mardi 31 mai 2011

Bientôt la pénurie de profs ? SOS pour l'éducation !

«On ne manque pas de profs.» Et Luc Chatel ne manque pas de toupet… Derrière des rondeurs qui ne sont qu’apparentes, notre ministre de l’Éducation nationale a de quoi faire pâlir de jalousie les pires politicards de sa classe. Dans une interview donnée hier au Journal du dimanche, l’homme manie le mensonge et la mauvaise foi à tous les temps. Ainsi ose-t-il rappeler que Nicolas Sarkozy, en 2007, avait promis que pour «revaloriser la fonction publique, il fallait moins de fonctionnaires mais mieux payés». Et il ajoute: «On a l’impression que l’éducation est laissée pour compte. Mais regardons autour de nous. En Angleterre, en Grèce ou au Portugal, des professeurs sont licenciés, leurs rémunérations baissent.» Les Français n’ont donc pas à se plaindre. Pour Luc Chatel, grand expert en sermons de «principe de réalité», qu’importe justement la réalité vécue. Les chiffres sont pourtant têtus : entre 2007 et fin 2011, près de 55 000 salariés de l’éducation nationale auront été sacrifiés, comme le seront bientôt 1 500 classes...

Les projets «éducatifs» des quatre dernières années composent un vaste puzzle destructeur dont on peut aisément reconstituer les morceaux : moins de moyens et moins de personnels, des professeurs inégalement formés pour des écoles aux objectifs différents… Et puisque Luc Chatel n’est plus à une provocation près, lui qui fut jadis DRH chez L’Oréal avant devenir cost-killer à l’UMP, il annonce qu’il va lancer ce mercredi une grande campagne de pub dont le coût devrait s’élever à 1,3 million d’euros. De la com pour vanter les mérites d’un plan de recrutement lancé par le ministre… alors qu’il maintient la suppression de 16 000 postes! Face à un tel degré d’aplomb et d’effronterie, alors qu’à Pôle emploi vient de se dérouler un surréaliste «prof dating» pour pister d’éventuels enseignants remplaçants, les mots doivent manquer aux personnels de l’éducation pour dire au plus près leur colère ou leur dégoût devant un tel cynisme politique. Car la situation des profs se dégrade à grande vitesse. Élèves qui ne les respectent pas et renvoient sur eux une part de la violence que subissent leurs familles ; hiérarchie qui les infantilise, ignore la détérioration de leurs conditions de travail, les sous-effectifs, etc.

Dans un contexte de grave crise des vocations, il n’est pas anodin de savoir que le nombre d’enseignants songeant à démissionner, jadis dérisoire, atteint désormais près de 35 % d’entre eux, que 49 % parlent d’un «manque de reconnaissance», que 75% expriment leur «ras-le-bol»... Les politiques libéralo-néoréactionnaires faites de «méritocratie», d’«internats d’excellence», d’«individualisation des parcours», d’«autonomie» nous programment une catastrophe absolue, faite de pénurie (de profs, de moyens, etc.) et d’inégalité à tous les échelons de la scolarité… Le sarkozysme n’aime pas l’égalité républicaine : pourquoi devrait-elle continuer de s’appliquer à l’école ? Même l’Association des maires de France, par la voix de son président, le député maire UMP Jacques Pélissard (!), vient de lancer un SOS. «Les maires font part de leur vif mécontentement», déclare-t-il, précisant que l’AMF allait «saisir le gouvernement pour demander qu’une analyse objective des besoins scolaires soit effectuée préalablement à toute décision de réduction d’effectifs». Malgré des départs à la retraite qui seront massifs dans les cinq ans, malgré le baby-boom de l’an 2000 à venir, Luc Chatel vient de confirmer le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux. Et l’on nous parle encore d’«égalité des chances»?

[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 30 mai.]

(A plus tard...)

1 commentaire:

  1. Effectivement cette campagne de pub pour le recrutement d'enseignants alors que l'on supprime des postes d'enseignants est le témoignage d'un cynisme politique à toute épreuve...et d'une décadence libérale fulgurante et effrayante. Cette décadence programmée de notre société par un groupe de politiques complètement irresponsables mais reponsables de leur portefeuille à la foi ministériel et financier... (c'est tout ce qui les intéresse...)mène notre pays au même rang que les pays européens en grande difficulté...PAT

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