jeudi 17 juin 2010

Retraites : quelle civilisation promet-on à nos enfants ?

Le bourrage de crâne à dose médiacratique persiste. A en croire certains commentateurs que la facilité égare, «l’habileté politique» serait donc du côté du gouvernement et du Palais, qui, en quelques mois d’un intense lobbying, ont réussi à mettre sur la table, sous la forme d’un projet de loi, les contours d’une régression sociale à très grande échelle. A commencer par le recul de l’âge légal du droit à la retraite.

En pleine crise sociale et en terrain propice aux irruptions populaires, le pouvoir continue d’avancer au pas de charge. Pour l’Elysée, l’affaire est entendue. 62 ans pour tous, y compris pour les travaux pénibles. Taux plein à 67 ans. 41,5 ans de durée de cotisation… Le grand bond en arrière.

L’opinion publique a-t-elle été enfumée? Le pouvoir a-t-il réussi à endormir les forces sociales? La France a besoin d'une réaction à la hauteur des attaques. Impossible? A voir...

Tout cela masque mal, surtout, le principal non-dit de cette contre-réforme : celui d'examiner avec sérieux de nouvelles pistes de financement. Qui existent belle et bien, à condition d’anéantir pour commencer le principal tabou des libéraux en tout genre, à savoir aligner de toute urgence la taxation des revenus du capital sur celle du travail… Cela pourrait rapporter jusqu’à 100 milliards d’euros !

Pour justifier leur sale coup, on nous parle à tort de démographie – elle ne va pas trop mal, merci. Mais si l’on parlait plutôt d’une autre répartition des richesses? Il y a quelques années à peine, le Conseil d’Orientation des Retraites lui-même soulignait que, sur 30 ans, la richesse de la France, avec un taux de croissance modéré, devrait doubler en termes réels (hors inflation). Avec une augmentation de 1700 milliards d’euros de la richesse nationale, comment nous faire croire qu’il est impossible de financer l’avenir de nos retraites, sachant que la somme à trouver ne représentera que 3% des richesses du moment?

Qui sont les menteurs? Qui sont les démagogues? Et si l’on parlait également de la contribution des revenus financiers et de l’élargissement de l’assiette des cotisations? Quand on sait que, en une génération, dix points de PIB sont passés des salaires au profit, pourquoi ne supprimerait-on pas immédiatement les exonérations et autres cadeaux fiscaux en tous genres, qui se montent à 140 milliards d’euros chaque année, en cessait de protéger la part des profits dans la valeur ajoutée? Sans oublier les mesures de relance de l'emploi, seul capable d’assurer la pérennité du système : 100.000 salariés de plus représentent 2 milliards d’euros de cotisations supplémentaires…

Vivons-nous donc dans le même pays (pour ne pas dire le même monde !) que la clique de nos dirigeants ? A moins que la grossièreté de la classe dominante n’ait définitivement plus de limite...

Non, les jeux ne sont pas faits ! Et le gouvernement aurait tort de confondre «projet de loi» et concrétisation dans les faits. Ceux qui, dans le pays, ne se laisseront pas intimider sont plus nombreux et déterminés que ne l’imaginent certains… Récemment, dix-neuf organisations de jeunesse ont décidé de lancer un appel commun «pour une retraite à haut niveau à soixante ans». Contestant un projet qu’on prétend mener en leur nom, les jeunes entreront-ils vraiment dans la bataille pour ne «pas être pris en otage»?

En effet. Que chacun médite un instant au monde qu’on promet à ces jeunes : insertion professionnelle tardive, rendue plus difficile par le chômage et la précarité ; allongement de la durée de cotisation ; report de l’âge légal, etc. Une société en régression généralisée. Comme si l’espérance de vie, ce bel enjeu de civilisation vécu au positif, devait se transformer en cauchemar pour les générations futures!

Quelle civilisation, quelle espérance laisseront-nous à nos enfants ?

(A plus tard…)

3 commentaires:

  1. Oui, tout est dit : quel avenir préparons-nous ? quel futur laisserons-nous à nos enfants ? Tout cela est effrayant, d'autant plus effrayant que pour la première fois dans l'histoire les enfants auront moins de droits que leurs parents. Terrible perspective symbolique.

    RépondreSupprimer
  2. Face à ce recul social non négligeable,descendons tous dans la rue le 24 juin.Il faut montrer à nos gouvernants que la solidarité peut payer et faire abandonner ce projet qui condamne nos enfants et leur avenir.

    RépondreSupprimer
  3. Je partage ce qui vient d'être écrit. J'ai honte pour l'avenir de nos enfants, en effet. Vraiment honte...

    RépondreSupprimer