vendredi 7 septembre 2018

Effondrement(s)

Lorsqu’il laisse transparaître ce que nous pouvons considérer comme un cynisme complet, en particulier dans ces passages relâchés où il avoue tout uniment son mépris du peuple et de l’esprit français, nous voyons chez lui un effondrement moral généralisé à quoi se résume son pouvoir suprême.
 
Défiance. Fin, recommencement, prolongation et/ou perpétuation de quelque chose… Toute «rentrée» génère ses troubles et ses imperfections, quand vous reprend méchamment par la manche l’ardeur d’une actualité affligeante que vous aviez mise à bonne distance, moins par irrespect que par autoprotection passagère. Illusion. Le spectacle de la Macronie, pour tout scrutateur patenté, lasse autant qu’il réjouit l’imagination au cœur du réel. L’écrivain Philippe Besson –récompensé comme il se doit par un titre de consul, le croyez-vous?– avait sans doute raison: Mac Macron n’est qu’un personnage de roman, pour ne pas dire de fiction. Et si, dans le registre de l’ancien monde ou du siècle passé, voire du précédent, il nous fallait le caractériser, nous penserions à coup sûr aux pires personnages qui hantèrent jadis nos lectures adolescentes. Alors nous réaliserions qu’entre lui et «son» peuple (vu du haut vers le bas, bien entendu) plus rien n’aurait lieu, que plus rien ne pourrait jamais avoir lieu, que la vie (du bas vers le haut, cette fois) reprendrait ses cartes et ne laisserait de place ni pour l’enthousiasme, ni pour la croyance et la foi. Seules subsisteraient la résignation douce et cette pitié réciproque et attristée, auxquelles nous ajouterions le point ultime du désamour: la défiance. Une défiance totale envers l’homme, ses pratiques et même ses idées… 

Arrogance. Les puissants, et tous ceux qui s’en revendiquent jusque dans leurs comportements inconscients, héritiers la plupart du temps de leur classe «supérieure», finissent toujours par payer cash leur arrogance crasse. Car cela se voit, s’entend et finit par pénétrer les esprits les plus rétifs à l’observation simple. En l’espèce, Mac Macron est un maître absolu, quasiment indépassable; une sorte de cas d’école qu’il conviendrait d’étudier dans tous les cursus psychosociologiques et philosophiques. Lorsqu’il laisse transparaître ce que nous pouvons considérer comme un cynisme complet –en particulier dans ces passages relâchés où il avoue tout uniment son mépris du peuple et de l’esprit français–, que percevons-nous en vérité ? Rien d’autre, chez lui, qu’un effondrement moral généralisé à quoi se résume son pouvoir suprême, quand la voix, la parole et le regard apportent le témoignage douloureusement irrécusable de la persistance d’un caractère intrinsèquement libéral. C’est sérieux, vous savez, un effondrement moral. Il s’apparente à un vieillissement, qui puise ses racines dans les origines idéologiques fondamentales. S’ensuit une dégradation, secrète d’abord, se frayant un chemin à travers l’intérieur de l’organisme mental, avant d’éclater au grand jour. Le monde de Mac Macron est donc tout sauf un sujet d’émotion; lui-même n’étant qu’un dispositif froid et rationnel au service des intérêts privés et de la noblesse d’État, dénué de valeurs de solidarité et de compassion pour les choses humaines véritables. 
 
Système. Tout cela finira mal. Et bientôt, au seuil de nos portes, nous serons saisis par le froid, le vent et les frimas de l’automne ; les branches noires des arbres dénudés se détacheront sur le ciel gris sombre, des nuages affecteront des formes déchiquetées. Chacun à sa place, subalterne ou élevée, dans le système de production occidental des élites qui nous chanteront les louanges de « l’économie », qui n’est ni une science, ni un art, qui n’est en définitive à peu près rien du tout sinon un processus de dégradation continu, par paliers, puis par secousses brusques. Fin? Ou recommencement?
 
[BLOC-NOTES publié dans l’Humanité du 7 septembre 2018.]

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