Après l’assassinat de l’ingénieur humanitaire Michel Germaneau, puis l’enlèvement de cinq expatriés sans doute toujours détenus au Mali, sans parler de la tentative d’attentat la semaine dernière contre l’ambassade de France à Bamako, les morts d’Antoine et de Vincent, tués lors d’une opération militaire nigérienne, soulèvent bien des questions… Car une certaine confusion prédomine encore concernant les circonstances de cette intervention armée à laquelle ont pris part des militaires français. Ainsi était-il légitime et nécessaire que des militaires français participent à cette opération dramatique ? Pourquoi et à quelles fins ont-ils été engagés dans une poursuite contre des criminels spécialisés dans la prise d’otages lucrative, probablement liés à des groupes terroristes capables de commanditer ce genre d’actes ? En somme, quelle a été la réelle implication des autorités françaises dans ce désastre humain ? Répétons-le clairement : aucune cause, ni les tensions ni les graves problèmes politiques qui témoignent partout dans le monde d’attentes sociales et démocratiques, ne peut justifier cette forme de terrorisme. D’ailleurs, à l’heure où nous écrivions ces lignes, al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) n’était pas formellement désignée par les autorités françaises comme responsable de ce drame. Mais ce nouvel épisode douloureux, quoi qu’il en soit, rappelle à l’État français la responsabilité qui lui incombe de tout faire pour obtenir la vie sauve et la libération des autres otages français, actuellement au nombre de huit, au Niger, en Somalie et en Afghanistan…
La vérité nous oblige. Il reste en effet un tabou à lever : que ce soit au Sahel ou en Afghanistan, la politique étrangère de la France est-elle en partie responsable des menaces qui pèsent sur ses intérêts ? À ce propos, faut-il s’étonner que le conflit afghan soit devenu un débat interdit, censuré par toute la médiacratie politique ? Trop peu de voix s’élèvent aujourd’hui pour s’opposer à cette sale guerre sans issue, dont le but déclaré, détruire les points d’ancrage d’al-Qaida chez les talibans, risque au contraire d’alimenter tous les fous de Dieu s’inspirant de Ben Laden…
Samedi 8 janvier, un caporal-chef français est tombé au combat en Afghanistan, ce qui porte à 53 le nombre de soldats français morts dans ce pays depuis fin 2001. Que peut espérer la France de Sarkozy sinon lécher les bottes des États-Unis et légitimer son strapontin aux côtés des valets de l’Otan. Le néoatlantisme de l’Élysée, mené sur tous les fronts telle une croisade, éloigne chaque jour un peu plus notre pays de son devoir historique – l’universalité de sa parole dans le monde.
[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 10 janvier 2011.]
(A plus tard...)
Trop peu de voix s'élèvent...Bien évidemment! Il existe une telle chappe de plomb sur la liberté de penser et de dire dans ce pays des droits de l'homme, qu'il est devenu très risqué de s'exprimer, y compris anonymement.
RépondreSupprimerY compris les partis politiques, prisonniers de l'électoralisme, qui n'osent plus dire tout haut ce que les français pensent tout bas (hormis le FN). On a connu le PCF moins timoré et moins soucieux de savoir ce que les médias diront de ses jugements.
Ainsi sur la question de l'exécution de nos 2 compatriotes au Niger, tout le monde (sur le forum de Libération 80% des 3500 intervenants) accuse Sarkozi et Jupé d'avoir commis une bavure tragique...Mais voilà, il y a une telle complicité entre les partis aspirant à l'exercice du pouvoir d'État, qu'ils préfèrent se taire ou simplement se contenter de quelques allusions discrètes.
Les dirigeants français roulent des épaules et affirment leur engagement délibéré au NIGER au mépris des risques qu'ils faisaient courir aux otages. je pense que pour satisfaire son égo et pour faire diversion un triste petit bonhomme a pris ces risques tragiques.
RépondreSupprimerUne telle attitude devrait faire l'objet d'une vigoureuse protestation or, l'ensemble des politiques et les médiats sont d'accord au nom d'une dangereuse formule d'union sacrée.
La voix des communistes est bien timide....
Pour moi la France doit sortir de l'engrenage de la violence à l'échelle mondiale, quitter l'OTAN sortir du bourbier afghan, cesser de jouer les gendarmes en Afrique.
Les efforts financiers consentis dans la militarisation doivent être basculés vers la coopération et le
développement. Ce sera le moyen le plus efficace d'isoler les criminels et de faire aimer la France. Ce devrait être l'orientation à prendre dans la construction d'une politique de gauche. C'est loin d'être gagné avec des socialistes aujourd'hui dans l'union sacrée et qui ne contestent pas l'appartenance de la France à L'OTAN (un député socialiste européen proposait pire sur télé matin : une entrée de l'Europe an tant que telle dans l'OTAN).
Oui, c'est bien vrai ! La France de De Gaulle a perdu son honneur et a trahi son Histoire en intégrant l'OTAN. C'est une erreur historique majeure de Nabot-Sarko. Il nous faudra une génération au moins pour la réparer...
RépondreSupprimerMerci à JED pour sa belle lucidité.