survint la seule difficulté du jour, l’ascension tout en rogne du Mont Saint-Clair, sur les hauteurs de Sète (1600 m à 10,2%), placée à 23 km de l'arrivée, tout espoir de victoire en solitaire devenait pratiquement impossible. Car une mini bagarre entre les favoris se déclencha à la faveur d’une attaque de Cadel Evans. Une attaque? Ou plutôt une action désespérée voire désespérante? Car Wiggins, évidemment bien placé, ne demanda même pas le soutient d’un de ses coéquipiers pour revenir au train (pas même à Christopher Froome!). Pas de panique. Aucun signe de lassitude. Le patron contrôle. Pour l'instant.
Depuis Le Cap d’Agde (Hérault).
«Le vélo, c’est un sport de voile», dit souvent Cyrille Guimard. La formule n’est pas qu’ironique. Les rescapés du Tour ont pu s’en apercevoir, ce samedi 14 juillet, dans la grande descente vers la Méditerranée, lorsqu’ils ont affronté un vent si maudit que la fameuse «étape de transition» s’est transformée en journée de toutes les peurs. Et aussi de toutes les étrangetés: celle par exemple de voir le maillot jaune, Bradley Wiggins en personne, mener le peloton pour préparer le sprint de son coéquipier norvégien, Edvald Boasson Hagen (3e).
Durant cette étape de plaine qui, croyez-nous, a rencontré un succès populaire un peu plus visible que ces derniers jours (c'est la vérité), sous la chaleur retrouvée, une échappée de huit coureurs s’était formée en plusieurs temps (Urtasun, Dumoulin, Ladagnous, Morkov et Curvers, Engoulvent et Bouet ensuite, J. Pineau), s’assurant vite près de dix minutes d'avance. En vain. Lorsque survint la seule difficulté du jour, l’ascension tout en rogne du Mont Saint-Clair, sur les hauteurs de Sète (1600 m à 10,2%), placée à 23 km de l'arrivée, tout espoir de victoire en solitaire devenait pratiquement impossible. Car une mini bagarre entre les favoris se déclencha à la faveur d’une attaque de Cadel Evans. Une attaque? Ou plutôt une action désespérée voire désespérante? Car Wiggins, évidemment bien placé, ne demanda même pas le soutient d’un de ses coéquipiers pour revenir au train (pas même à Christopher Froome!). Pas de panique. Aucun signe de lassitude. Le patron contrôle. Pour l'instant.
vendredi 13 juillet 2012
Tour : David Millar, victoire de l'affranchi
Le coureur de chez Garmin a remporté la 12e étape, vendredi 13 juillet, entre Saint-Jean-de-Maurienne et Annonay Davézieux (226 km). Bradley Wiggins toujours en jaune.
Depuis Annonay Davézieux (Ardèche), envoyé spécial.
David Millar est au superlatif celui qui revient. Qui ne cesse de revenir, plutôt. L’Ecossais, qui dispute cette année son onzième Tour de France, a l’image de «repenti» accolée par tous les journalistes (ou presque). La faute à sa suspension de deux ans pour dopage, en 2004. La faute aussi à ses confessions, puisque, à l’époque, il avait tout déballé (et c'est heureux). La faute, surtout, à son investissement pour la lutte antidopage depuis son retour dans le peloton. Le chronicoeur, qui en connaît en rayon en mafias en tout genre, a toujours préféré les affranchis aux repentis. Pour lui Millar est un affranchi, en tant qu'il s’est émancipé de ses démons de jeunesse…
Hier, c’était donc la journée de l'affranchi. Sur la ligne d’arrivée, le Britannique a devancé au sprint le valeureux Français Jean-Christophe Péraud, une centaine de mètres devant leurs trois compagnons d’échappée, dans l'ordre l'Espagnol Egoi Martinez, le Français Cyril Gautier et le Croate Robert Kiserlovski. Le peloton, lui, s'est présenté tout doucettement avec près de huit minutes de retard…
David Millar victorieux. |
David Millar est au superlatif celui qui revient. Qui ne cesse de revenir, plutôt. L’Ecossais, qui dispute cette année son onzième Tour de France, a l’image de «repenti» accolée par tous les journalistes (ou presque). La faute à sa suspension de deux ans pour dopage, en 2004. La faute aussi à ses confessions, puisque, à l’époque, il avait tout déballé (et c'est heureux). La faute, surtout, à son investissement pour la lutte antidopage depuis son retour dans le peloton. Le chronicoeur, qui en connaît en rayon en mafias en tout genre, a toujours préféré les affranchis aux repentis. Pour lui Millar est un affranchi, en tant qu'il s’est émancipé de ses démons de jeunesse…
Hier, c’était donc la journée de l'affranchi. Sur la ligne d’arrivée, le Britannique a devancé au sprint le valeureux Français Jean-Christophe Péraud, une centaine de mètres devant leurs trois compagnons d’échappée, dans l'ordre l'Espagnol Egoi Martinez, le Français Cyril Gautier et le Croate Robert Kiserlovski. Le peloton, lui, s'est présenté tout doucettement avec près de huit minutes de retard…
Tour : la chanson de Rolland s'empare des Alpes
Le Français Pierre Rolland, leader des Europcar, confirme son exceptionnel talent en l’emportant en solitaire dans la montée de La Toussuire, jeudi 12 juillet. Bradley Wiggins est toujours en jaune. Cadel Evans a perdu du temps.
Depuis La Toussuire (Savoie).
Pour tout cycliste qui prétend à l’inopportun sacralisé, l’expérience de la haute montagne procède de l’étrangeté, d’un exil qui serait non pas cheminement sans but mais une forme de savoir-être en course qui voisinerait avec les pulsions les plus extrêmes. Demandez au Français Pierre Rolland (Europcar). En franchissant la ligne d’arrivée, à La Toussuire, seul à la découverte d’un nouveau-monde, tout chez lui se singularisait. La respiration, les césures, la blancheur de l’effort, une certaine pureté de pédalée, sans parler de cette prolifération de puissance réglée par la partition de chair à vif et d’entrailles : un talent brut de brut perché sur un plateau d’alpages. Vivement l’à-venir!
De cette étape courte (148 km) aux accents légendaires, par les cols de la Madeleine (H. cat, 2000 m), de la Croix de Fer (H. cat, 2067 m), du Mollard (2e cat) et de la montée vers La Toussuire (1re cat, 1705 m), le chronicoeur attendait plus d’audace que de grâce, disons un art de grimper qui réveille les éclats et force sinon la décision, du moins le respect.
Pierre Rolland exulte. |
Pour tout cycliste qui prétend à l’inopportun sacralisé, l’expérience de la haute montagne procède de l’étrangeté, d’un exil qui serait non pas cheminement sans but mais une forme de savoir-être en course qui voisinerait avec les pulsions les plus extrêmes. Demandez au Français Pierre Rolland (Europcar). En franchissant la ligne d’arrivée, à La Toussuire, seul à la découverte d’un nouveau-monde, tout chez lui se singularisait. La respiration, les césures, la blancheur de l’effort, une certaine pureté de pédalée, sans parler de cette prolifération de puissance réglée par la partition de chair à vif et d’entrailles : un talent brut de brut perché sur un plateau d’alpages. Vivement l’à-venir!
De cette étape courte (148 km) aux accents légendaires, par les cols de la Madeleine (H. cat, 2000 m), de la Croix de Fer (H. cat, 2067 m), du Mollard (2e cat) et de la montée vers La Toussuire (1re cat, 1705 m), le chronicoeur attendait plus d’audace que de grâce, disons un art de grimper qui réveille les éclats et force sinon la décision, du moins le respect.
jeudi 12 juillet 2012
Tour : les explications de Pierre Rolland après sa victoire
Voici les propos du Français Pierre Rolland lors de sa conférence de presse, après sa formidable victoire, au sommet de La Toussuire.
Depuis La Toussuire (Savoie).
"Roi des Alpes? C'est quand on a gagné dix foix. J'ai vingt-cinq ans et j'ai gagné deux fois. Ca fait six mois que je rêvais de cette étape. Elle me hantait depuis la présentation. C'était l'étape la plus dure. Et la plus belle. Son profil ressemblait beaucoup à celui de l'Alpe (d'Huez). J'avais imaginé tous les scénarios. Je suis allé au bout de moi-même. Je n'avais plus de jambes, seulement la tête. L'année dernière, j'avais gagné en jouant tactique contre (Samuel) Sanchez et (Alberto) Contador. Là il fallait que j'assume d'être favori dans l'échappée. Dans les derniers kilomètres, j'ai pensé à tous les sacrifices que j'ai fait depuis six mois. J'étais conditionné, c'était tout pour le vélo. Je n'ai pas vu mes amis, pas un anniversaire. A force de marteler... Ce matin, j'ai encore parlé à mon entraîneur qui me disait "là, fait comme ci, et là fait comme ça". Ce matin, dès que je suis entré dans le bus, on m'a dit "c'est ton tour, c'est ton tour !". J'avais reçu quantité de messages me disant "c'est ton étape". En fait on pense à plein de choses. A Virenque qui communiait avec le public...
"Ma chute dans la descente du Col du Mollard, ce n'était pas grand chose, ça ne pouvait pas me déstabiliser. J'ai juste pensé à ma maman en me disant "pourvu qu'elle ne regarde pas.
Depuis La Toussuire (Savoie).
"Roi des Alpes? C'est quand on a gagné dix foix. J'ai vingt-cinq ans et j'ai gagné deux fois. Ca fait six mois que je rêvais de cette étape. Elle me hantait depuis la présentation. C'était l'étape la plus dure. Et la plus belle. Son profil ressemblait beaucoup à celui de l'Alpe (d'Huez). J'avais imaginé tous les scénarios. Je suis allé au bout de moi-même. Je n'avais plus de jambes, seulement la tête. L'année dernière, j'avais gagné en jouant tactique contre (Samuel) Sanchez et (Alberto) Contador. Là il fallait que j'assume d'être favori dans l'échappée. Dans les derniers kilomètres, j'ai pensé à tous les sacrifices que j'ai fait depuis six mois. J'étais conditionné, c'était tout pour le vélo. Je n'ai pas vu mes amis, pas un anniversaire. A force de marteler... Ce matin, j'ai encore parlé à mon entraîneur qui me disait "là, fait comme ci, et là fait comme ça". Ce matin, dès que je suis entré dans le bus, on m'a dit "c'est ton tour, c'est ton tour !". J'avais reçu quantité de messages me disant "c'est ton étape". En fait on pense à plein de choses. A Virenque qui communiait avec le public...
"Ma chute dans la descente du Col du Mollard, ce n'était pas grand chose, ça ne pouvait pas me déstabiliser. J'ai juste pensé à ma maman en me disant "pourvu qu'elle ne regarde pas.
Tour : Thomas Voeckler adoubé par le Grand Colombier
Enorme numéro du Français de l’équipe Europcar, mercredi 11 juillet. Il remporte l’étape et s’empare du maillot à pois après avoir franchi en tête le « Géant du Bugey », la montagne mythique de l’Ain. Wiggins toujours en jaune.
Depuis Bellegarde-sur-Valserine (Ain).
Vertiges. En mode populaire et onirique. «Mais si, on l’a gravi cette année-là. / Rappelle-toi, y’avait un vent à décorner nos boeufs.» La montagne offre une revanche aux hommes de mémoire. «On s’était même arrêté deux fois. / C’était avec la R16, en quelle année déjà?» La vérité nue surgit d’une anfractuosité de la route qui serpente. Les visages s’éblouissent et les yeux scrutent, à l’horizon, une beauté panoramique unique en son genre. Le Grand Colombier? «C’est notre Ventoux à nous. / Mais n’écrivez pas qu’ici ce sont les Alpes, sinon on vous redescend sur le cul!» De ce sommet situé géographiquement dans le Bugey, tout au sud du massif du Jura, le point de vue à 360° y est toujours plus grandiose qu’imaginé. En contrebas, nous apercevons, le lac du Bourget, alangui, et le Rhône moins paisible à ses pieds. Plus au loin, le Jura suisse, la chaîne du Mont Blanc, quelques pics italiens, la Vanoise, la Belledonne, et puis la Dombes et ses mille étangs, les monts du Beaujolais et du Lyonnais, le massif du Pilat, la vallée du Rhône, enfin, scintillants comme des prunelles, les deux autres grands lacs alpins, Annecy et Léman. La mesure du monde dans ses grandeurs.
La voilà donc, cette fameuse montée inédite du Tour classée hors catégorie, qui culmine à 1501 mètres pour la route, à 1531 mètres pour l’immense croix érigée sur la bosse sommitale. Dix-huit kilomètres de grimpette à 7,1% de moyenne, avec des passages à 14% dans la partie d’asphalte taillée dans la roche où l’air vient à manquer les jours de plein soleil.
Depuis Bellegarde-sur-Valserine (Ain).
Vertiges. En mode populaire et onirique. «Mais si, on l’a gravi cette année-là. / Rappelle-toi, y’avait un vent à décorner nos boeufs.» La montagne offre une revanche aux hommes de mémoire. «On s’était même arrêté deux fois. / C’était avec la R16, en quelle année déjà?» La vérité nue surgit d’une anfractuosité de la route qui serpente. Les visages s’éblouissent et les yeux scrutent, à l’horizon, une beauté panoramique unique en son genre. Le Grand Colombier? «C’est notre Ventoux à nous. / Mais n’écrivez pas qu’ici ce sont les Alpes, sinon on vous redescend sur le cul!» De ce sommet situé géographiquement dans le Bugey, tout au sud du massif du Jura, le point de vue à 360° y est toujours plus grandiose qu’imaginé. En contrebas, nous apercevons, le lac du Bourget, alangui, et le Rhône moins paisible à ses pieds. Plus au loin, le Jura suisse, la chaîne du Mont Blanc, quelques pics italiens, la Vanoise, la Belledonne, et puis la Dombes et ses mille étangs, les monts du Beaujolais et du Lyonnais, le massif du Pilat, la vallée du Rhône, enfin, scintillants comme des prunelles, les deux autres grands lacs alpins, Annecy et Léman. La mesure du monde dans ses grandeurs.
La voilà donc, cette fameuse montée inédite du Tour classée hors catégorie, qui culmine à 1501 mètres pour la route, à 1531 mètres pour l’immense croix érigée sur la bosse sommitale. Dix-huit kilomètres de grimpette à 7,1% de moyenne, avec des passages à 14% dans la partie d’asphalte taillée dans la roche où l’air vient à manquer les jours de plein soleil.
mercredi 11 juillet 2012
Dopage : Lance Armstrong cerné de toute part
En France, Di Grégorio est toujours en garde à vue. Aux Etats-Unis, l'étau se resserre autour du septuple vainqueur. Trois de ses proches ont été suspendus à vie...
Depuis Bellegarde (Ain).
D’abord, des nouvelles de Rémy Di Grégorio. A l'inverse de l'un des trois hommes interpellés hier dans une affaire présumée de dopage, lequel a été remis en liberté, le coureur de Cofidis, ainsi qu’un «naturopathe» de 75 ans (sic), restent actuellement en garde à vue, à Marseille. Les deux hommes, entendus par les gendarmes de l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP) et de la section de recherches phocéenne, pourraient être présentés rapidement à la juge Annaïck Le Goff, à l'issue des 48 heures de garde à vue, pour une éventuelle mise en examen. L'enquête ayant abouti à l'arrestation du grimpeur français, suspendu par son équipe, avait été ouverte le 28 juin 2011 et porte initialement sur l'ancienne formation de Rémy Di Grégorio, l'équipe kazakhe Astana. Comme vous le savez, ce sont des écoutes téléphoniques qui ont fait rebondir le dossier et conduit aux trois interpellations de mardi. Sachez par ailleurs que des analyses sont en cours pour déterminer si les produits suspects retrouvés dans un véhicule, à Bourg-en-Bresse, près de l’hôtel des Cofidis, sont des produits dopants…
Et maintenant, des nouvelles de Lance Armstrong – dont la statue n'en finit plus de vaciller. Après les révélations du journal néerlandais De Telegraaf, affirmant que quatre de ses anciens équipiers (Hincapie, Leipheimer, Vande Velde et Zabriskie, tous présents sur le Tour) avaient reconnu s’être dopés, écopant seulement de six mois de suspension, ce sont aujourd'hui des faits bien plus graves qui viennent assombrir l'avenir de l'ancien septuple vainqueur du Tour... Trois de ses proches viennent en effet d'écoper d'une suspension à vie, infligée mardi 10 juillet par l'agence antidopage américaine (Usada), qui a levé le voile sur un dopage organisé au sein de l'US Postal au temps des victoires de l'Américain sur le Tour de France.
Depuis Bellegarde (Ain).
D’abord, des nouvelles de Rémy Di Grégorio. A l'inverse de l'un des trois hommes interpellés hier dans une affaire présumée de dopage, lequel a été remis en liberté, le coureur de Cofidis, ainsi qu’un «naturopathe» de 75 ans (sic), restent actuellement en garde à vue, à Marseille. Les deux hommes, entendus par les gendarmes de l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP) et de la section de recherches phocéenne, pourraient être présentés rapidement à la juge Annaïck Le Goff, à l'issue des 48 heures de garde à vue, pour une éventuelle mise en examen. L'enquête ayant abouti à l'arrestation du grimpeur français, suspendu par son équipe, avait été ouverte le 28 juin 2011 et porte initialement sur l'ancienne formation de Rémy Di Grégorio, l'équipe kazakhe Astana. Comme vous le savez, ce sont des écoutes téléphoniques qui ont fait rebondir le dossier et conduit aux trois interpellations de mardi. Sachez par ailleurs que des analyses sont en cours pour déterminer si les produits suspects retrouvés dans un véhicule, à Bourg-en-Bresse, près de l’hôtel des Cofidis, sont des produits dopants…
Lance Armstrong. |
Tour : simple comme un coup de fil, le flag !
En plein Tour, le Français Rémy Di Grégorio (Cofidis) a été interpellé dans le cadre d’une enquête pour « trafic de produits dopants en bande organisée ».
Depuis Mâcon (Saône-et-Loire).
Le chronicœur avait les cheveux en bataille et les idées toutes chiffonnées. Triste routine. Pour une impression de déjà-vu. Hier matin, des policiers et des gendarmes de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement (Oclaesp) ont profité de la journée de repos pour débarquer sans prévenir à l’hôtel de l’équipe Cofidis, à Bourg-en-Bresse, à la demande du juge d’instruction du pôle santé de Marseille, Annaïck Le Goff. Dans leur filet, le coureur Français Rémy Di Grégorio, vingt-sept ans, interpellé et placé en garde à vue pour une «affaire présumée de dopage». Le dossier, ouvert l’an dernier, « connaît une actualité ces derniers jours », ce qui vaut à deux autres hommes d’avoir été, eux aussi, placés en garde à vue, à Marseille (1).
Rémy Di Grégorio. |
Le chronicœur avait les cheveux en bataille et les idées toutes chiffonnées. Triste routine. Pour une impression de déjà-vu. Hier matin, des policiers et des gendarmes de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement (Oclaesp) ont profité de la journée de repos pour débarquer sans prévenir à l’hôtel de l’équipe Cofidis, à Bourg-en-Bresse, à la demande du juge d’instruction du pôle santé de Marseille, Annaïck Le Goff. Dans leur filet, le coureur Français Rémy Di Grégorio, vingt-sept ans, interpellé et placé en garde à vue pour une «affaire présumée de dopage». Le dossier, ouvert l’an dernier, « connaît une actualité ces derniers jours », ce qui vaut à deux autres hommes d’avoir été, eux aussi, placés en garde à vue, à Marseille (1).
mardi 10 juillet 2012
Tour : les explications d'Yvon Sanquer devant la presse
Lors d'une conférence de presse, le manager de Cofidis a laissé planer peu de doutes sur la véracité des faits de dopage reprochés à Rémy Di Grégorio, après son interpellation dans le cadre d'une enquête remontant à plus d'un an, quand il était encore chez Astana, l'équipe kazakhe.
Les faits reprochés à Rémy Di Gregorio, en garde à vue pour présomption de dopage dans le cadre d'une affaire impliquant son ancienne équipe, Astana, seraient «les actes d'un coureur (qui) s'est égaré mais ça ne remet pas en cause l'équipe en soi», a déclaré Yvon Sanquer, le manager de l'équipe Cofidis. Celui-ci a affirmé que le grimpeur «a été interpellé à l'hôtel de manière tout a fait confidentielle. Le staff ne l'a pas appris tout de suite et on a informé les coureurs lors de leur retour d'un décrassage. Cette info a été reçue de façon douloureuse, avec des larmes.»
Il a poursuivi: «A mon avis, Rémy n'a pas mesuré l'ampleur et la gravité de ce qu'il faisait. A un moment, il y a une fragilité avec un passage à l'acte qui fait basculer. (...) S'ils (les gendarmes de l'Office central contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique, NDLR) ont agi, c'est que c'est important. Une perquisition a été effectuée... il est possible que des produits aient pu être saisis. Je ne sais pas quels produits cela peut être. (...) Il y a des coureurs qui ne comprendront jamais les messages qu'on leur passe. C'est du gâchis pour le coureur. C'est une trahison pour l'équipe et le partenaire qui vient de se réengager il y a un mois. Nous sommes tous consternés. Ce sont des choses qui assillent l'ensemble de l'équipe, qu'il faut analyser à froid.»
L'équipe Cofidis poursuivra sa route, mercredi matin. Sans Rémy Di Gregorio, suspendu.
Yvon Sanquer, lors de sa conférence de presse. |
Il a poursuivi: «A mon avis, Rémy n'a pas mesuré l'ampleur et la gravité de ce qu'il faisait. A un moment, il y a une fragilité avec un passage à l'acte qui fait basculer. (...) S'ils (les gendarmes de l'Office central contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique, NDLR) ont agi, c'est que c'est important. Une perquisition a été effectuée... il est possible que des produits aient pu être saisis. Je ne sais pas quels produits cela peut être. (...) Il y a des coureurs qui ne comprendront jamais les messages qu'on leur passe. C'est du gâchis pour le coureur. C'est une trahison pour l'équipe et le partenaire qui vient de se réengager il y a un mois. Nous sommes tous consternés. Ce sont des choses qui assillent l'ensemble de l'équipe, qu'il faut analyser à froid.»
L'équipe Cofidis poursuivra sa route, mercredi matin. Sans Rémy Di Gregorio, suspendu.
Tour : les Sky ont-ils déjà course gagnée?
Avant l'entrée dans les Alpes, la Grande Boucle semble assommée par les performances de l'équipe de Wiggins et Froome...
Depuis Mâcon (Saône-et-Loire).
La méthode Assimil du Wiggins et du Sky dans le texte donne des indigestions au chronicoeur, qui n'a pas besoin de ça pour faire des nuits blanches... Alors, après les idées noires (celles de "l'affaire" Di Grégorio) qui nous ont occupés toute cette journée de repos, à Mâcon, pensons utile un bref instant, alors que le Tour va entrer dans sa deuxième partie. Oui ou non, devons-nous considérer que l’oeuvre vélocipédique de Bradley Wiggins et consorts a d’ores et déjà scellé le sort de la course? Reconnaissons que le rouleau compresseur Sky n’a pas seulement assommé la concurrence, il a aussi brouillé toute idée de suspense. La Sky nous est tombé sur la tête et ce n’est pas Cyrille Guimard, avec la franchise qu’on lui connaît, qui allait nous réconforter: «Evans ne peut plus gagner l’épreuve, assène-t-il. Et il y a ce nouvel invité, Christopher Froome. Il se rapproche dangereusement de la 2e place. Que ce soit avec Wiggins ou avec Froome, Sky ne peut pas perdre le Tour…» Il n'y a donc rien à attendre? Réponse de Cyrille: «Tout est toujours possible sur trois semaines. Mais ce n'est pas l'hypothèse que je priviligierai...» Avec un éclat de rire pour ponctuer sa phrase, bien entendu.
Le train noir des Sky reste donc la valeur sûre du peloton, avec Porte et Rogers en lieutenants. Mais chacun l’a bien compris, l’atout maître du maillot jaune n’est autre que son coéquipier, Christopher Froome, dauphin de Cobo Acebo sur la dernière Vuelta, et à nouveau second du chrono lundi. «Le plus fort», selon Guimard.
La méthode Assimil du Wiggins et du Sky dans le texte donne des indigestions au chronicoeur, qui n'a pas besoin de ça pour faire des nuits blanches... Alors, après les idées noires (celles de "l'affaire" Di Grégorio) qui nous ont occupés toute cette journée de repos, à Mâcon, pensons utile un bref instant, alors que le Tour va entrer dans sa deuxième partie. Oui ou non, devons-nous considérer que l’oeuvre vélocipédique de Bradley Wiggins et consorts a d’ores et déjà scellé le sort de la course? Reconnaissons que le rouleau compresseur Sky n’a pas seulement assommé la concurrence, il a aussi brouillé toute idée de suspense. La Sky nous est tombé sur la tête et ce n’est pas Cyrille Guimard, avec la franchise qu’on lui connaît, qui allait nous réconforter: «Evans ne peut plus gagner l’épreuve, assène-t-il. Et il y a ce nouvel invité, Christopher Froome. Il se rapproche dangereusement de la 2e place. Que ce soit avec Wiggins ou avec Froome, Sky ne peut pas perdre le Tour…» Il n'y a donc rien à attendre? Réponse de Cyrille: «Tout est toujours possible sur trois semaines. Mais ce n'est pas l'hypothèse que je priviligierai...» Avec un éclat de rire pour ponctuer sa phrase, bien entendu.
Le train noir des Sky reste donc la valeur sûre du peloton, avec Porte et Rogers en lieutenants. Mais chacun l’a bien compris, l’atout maître du maillot jaune n’est autre que son coéquipier, Christopher Froome, dauphin de Cobo Acebo sur la dernière Vuelta, et à nouveau second du chrono lundi. «Le plus fort», selon Guimard.
Wiggins : l'horloger du Tour démonte le temps
Comme prévu, le porteur du maillot jaune a écrasé le contre-la-montre de 41,5 kilomètres, hier à Besançon, patrie de l’horlogerie. Son équipier Christopher Froome finit deuxième. Les autres favoris du Tour sont loin…
Depuis Besançon (Doubs).
«La vie n’est qu’une longue perte de tout ce qu’on aime.» Les mots de Victor Hugo, né ici, claquent au vent. Depuis les sommets de la citadelle Vauban, l’histoire se rappelle soudain à sa substance, à rebours des lieux communs qui tiennent lieu de dossards. Le chronicoeur, qui cherche à changer d’altitude, a donc décidé de son propre chef de gravir la ville pour voir Besançon de tout là-haut, avec, dans sa musette, les Actes et paroles du grand poète. La caravane du Tour paraît si petite à mesure qu’on s’en éloigne, si grande quand on y pense toujours…
Dans la patrie de l’horlogerie, Bradley Wiggins (Sky), lui, voulait remonter sa mécanique pour démonter le temps. Car il y pensait depuis longtemps, à ce contre-la-montre entre Arc-et-Senans et Besançon, 41,5 kilomètres. Sous l’onctuosité de son corps longiligne, avec sa façon virtuose d’effleurer la grâce, l’Anglais a traversé l’effort solitaire comme nous nous y attendions : en dominateur impassible et régulier. Mais il n’était pas seul maître es chrono. L’autre longiligne – mais explosif – coureur de l’équipe Sky, Christopher Froome, a lui aussi confirmé l’ampleur de son talent en s’octroyant la deuxième place, à 35’’ de son aîné. Deux Anglais font main basse sur le Tour. Et derrière, un semblant de déluge. Cadel Evans lâche 1’43’’, Vincenzo Nibali, Denis Menchov et Andreas Klöden plus de 2’… «Maintenant, pour déloger Wiggins, il en faudra beaucoup, car dans la tête c’est du solide», soupirait Sylvain Chavanel, étonnant 5e de l’étape à 1’24’’.
Depuis Besançon (Doubs).
«La vie n’est qu’une longue perte de tout ce qu’on aime.» Les mots de Victor Hugo, né ici, claquent au vent. Depuis les sommets de la citadelle Vauban, l’histoire se rappelle soudain à sa substance, à rebours des lieux communs qui tiennent lieu de dossards. Le chronicoeur, qui cherche à changer d’altitude, a donc décidé de son propre chef de gravir la ville pour voir Besançon de tout là-haut, avec, dans sa musette, les Actes et paroles du grand poète. La caravane du Tour paraît si petite à mesure qu’on s’en éloigne, si grande quand on y pense toujours…
Dans la patrie de l’horlogerie, Bradley Wiggins (Sky), lui, voulait remonter sa mécanique pour démonter le temps. Car il y pensait depuis longtemps, à ce contre-la-montre entre Arc-et-Senans et Besançon, 41,5 kilomètres. Sous l’onctuosité de son corps longiligne, avec sa façon virtuose d’effleurer la grâce, l’Anglais a traversé l’effort solitaire comme nous nous y attendions : en dominateur impassible et régulier. Mais il n’était pas seul maître es chrono. L’autre longiligne – mais explosif – coureur de l’équipe Sky, Christopher Froome, a lui aussi confirmé l’ampleur de son talent en s’octroyant la deuxième place, à 35’’ de son aîné. Deux Anglais font main basse sur le Tour. Et derrière, un semblant de déluge. Cadel Evans lâche 1’43’’, Vincenzo Nibali, Denis Menchov et Andreas Klöden plus de 2’… «Maintenant, pour déloger Wiggins, il en faudra beaucoup, car dans la tête c’est du solide», soupirait Sylvain Chavanel, étonnant 5e de l’étape à 1’24’’.
lundi 9 juillet 2012
Tour : Bradley Wiggins et la question qui fâche...
Quand le maillot jaune quitte la conférence de presse. Fâché. Mais pourquoi comparer l'équipe Sky à l'US Postal, aussi ?
Depuis Besançon (Doubs).
La scène, plutôt inattendue, s'est déroulée en conférence de presse. Jusque-là, tout allait bien et Bradley Wiggins, affable comme souvent, répondait aux questions sans broncher et sans se forcer. Et puis, l'incident. Soudain, le flegme de l'Anglais s'est mis de travers lorsqu'un scribouillard américain (forcément scribouillard), auquel il aurait bien fait avaler tout ce qui lui passait sous la main, même son vélo et pourquoi pas le bus qui va avec, lui demanda: "Comment réagissez-vous quand on compare votre équipe (Sky, NDLR) à l'US Postal des années Armstrong?"
Et là, ce fut un autre homme. La blancheur légendaire de son visage vira au rouge (de colère), son corps se mit à frissonner et il répondit du tac au tac, sans plus chercher ses mots: "C'est une putain de question et je ne peux pas admettre qu'on puisse dire cela! Je n'ai pas à perdre mon temps avec de telles stupidités. Il faut vraiment être débile pour penser une telle chose.» Imaginez-le ou non, mais sur ces paroles énervées, le maillot jaune a quitté la scène et la conférence de presse avec. Croyez-moi, je n'ai pas souvenir qu'un cycliste - sauf peut-être Lance Armstrong, et encore - ait ainsi déserté cet exercice obligé sur les routes du Tour. Et voilà comment nous nous sommes temporairement quittés avec Bradley Wiggins, qui n'a donc plus à nous montrer son caractère.
Mais au fait. Comparer l'équipe Sky avec l'US Postal, comme je l'ai fait moi-même dans un article, est-ce si déraisonnable?
Depuis Besançon (Doubs).
La scène, plutôt inattendue, s'est déroulée en conférence de presse. Jusque-là, tout allait bien et Bradley Wiggins, affable comme souvent, répondait aux questions sans broncher et sans se forcer. Et puis, l'incident. Soudain, le flegme de l'Anglais s'est mis de travers lorsqu'un scribouillard américain (forcément scribouillard), auquel il aurait bien fait avaler tout ce qui lui passait sous la main, même son vélo et pourquoi pas le bus qui va avec, lui demanda: "Comment réagissez-vous quand on compare votre équipe (Sky, NDLR) à l'US Postal des années Armstrong?"
Et là, ce fut un autre homme. La blancheur légendaire de son visage vira au rouge (de colère), son corps se mit à frissonner et il répondit du tac au tac, sans plus chercher ses mots: "C'est une putain de question et je ne peux pas admettre qu'on puisse dire cela! Je n'ai pas à perdre mon temps avec de telles stupidités. Il faut vraiment être débile pour penser une telle chose.» Imaginez-le ou non, mais sur ces paroles énervées, le maillot jaune a quitté la scène et la conférence de presse avec. Croyez-moi, je n'ai pas souvenir qu'un cycliste - sauf peut-être Lance Armstrong, et encore - ait ainsi déserté cet exercice obligé sur les routes du Tour. Et voilà comment nous nous sommes temporairement quittés avec Bradley Wiggins, qui n'a donc plus à nous montrer son caractère.
Mais au fait. Comparer l'équipe Sky avec l'US Postal, comme je l'ai fait moi-même dans un article, est-ce si déraisonnable?
Tour : c'est Pinot, Bradley et ses potes in the Sky !
Après la moyenne montagne, l’Anglais Bradley Wiggins porte le maillot jaune et peut compter sur une équipe pour l’instant surpuissante. Pierre Rolland tente de limiter la casse. Hier, Thibaut Pinot a donné sa première victoire à la France.
Depuis Porrentruy (Suisse).
«Faire premier français d’une étape ou du général, ce n’est pas le classement qui m’intéresse.» La nostalgie, mère nourricière du peuple du vélo, retrouve parfois des échos valeureux. Pierre Rolland, le leader d’Europcar, a l’ambition des champions insensés qui refusent le métronomique et le programmable. Sous le cycliste avéré, l’homme complet est déjà là, bien planté sur ses convictions, dans l’expression de ses sentiments et même, divines qualités, dans le courage et l’abnégation. Après la première «lessive» du Tour au sommet de La Planche-des-Belles-Filles, le protégé de Jean-René Bernaudeau aurait dû savourer. Septième de l’étape, avec cette ondulation des reins comme pour amortir les chocs, il fut en effet le seul Français à se hisser parmi les meilleurs, ne concédant que peu de temps aux ténors déclarés. «Le soutien du public m’a rendu plus fort dans la souffrance», affirmait-il. Il repensait aux séquelles de sa chute vers Metz. Dans sa vérité nue, malgré un coude meurtri et un organisme brinquebalé, il était l’un des rares à résister à l’armada Sky.
Car depuis ce week-end, le Tour s’est élevé en s’informant de son propre mystère. Un mystère très actuel, au nom bref et trois lettres qui claquent au-dessus de nos têtes : Sky. Lors de la vraie première ascension (1), l’équipe britannique a singé le passé. Au plus fort de la pente (6 km à 6,4% de moyenne), lorsque la sélection naturelle devint la règle des plus forts, l’allure infernale des Sky nous projeta en arrière. Nous crûmes revoir l’US Postal ou la Deutsch Telekom.
Depuis Porrentruy (Suisse).
«Faire premier français d’une étape ou du général, ce n’est pas le classement qui m’intéresse.» La nostalgie, mère nourricière du peuple du vélo, retrouve parfois des échos valeureux. Pierre Rolland, le leader d’Europcar, a l’ambition des champions insensés qui refusent le métronomique et le programmable. Sous le cycliste avéré, l’homme complet est déjà là, bien planté sur ses convictions, dans l’expression de ses sentiments et même, divines qualités, dans le courage et l’abnégation. Après la première «lessive» du Tour au sommet de La Planche-des-Belles-Filles, le protégé de Jean-René Bernaudeau aurait dû savourer. Septième de l’étape, avec cette ondulation des reins comme pour amortir les chocs, il fut en effet le seul Français à se hisser parmi les meilleurs, ne concédant que peu de temps aux ténors déclarés. «Le soutien du public m’a rendu plus fort dans la souffrance», affirmait-il. Il repensait aux séquelles de sa chute vers Metz. Dans sa vérité nue, malgré un coude meurtri et un organisme brinquebalé, il était l’un des rares à résister à l’armada Sky.
Car depuis ce week-end, le Tour s’est élevé en s’informant de son propre mystère. Un mystère très actuel, au nom bref et trois lettres qui claquent au-dessus de nos têtes : Sky. Lors de la vraie première ascension (1), l’équipe britannique a singé le passé. Au plus fort de la pente (6 km à 6,4% de moyenne), lorsque la sélection naturelle devint la règle des plus forts, l’allure infernale des Sky nous projeta en arrière. Nous crûmes revoir l’US Postal ou la Deutsch Telekom.
dimanche 8 juillet 2012
Tour : voulez-vous des nouvelles de Jan Ullrich ?
L’ancien vainqueur du Tour 1997, englué dans les affaires et condamné en début d'année, fait enfin son mea culpa. Pour la première fois, il vient d’avouer qu'il s'était dopé…
Depuis Porrentruy (Suisse).
L’agence de presse allemande DPA rapporte la scène. Réalisant une interview de l’ancienne idole de tout un peuple, Jan Ullrich a fini par lâcher une confession qui n’est pas passée inaperçue sur le Tour de France… A la question du journaliste de DPA, « était-il possible de réussir de grandes performances sans dopage?», l’ancien leader des Telekom, vainqueur du Tour 1997 et deuxième à quatre reprises, a répondu immédiatement: «Non. Et cela vaut aussi pour moi.» Le décor est planté. L’aveu est scellé.
Le monde du cyclisme attendait cela depuis dix ans… Lucide, Jan Ullrich précise ses pensées en ces terme: «J’ai toujours pensé que Lance était traité de manière un peu avantageuse, on voit maintenant qu’il n’en est rien. On s’attaque également durement à lui. Il reste que dans son cas, celui de Contador ou le mien, trop de temps s’écoule avant une décision de justice. S’il y a des preuves contre un coureur, il faut les mettre sur la table et juger sans délai. Au lieu de cela, certaines procédures traînent plus de dix ans! Ce n’est pas acceptable.»
Depuis Porrentruy (Suisse).
L’agence de presse allemande DPA rapporte la scène. Réalisant une interview de l’ancienne idole de tout un peuple, Jan Ullrich a fini par lâcher une confession qui n’est pas passée inaperçue sur le Tour de France… A la question du journaliste de DPA, « était-il possible de réussir de grandes performances sans dopage?», l’ancien leader des Telekom, vainqueur du Tour 1997 et deuxième à quatre reprises, a répondu immédiatement: «Non. Et cela vaut aussi pour moi.» Le décor est planté. L’aveu est scellé.
Le monde du cyclisme attendait cela depuis dix ans… Lucide, Jan Ullrich précise ses pensées en ces terme: «J’ai toujours pensé que Lance était traité de manière un peu avantageuse, on voit maintenant qu’il n’en est rien. On s’attaque également durement à lui. Il reste que dans son cas, celui de Contador ou le mien, trop de temps s’écoule avant une décision de justice. S’il y a des preuves contre un coureur, il faut les mettre sur la table et juger sans délai. Au lieu de cela, certaines procédures traînent plus de dix ans! Ce n’est pas acceptable.»
samedi 7 juillet 2012
Tour : Wiggins et les Sky se mettent à La Planche...
Après une performance collective de son équipe, le Britannique Bradley Wiggins s’empare du maillot jaune. Première lessive du Tour 2012 : seuls Evans et Nibali semblent au niveau...
Depuis La Planche-des-Belles-Filles (Haute-Saône).
Commençons par une évidence: inutile d’évoquer ici les perdants du jour, ils sont tellement nombreux qu’un annuaire ne suffirait à l’énumération. Entre Tomblaine, dans les faubourgs de Nancy, et l’arrivée au sommet de la montée inédite de La Planche des Belle Filles, un peu au-dessus de 1000 mètres d’altitude, le chronicoeur, un rien étonné, admettons-le, a assisté ce samedi 7 juillet à un écrémage en règle façon grands tours de manivelles et cuisine au beurre. A l’origine de ce premier fracas du peloton 2012, l’équipe Sky de Bradley Wiggins. Pris dans leurs petits pronostics du matin, beaucoup de suiveurs avaient la certitude que le Britannique, grand favori du Tour, ne ferait rien pour s’emparer du maillot jaune trop tôt. Les circonstances ont contredit cette hypothèse.
Dès le tout début de la rampe de la première grande difficulté du Tour, une montée de 6 km à 6,4% de moyenne, classée en 1re catégorie, nous avons constaté ce que nous redoutions: l’équipe Sky est non seulement au rendez-vous, mais elle est bel et bien en posture d’hégémonie, à l’heure où les choses sérieuses débutent, enfin. Avec Wiggins, Boasson Hagen, Cevendish, Eisel, Froome, Knees, Porte, Rogers et Siutsou (ce dernier a abandonné), le team dirigé par Sean Yates avait de quoi provoquer quelques frayeurs: elle fait cette fois carrément peur. En menant grand train durant toute l’ascension avec cinq de ses équipiers, sans que, à aucun moment, un coureur d’une autre équipe puisse attaquer ou en ait le courage, Bradley Wiggins a ainsi montré qu’il disposait autour de lui d’une armada capable de tuer le suspense. En quelques kilomètres, l’Anglais a donc fait main basse sur le Maillot Jaune à deux jours du premier chrono du Tour (41 km!), où il pourrait creuser de grands écarts.
Depuis La Planche-des-Belles-Filles (Haute-Saône).
Commençons par une évidence: inutile d’évoquer ici les perdants du jour, ils sont tellement nombreux qu’un annuaire ne suffirait à l’énumération. Entre Tomblaine, dans les faubourgs de Nancy, et l’arrivée au sommet de la montée inédite de La Planche des Belle Filles, un peu au-dessus de 1000 mètres d’altitude, le chronicoeur, un rien étonné, admettons-le, a assisté ce samedi 7 juillet à un écrémage en règle façon grands tours de manivelles et cuisine au beurre. A l’origine de ce premier fracas du peloton 2012, l’équipe Sky de Bradley Wiggins. Pris dans leurs petits pronostics du matin, beaucoup de suiveurs avaient la certitude que le Britannique, grand favori du Tour, ne ferait rien pour s’emparer du maillot jaune trop tôt. Les circonstances ont contredit cette hypothèse.
Dès le tout début de la rampe de la première grande difficulté du Tour, une montée de 6 km à 6,4% de moyenne, classée en 1re catégorie, nous avons constaté ce que nous redoutions: l’équipe Sky est non seulement au rendez-vous, mais elle est bel et bien en posture d’hégémonie, à l’heure où les choses sérieuses débutent, enfin. Avec Wiggins, Boasson Hagen, Cevendish, Eisel, Froome, Knees, Porte, Rogers et Siutsou (ce dernier a abandonné), le team dirigé par Sean Yates avait de quoi provoquer quelques frayeurs: elle fait cette fois carrément peur. En menant grand train durant toute l’ascension avec cinq de ses équipiers, sans que, à aucun moment, un coureur d’une autre équipe puisse attaquer ou en ait le courage, Bradley Wiggins a ainsi montré qu’il disposait autour de lui d’une armada capable de tuer le suspense. En quelques kilomètres, l’Anglais a donc fait main basse sur le Maillot Jaune à deux jours du premier chrono du Tour (41 km!), où il pourrait creuser de grands écarts.
Tour : pour ou contre les oreillettes? Voici ce qu'en pense Cyrille Guimard
Après la terrifiante chute dans l'étape vers Metz, vendredi 6 juillet, plusieurs coureurs, dont Thomas Voeckler, ont fortement critiqué l'utilisation des oreillettes. Voici l'opinion de Cyrille Guimard sur la question.
« Les grandes courses à étapes, nous ne pouvions pas les gagner si notre groupe n’avait pas une autonomie et une conscience de ce qu’il fallait faire individuellement et collectivement.
C’est ce que je reproche le plus aux oreillettes, vous savez, ces dispositifs ''radio'' qui maintiennent un fil à la patte aux coureurs pour mieux les laisser dans leur condition d’exécutants, pour ne pas dire d’esclaves… On me parle de stratégie, de stratégie, mais à quoi sert la stratégie dorénavant, quand les coureurs ressemblent à des robots de jeu vidéo, téléguidés à distance par des mecs qui sont bien heureux de ne pas voir leur petite science contestée par éventuellement plus intelligents qu’eux...
Aujourd’hui, les directeurs sportifs n’ont plus besoin d’expliquer la course – quand ils la comprennent – ils disent juste à leurs coureurs de rouler, ou de ne pas rouler, et le tour est joué. Je n’irai pas jusqu’à dire qu’avec ces conneries on ne forme plus que des exécutants soumis, mais ce n’est plus très loin. On ne cherche pas à faire réfléchir les coureurs, c’est un crime à l’esprit du cyclisme, à la spontanéité des hommes. Plus pervers encore, les oreillettes sont carrément devenues un formidable alibi pour les coureurs : si ça se passe mal, qui est responsable pour ne pas dire ''coupable''? La généralisation des oreillettes fut une vaste entreprise de déresponsabilisation. La stratégie du GPS et du mouchard appliquée à la science de la course a déshumanisé le cyclisme. Pourtant la course, ce sont les coureurs qui la font, pas les directeurs sportifs…
vendredi 6 juillet 2012
Tour : après la chute, c'était fort Sagan
Rescapé du peloton principal, le Slovaque Peter Sagan remporte sa troisième victoire d’étape. Pris dans une chute, quelques favoris perdent du temps, dont Franck Schleck et Pierre Rolland…
Depuis Metz (Moselle), envoyé spécial.
Les coureurs, entre Epernay et Metz (207,5 km), ont encore tâté du bitume et cassé du petit bois. Un chamboule-tout qui, cette fois, a eu des conséquences sur le classement général pour quelques-uns des favoris de cette 99e édition de la Grande Boucle. La principale chute du jour est survenue à vingt-cinq kilomètres de l'arrivée. Elle fut non seulement impressionnante, puisque les victimes sont descendus de machine à près de 70 km/h, mais elle a cisaillé le peloton en deux morceaux très inégaux, provoquant, il fallait s'y attendre, des dégâts humains et sportifs.
D'abord, côté hommes. L'Espagnol Mikel Astarloza (Euskaltel), l'Américain Tom Danielson (Garmin) et l'Italien Davide Vigano (Lampre) ont dû abandonner. Certains en larmes.
Ensuite côté sport. Signalons avant tout que quelques outsiders du Tour ont perdu du temps, piégés dans un deuxième voire un troisième groupe par l'arrière. Parmi ces grands perdants du jour: Edvald Boasson Hagen, Jenez Brajkovic, Robert Gesink, Ryder Hesjedal et surtout Frank Schleck, Rein Taaramäe ou encore Pierre Rolland… Ce dernier devait d’ailleurs subir des examens médicaux pour s’assurer qu’il pourrait reprendre le départ, samedi. D'ores et déjà un coup dur, quoi qu'il arrive...
Chute avant d'arriver à Metz... |
Les coureurs, entre Epernay et Metz (207,5 km), ont encore tâté du bitume et cassé du petit bois. Un chamboule-tout qui, cette fois, a eu des conséquences sur le classement général pour quelques-uns des favoris de cette 99e édition de la Grande Boucle. La principale chute du jour est survenue à vingt-cinq kilomètres de l'arrivée. Elle fut non seulement impressionnante, puisque les victimes sont descendus de machine à près de 70 km/h, mais elle a cisaillé le peloton en deux morceaux très inégaux, provoquant, il fallait s'y attendre, des dégâts humains et sportifs.
D'abord, côté hommes. L'Espagnol Mikel Astarloza (Euskaltel), l'Américain Tom Danielson (Garmin) et l'Italien Davide Vigano (Lampre) ont dû abandonner. Certains en larmes.
Ensuite côté sport. Signalons avant tout que quelques outsiders du Tour ont perdu du temps, piégés dans un deuxième voire un troisième groupe par l'arrière. Parmi ces grands perdants du jour: Edvald Boasson Hagen, Jenez Brajkovic, Robert Gesink, Ryder Hesjedal et surtout Frank Schleck, Rein Taaramäe ou encore Pierre Rolland… Ce dernier devait d’ailleurs subir des examens médicaux pour s’assurer qu’il pourrait reprendre le départ, samedi. D'ores et déjà un coup dur, quoi qu'il arrive...
Rousseauiste(s): éloge à un auteur plus écrivain qu'on ne le dit
Deux essais tentent de nous faire comprendre que la part littéraire est importante dans l'oeuvre de Jean-Jacques Rousseau.
Ruptures. «Me voici donc seul sur la terre, n’ayant plus de frère, de prochain, d’ami, de société que moi-même.» Mu d’une volonté immense née d’une forme unique d’authenticité d’un moi solitaire constructif, les premiers mots des Rêveries du promeneur solitaire (1778) reste un choc pour tout lecteur. Se trouve là, par la grâce d’un auteur plus «écrivain» qu’on veut bien le dire, la puissance littéraire d’une oeuvre trop circonscrite à sa dimension politique et philosophique. Dans un essai passionnant, précis et parfois dérangeant, Barbara Carnevali, dans Romantisme et reconnaissance, figures de la conscience chez Rousseau (Droz), tente de remettre en cause l’image rassurante du prophète romantique, sans jamais, pour autant, négliger le fait que Rousseau incarne pour nous tous une double rupture primordiale: rupture politique (la fin de l’absolutisme monarchique) et rupture personnelle (avec les besoin factices de l’amour-propre). La première rupture fera de Jean-Jacques l’un des inspirateurs incontournables de la grande Révolution. La seconde rupture permettra à des générations de lecteurs et d’historiens de transformer l’auteur de l’Emile en véritable annonciateur de toutes les facettes du romantisme.
Littéraire. Pour Barbara Carnevali, Les Confessions (1770), presque à elles seules, permettent de sonder la longue tradition de la philosophie morale qui redéfinit les «lois» de l’opinion et refuse les illusions de l’amour-propre. A partir de trois scènes bien précises, qui tournent toutes autour de la question de la reconnaissance, l’auteur détaille la richesse du récit autobiographique permettant à Rousseau de mettre en avant les contradictions humaines, par sa propre expérience, par ses propres failles.
Ruptures. «Me voici donc seul sur la terre, n’ayant plus de frère, de prochain, d’ami, de société que moi-même.» Mu d’une volonté immense née d’une forme unique d’authenticité d’un moi solitaire constructif, les premiers mots des Rêveries du promeneur solitaire (1778) reste un choc pour tout lecteur. Se trouve là, par la grâce d’un auteur plus «écrivain» qu’on veut bien le dire, la puissance littéraire d’une oeuvre trop circonscrite à sa dimension politique et philosophique. Dans un essai passionnant, précis et parfois dérangeant, Barbara Carnevali, dans Romantisme et reconnaissance, figures de la conscience chez Rousseau (Droz), tente de remettre en cause l’image rassurante du prophète romantique, sans jamais, pour autant, négliger le fait que Rousseau incarne pour nous tous une double rupture primordiale: rupture politique (la fin de l’absolutisme monarchique) et rupture personnelle (avec les besoin factices de l’amour-propre). La première rupture fera de Jean-Jacques l’un des inspirateurs incontournables de la grande Révolution. La seconde rupture permettra à des générations de lecteurs et d’historiens de transformer l’auteur de l’Emile en véritable annonciateur de toutes les facettes du romantisme.
Littéraire. Pour Barbara Carnevali, Les Confessions (1770), presque à elles seules, permettent de sonder la longue tradition de la philosophie morale qui redéfinit les «lois» de l’opinion et refuse les illusions de l’amour-propre. A partir de trois scènes bien précises, qui tournent toutes autour de la question de la reconnaissance, l’auteur détaille la richesse du récit autobiographique permettant à Rousseau de mettre en avant les contradictions humaines, par sa propre expérience, par ses propres failles.
Tour: c'était le jour de l'affaire Armstrong...
André Greipel l’emporte au sprint, jeudi 5 juillet, à Saint-Quentin. Quatre coureurs présents sur le Tour auraient témoigné contre le septuple vainqueur, Lance Armstrong.
Depuis Saint-Quentin (Aisne).
Un jour à ne pas sortir un cycliste ambitieux. De gros nuages lourds pour un sprint tellement attendu, à Saint-Quentin, que nous aurions aimé nous en passer. Une fois l’échappée du jour reprise dans les ultimes hectomètres (Ladagnous, Ghyselinck, Simon, Urtasun Perez), nous avons donc assisté sans émotion à la nouvelle victoire de l’Allemand André Greipel (Lotto), déjà vainqueur la veille, à Rouen. Le Britannique Mark Cavendish (Sky), seulement quatrième, a temporairement rendu les armes de la revanche.
Un jour à ne pas jeter un oeil dans les rétros. Sur les routes du Tour, heureusement, la mémoire reste un invariant et la possibilité même de l’oubli, vigilants que nous sommes, a été dérobée à son imperfection. Lance Armstrong en sait quelque-chose.
George Hincapie, ancien équipier de luxe de Lance Armstrong. |
Un jour à ne pas sortir un cycliste ambitieux. De gros nuages lourds pour un sprint tellement attendu, à Saint-Quentin, que nous aurions aimé nous en passer. Une fois l’échappée du jour reprise dans les ultimes hectomètres (Ladagnous, Ghyselinck, Simon, Urtasun Perez), nous avons donc assisté sans émotion à la nouvelle victoire de l’Allemand André Greipel (Lotto), déjà vainqueur la veille, à Rouen. Le Britannique Mark Cavendish (Sky), seulement quatrième, a temporairement rendu les armes de la revanche.
Un jour à ne pas jeter un oeil dans les rétros. Sur les routes du Tour, heureusement, la mémoire reste un invariant et la possibilité même de l’oubli, vigilants que nous sommes, a été dérobée à son imperfection. Lance Armstrong en sait quelque-chose.
mercredi 4 juillet 2012
Tour: à Rouen, André Greipel ne laisse pas passer sa chance
A la faveur d’une chute dans les derniers kilomètres, qui élimina du sprint le favori Mark Cavendish, l’Allemand remporte l'étape Abbeville-Rouen. Sinon, un Japonais s’est illustré en pays de Caux…
Depuis Rouen (Seine-Maritime).
Connaissez-vous le pays de Caux? Venus tout droit d’Abbeville pour lécher la Manche plein ouest, les coureurs ont découvert des terres de bord de mer inondées de beauté sous un ciel mi-grisâtre mi-bleuté, avec ses paysages uniques réputés pour ses richesses sédimentaires et ses plateaux. S’étendant de Dieppe pour constituer une large sphère géographique jusqu'à l'embouchure de la Seine, à hauteur du Havre, cette région verdoyante aux effluves du large n’est empruntée qu’exceptionnellement par le peloton du Tour. Le Japonais Yukiya Arashiro ne se plaindra pas de cette escapade, puisque la Normandie fut longtemps sa terre d’adoption. Aguerri et repéré en France dans la formation amateur de l'ES Aumale, ici en Seine-Maritime, Yukiya Arashiro, l’un des protégés de Jean-René Bernaudeau chez Europcar, a légitimement décidé de s’illustrer, hier, en s’extirpant du peloton en compagnie de David Moncoutié (Cofidis) et d’Anthony Delaplace (Saur-Sojasun).
Depuis Rouen (Seine-Maritime).
Connaissez-vous le pays de Caux? Venus tout droit d’Abbeville pour lécher la Manche plein ouest, les coureurs ont découvert des terres de bord de mer inondées de beauté sous un ciel mi-grisâtre mi-bleuté, avec ses paysages uniques réputés pour ses richesses sédimentaires et ses plateaux. S’étendant de Dieppe pour constituer une large sphère géographique jusqu'à l'embouchure de la Seine, à hauteur du Havre, cette région verdoyante aux effluves du large n’est empruntée qu’exceptionnellement par le peloton du Tour. Le Japonais Yukiya Arashiro ne se plaindra pas de cette escapade, puisque la Normandie fut longtemps sa terre d’adoption. Aguerri et repéré en France dans la formation amateur de l'ES Aumale, ici en Seine-Maritime, Yukiya Arashiro, l’un des protégés de Jean-René Bernaudeau chez Europcar, a légitimement décidé de s’illustrer, hier, en s’extirpant du peloton en compagnie de David Moncoutié (Cofidis) et d’Anthony Delaplace (Saur-Sojasun).
Tour: avec Anquetil, nous venons tous au vélo avant terme
Ce mercredi 4 juillet, le Tour arrive à Rouen, sur les terres de Jacques Anquetil. L’occasion pour le chronicœur de devancer l’étape en allant flâner librement sur les lieux où le Normand, champion unique en son genre, révolutionna son sport.
Depuis Rouen (Seine-Maritime).
«Papa, c’est bien ici?» La vitesse sous le vent balaye les tignasses et vivifie nos âmes sombres. Dans les embrasements d’une discussion bientôt inutile, quelques hurlements de corbeaux trouent le silence de la campagne. Déjà, nous devinons les fragments de la mythologie usinée par un Normand hors-norme. Parce qu’il «jouissait de la bienveillance des vents», avec son «nez aigu et son visage de fine lame» (1), Jacques Anquetil trouva, ici, par la volonté de sa force suprême, des routes dignes de sa démesure.
Nous sommes sur les hauteurs de Sotteville-lès-Rouen, où l’herbe humide courbe l’échine sous l’irrégularité des bourrasques. «Oui, c’est bien là.» Dans les yeux du fiston, l’imagination en action, assez pour repenser aux quelques images en noir et blanc qui lui montrèrent, un jour de pluie, les membres onctueux d’un cycliste venu d’ailleurs, dans ses débuts inouïs, ici à Sotteville, où il signa sa première licence amateur, lui, l’apprenti ajusteur titulaire d’un CAP. «C’est sur ces routes qu’il a débuté», échappé des brumes pour conquérir le monde, maître du temps et modèle d’esthétisme. «Anquetil enveloppe sa machine ; il pédale de la pointe, effaçant la douleur en signe de politesse. (…) Sorti d’un rêve de buée, cet ange diaphane allait offrir la matière d’un mythe dont il serait le seul héros et l’unique victime.» (2)
Depuis Rouen (Seine-Maritime).
«Papa, c’est bien ici?» La vitesse sous le vent balaye les tignasses et vivifie nos âmes sombres. Dans les embrasements d’une discussion bientôt inutile, quelques hurlements de corbeaux trouent le silence de la campagne. Déjà, nous devinons les fragments de la mythologie usinée par un Normand hors-norme. Parce qu’il «jouissait de la bienveillance des vents», avec son «nez aigu et son visage de fine lame» (1), Jacques Anquetil trouva, ici, par la volonté de sa force suprême, des routes dignes de sa démesure.
Nous sommes sur les hauteurs de Sotteville-lès-Rouen, où l’herbe humide courbe l’échine sous l’irrégularité des bourrasques. «Oui, c’est bien là.» Dans les yeux du fiston, l’imagination en action, assez pour repenser aux quelques images en noir et blanc qui lui montrèrent, un jour de pluie, les membres onctueux d’un cycliste venu d’ailleurs, dans ses débuts inouïs, ici à Sotteville, où il signa sa première licence amateur, lui, l’apprenti ajusteur titulaire d’un CAP. «C’est sur ces routes qu’il a débuté», échappé des brumes pour conquérir le monde, maître du temps et modèle d’esthétisme. «Anquetil enveloppe sa machine ; il pédale de la pointe, effaçant la douleur en signe de politesse. (…) Sorti d’un rêve de buée, cet ange diaphane allait offrir la matière d’un mythe dont il serait le seul héros et l’unique victime.» (2)
mardi 3 juillet 2012
Cavendish et Merckx nous font Tournai en bourrique
Lors de l’ultime escapade belge, lundi 2 juillet, Mark Cavendish remporte au sprint sa 21e victoire d’étape. Hors course, la polémique entre Guimard et Merckx a pris de l’ampleur. Hier, le Cannibale a insulté l’ancien directeur sportif, auteur d’un livre qui lui a fortement déplu…
Depuis Tournai (Belgique).
Le suiveur ne l’ignore pas mais s’en émoustille encore : les ambiances de kermesse ont toujours quelque-chose de surréel. Entre gouailleries populaires et anecdotes es-vélo référencées, la ville de Tournai n’avait finalement rien à envier à ses voisines. Le Britannique Mark Cavendish (Sky), qui s’y connaît en coup de menton, a d’ailleurs plutôt apprécié cette arrivée bonhomme et apaisée, terme de 207,5 kilomètres sans intérêt, côté course du moins. Un peloton uni a ainsi déboulé dans le final constitué d'interminables lignes droites, uniquement coupées par le vent. Premier sprint du Tour 2012, dont nous nous permettrons de ne retenir, faute de mieux, que le nom du vainqueur. Cavendish, au prix d’un coup de rein dévastateur, est venu quérir, tenez-vous bien, la 21e victoire d’étapes de sa carrière. Tournai en bourrique, les suiveurs ont longtemps cherché leurs mots pour narrer l’inéluctable répétition.
C’est dans la marge qu’il convenait de tourner son regard pour trouver du relief... Comme pour nous accompagner dans cette traversée de la Belgique de part en part, la joute à distance entre Cyrille Guimard et Eddy Merckx s’est poursuivie. En s’intensifiant. Bien qu’il soit malaisé au chronicoeur d’évoquer l’affaire avec l’impartialité requise lorsque les Illustres de la Grande Boucle se disputent à l’encre noire de la Légende, la tension entre les deux hommes a atteint un tel degré d’incandescence qu’il est impossible de n’en rien dire alors que la caravane quitte le pays où le Cannibale est roi. Hier matin, Eddy Merckx a donné un entretien à l’Equipe où il n’épargne pas Cyrille Guimard. L’échange verbal entre ces deux monstres sacrés de la Petite Reine est presque devenu un fait de course…
Depuis Tournai (Belgique).
Le suiveur ne l’ignore pas mais s’en émoustille encore : les ambiances de kermesse ont toujours quelque-chose de surréel. Entre gouailleries populaires et anecdotes es-vélo référencées, la ville de Tournai n’avait finalement rien à envier à ses voisines. Le Britannique Mark Cavendish (Sky), qui s’y connaît en coup de menton, a d’ailleurs plutôt apprécié cette arrivée bonhomme et apaisée, terme de 207,5 kilomètres sans intérêt, côté course du moins. Un peloton uni a ainsi déboulé dans le final constitué d'interminables lignes droites, uniquement coupées par le vent. Premier sprint du Tour 2012, dont nous nous permettrons de ne retenir, faute de mieux, que le nom du vainqueur. Cavendish, au prix d’un coup de rein dévastateur, est venu quérir, tenez-vous bien, la 21e victoire d’étapes de sa carrière. Tournai en bourrique, les suiveurs ont longtemps cherché leurs mots pour narrer l’inéluctable répétition.
C’est dans la marge qu’il convenait de tourner son regard pour trouver du relief... Comme pour nous accompagner dans cette traversée de la Belgique de part en part, la joute à distance entre Cyrille Guimard et Eddy Merckx s’est poursuivie. En s’intensifiant. Bien qu’il soit malaisé au chronicoeur d’évoquer l’affaire avec l’impartialité requise lorsque les Illustres de la Grande Boucle se disputent à l’encre noire de la Légende, la tension entre les deux hommes a atteint un tel degré d’incandescence qu’il est impossible de n’en rien dire alors que la caravane quitte le pays où le Cannibale est roi. Hier matin, Eddy Merckx a donné un entretien à l’Equipe où il n’épargne pas Cyrille Guimard. L’échange verbal entre ces deux monstres sacrés de la Petite Reine est presque devenu un fait de course…
lundi 2 juillet 2012
Guimard: "voilà pourquoi Merckx n'a jamais été un monstre sacré"...
Alors qu’il publie pour la première fois son autobiographie, le « pape » du vélo depuis quarante ans évoque la figure centrale du champion belge, Eddy Merckx, dont l’incroyable palmarès ne sera sans doute jamais égalé. Et Cyrille Guimard, indissociable de l’histoire moderne du sport, n’est pas tendre avec le Cannibale !
«Beaucoup considèrent qu’Eddy Merckx n’est pas le plus grand vainqueur de l’histoire du cyclisme, mais le plus grand tout simplement. Son palmarès, incomparable, témoigne à lui seul de la dimension surréelle de ce coureur: cinq Tour de France, cinq Giro, une Vuelta, vingt-sept classiques (!), dont sept fois Milan-san-Remo ou cinq fois Liège-Bastogne-Liège… ajoutons trois titres ce champion du monde sur route et arrêtons-là l’incroyable énumération. Avec lui, en permanence, l’unique voisine avec l’exploit, et le Belge n’a trouvé son propre épanouissement que dans l’accroissement de son exposition permanente. Gagner. Gagner à tout prix. Gagner toujours et partout.
Cela est-il suffisant pour basculer dans la légende? Que les choses soient claires: je ne porte pas sur Merckx le même regard que sur Jacques Anquetil par exemple. Pour une raison simple: Merckx n’était pas – et n’est toujours pas – un homme charismatique. Il est à mes yeux l’un des quatre ou cinq plus grands champions du XXe siècle, bien sûr. Et il possède le plus incroyable palmarès du cyclisme – et peut-être de tous les sports d’ailleurs… Mais en l’espèce, le palmarès ne fait pas tout. (…)
«Beaucoup considèrent qu’Eddy Merckx n’est pas le plus grand vainqueur de l’histoire du cyclisme, mais le plus grand tout simplement. Son palmarès, incomparable, témoigne à lui seul de la dimension surréelle de ce coureur: cinq Tour de France, cinq Giro, une Vuelta, vingt-sept classiques (!), dont sept fois Milan-san-Remo ou cinq fois Liège-Bastogne-Liège… ajoutons trois titres ce champion du monde sur route et arrêtons-là l’incroyable énumération. Avec lui, en permanence, l’unique voisine avec l’exploit, et le Belge n’a trouvé son propre épanouissement que dans l’accroissement de son exposition permanente. Gagner. Gagner à tout prix. Gagner toujours et partout.
Cela est-il suffisant pour basculer dans la légende? Que les choses soient claires: je ne porte pas sur Merckx le même regard que sur Jacques Anquetil par exemple. Pour une raison simple: Merckx n’était pas – et n’est toujours pas – un homme charismatique. Il est à mes yeux l’un des quatre ou cinq plus grands champions du XXe siècle, bien sûr. Et il possède le plus incroyable palmarès du cyclisme – et peut-être de tous les sports d’ailleurs… Mais en l’espèce, le palmarès ne fait pas tout. (…)