lundi 19 octobre 2015

Détonateur: à propos de la Conférence sociale...

Le gouvernement prend le risque de sectionner un peu plus l’union du populaire et du régalien.
 
Philippe Martinez.
Alors quoi
? Il faudrait s’asseoir à une table, avaliser toutes les politiques régressives et se goinfrer des plats tels des aliénés? C’est donc ça, une conférence sociale? C’est donc ça, la France des «relations sociales» version Hollande-Valls-Macron? Du bidouillage médiatique rehaussé d’arrogance verbale, des provocations, des génuflexions devant les puissants, des mots encore des mots, et puis des décisions libérales qui tombent comme des hachoirs sur le corps social, au mépris des travailleurs, des plus faibles, des chômeurs, des retraités… L’ordre du jour et les conditions de cette rencontre au sommet sont une véritable flétrissure d’État! Le constat du secrétaire général de la CGT se veut sans appel. «Cette conférence sociale, c’est uniquement de la communication, explique Philippe Martinez. On ne va pas écouter une grand-messe d’experts patronaux et participer à des tables rondes avec des ministres qui viennent se faire valoir.» Quant à François Hollande, Philippe Martinez achève cruellement le sens de sa politique: «Il est dans la continuité de son prédécesseur sur le plan social.» Comment ne pas lui donner raison? Et comment accuser la CGT de pratiquer la «chaise vide» quand la chaise en question est à bascule et orientée vers le vide?

 
Le gouvernement prend le risque de sectionner un peu plus l’union du populaire et du régalien, alors que le climat social, selon Philippe Martinez lui-même, serait au bord de «l’explosion». Les Français ne sont pas stupides: ils savent que les violences économiques méritent d’être considérées au minimum avec le même statut que les coups de sang qu’elles engendrent? Le cas Air France aura été une sorte de détonateur. Les chemises blanches des dirigeants – de vulgaires frais de représentation – ont été changées depuis longtemps, mais les salariés, eux, resteront confrontés au traumatisme social pendant des années. L’histoire récente a bien sûr montré qu’il ne suffit pas d’une exaspération diffuse dans le cœur vivant de la société pour qu’elle se transforme en colère, puis en mouvement social préinsurectionnel. Que le gouvernement se méfie néanmoins. Les inégalités sociales rongent et enragent le pays. Jusqu’à un certain point. 
 
[EDITORIAL publié dans l’Humanité du 19 octobre 2015.]

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