mercredi 17 mai 2017

Saints sacrements

Pierre Gattaz fait l'éloge du couple Macron-Philippe. Qui s'en étonnera ? 

Même en politique, chacun recueille son dû à la hauteur des espérances placées en lui. Ainsi en est-il d’Emmanuel Macron, qui a reçu hier les saints sacrements de Pierre Gattaz, jamais avare de mots dans les grands moments de réjouissance. Pour le bien de la finance et du libéralisme, le monseigneur du Medef ne peut jamais s’empêcher de pousser dans le dos ceux qu’il a contribué à installer, quitte à leur rappeler le droit chemin de sa bénédiction. Que voulez-vous, le patron des patrons ne tarit pas d’éloges à l’évocation du tandem Macron-Philippe. Qui s’en étonnera? Pour M. Gattaz, le «souci d’ouverture» du nouvel attelage permettrait de «retrouver de l’espoir». Mieux, il s’agirait carrément d’«une chance pour la France de se redresser par des réformes». Sous-entendu: de vraies réformes… Si certains s’interrogent encore – mais qui? – sur le sens profond du macronisme et de ses affidés, les paroles de Gattaz ont au moins le mérite de sonner comme une alerte. Souvenons-nous que l’homme avait soutenu, sans réelle préférence d’ailleurs, ou bien François Fillon ou bien Emmanuel Macron, les deux en somme… Le ni de gauche ni de gauche du nouveau président convient parfaitement à l’héritier des barons et des maîtres de forges.  Les affaires sont les affaires. Bientôt nous parlerons de reconnaissance du ventre!
Et très vite, espère-t-il. Le vacarme sur le « renouveau » et la « recomposition » politique cache mal le dynamitage en règle qui se prépare, dès l’été. À commencer par le laminage du Code du travail. M. Gattaz, toujours lui, a déjà choisi son camp en appelant le pouvoir à «aller vite» sur ce dossier. Les responsables syndicaux, eux, attendent d’être reçus à l’Élysée pour entamer le «dialogue social», mais aucune date n’a encore été arrêtée, contrairement à l’engagement pris par le chef de l’État. Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, a d’ailleurs prévenu que les éventuelles consultations ne seraient pas «un alibi pour dire “ça y est, je les ai vus, je me suis débarrassé des boulets, maintenant je fais ce que je veux”». Aux saints sacrements version Gattaz, il reste une parade démocratique : préparer une belle extrême-onction au couple exécutif, les 11 et 18 juin. 

[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 17 mai 2017.]

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