Le deuxième Tour de l’ère Covid s’élance de Brest, ce samedi. Grandissime favori, le Slovène Tadej Pogacar, tenant du titre. Le profil peu montagneux peut-il favoriser le champion du monde Julian Alaphilippe ?
Brest (Finistère), envoyé spécial.
À la faveur d’une sorte d’embellie que la pandémie autorise, la Grande Boucle retrouve ses vrais quartiers d’été. Oubliés septembre dernier et ses frimas préautomnaux, quand les coureurs, déboussolés par un calendrier sens dessus dessous, redessinaient les contours surannés de notre Hexagone de salle de classe en pleine période scolaire, sans son Peuple du Tour, celui de Juillet, pédalant esseulés en signant des performances sans équivalence sur la plus grande épreuve du monde. Le Slovène Tadej Pogacar avait sans doute profité des circonstances, dues autant au contexte sanitaire qu’à la blessure du Colombien Egan Bernal, contraint à l’abandon (1). Vainqueur surprise de son compatriote Primoz Roglic, coiffé dans l’ultime chrono destructeur, le gamin Pogacar, âgé de 22 ans, se confrontera ainsi au fameux adage de la Petite Reine: le plus dur sera-t-il de confirmer?
Sous les embruns d’un climat variant composé de bruine et de vent, Brest accueille le Grand Départ et toute la Bretagne se prépare à une fête du vélo explosive sur cette terre d’amoureux fous – tout cela en plein rendez-vous électoral décisif pour nos régions et nos départements. Le deuxième Tour de l’ère Covid s’élance, ce samedi, mais il débutera sous condition. En concertation avec les autorités préfectorales, le passe sanitaire sera obligatoire pour le public qui souhaiterait venir aux départs et aux arrivées des étapes prévues entre le 26 et le 29 juin. Fini le huis clos, mais l’engouement populaire en pâtira. «Le nombre de personnes qui pourront accéder dépendra simplement de la configuration des sites», explique Pierre-Yves Thouault, l’adjoint de Christian Prudhomme. Le paddock des coureurs restera inaccessible, même pour les journalistes. Tout comme les hôtels des équipes, maintenus à l’abri des regards. Retour vers le futur…
Douceur du rêve, violence de l’utopie, insolence de notre francitude chaque année réinventée: selon la façon, naïve ou lucide, dont on le considère, le Tour oscille entre un doux songe un peu infantile et une espérance sans merci. Celle de voir – enfin – un successeur à Bernard Hinault. S’il faudra se méfier du duo de l’armada Ineos (Richard Carapaz et Geraint Thomas), tous nos regards se tournent naturellement vers Julian Alaphilippe, notre champion du monde. «On a l’ambition de viser des étapes avant de penser au général, répète le Français, modeste en diable. Il faut être conscient que le scénario de 2019, avec quatorze jours en jaune, est difficile à reproduire.» Avant d’ajouter, énigmatique: «Le parcours est assez ouvert, mais taillé pour moi.» Pour sa trente-deuxième participation, le chronicoeur n’oublie rien. Ni la réalité, ni sa mélancolie du Tour d’enfance…
(1) Pour son retour, Bernal, vainqueur du Tour en 2019, a brillamment remporté le Giro, en mai dernier.
[ARTICLE publié dans l'Humanité du 25 juin 2021.]
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