Parfois, le sentiment de sombrer dans un gouffre où l’ombre seule domine et grandit sur le sol même où se portent vos pas vous contraint à agir autrement. Nous pouvons penser ce que nous voulons de l’action choisie par le maire de Sevran, Stéphane Gatignon. Pour certains, il y eut de l’indécence dans sa grève de la faim, en raison de la violence désespérante du geste, de son symbole ultime, et aussi parce qu’il occultait mécaniquement sa propre responsabilité dans la gestion de quelques dossiers dans sa ville. Pour d’autres, au contraire, l’acte extrême fut l’expression d’un courage politique et citoyen ne visant qu’à un but : s’affamer pour sauver sa ville de la déroute financière. Quelle que soit son opinion, une chose est sûre. Cette escalade dans le mode opératoire aura au moins eu l’intérêt d’attirer l’attention sur la situation dramatique de certaines communes. Et singulièrement de leurs populations, souvent les grandes oubliées.
Prenons la mesure. Venue des territoires, grands ou petits mais surtout de plus en plus pauvres, nous remonte une inquiétude de moins en moins sourde et d’autant plus urgente que cette «crise dans la crise» accélère ce que nous pouvons appeler désormais des «fractures territoriales». Pour bien se faire comprendre et ne pas évoquer uniquement les communes, prenons l’exemple simple et presque absurde de la Seine-Saint-Denis.
Dressons le constat : lorsque le président du conseil général du 9-3 commence à établir son budget annuel, il dispose de 440 millions d’euros de moins que le conseil général voisin des Hauts-de-Seine. À quoi sont alors confrontés les élus? À la réalité concrète et mortifère de la fracture sociale de leurs banlieues, de leurs zones périurbaines ou rurales, et avec elle, à la radicalisation des difficultés socio-économiques de leurs territoires. Dans un pays où près de 9 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, Sevran n’est pas un cas isolé. Grigny, Guéret, Allonnes, Villetaneuse, Clichy-sous-Bois, tant d’autres villes intégrées dans des métropoles connaissent le même désengagement financier de la part d’un État qui porte, pourtant, une lourde responsabilité dans les difficultés qu’elles rencontrent… SOS quartiers populaires! La paupérisation galope. Le taux de chômage dépasse les 40%. Un gamin sur deux est en échec scolaire. Et les solidarités sociales s’épuisent à force de cogner dans le désastre…
Dans certains endroits, la République semble avoir déserté, terrassée par on ne sait quelles guerres de classes discriminantes. Là où les dépenses publiques et sociales ont historiquement permis de faire face, tant bien que mal, lors des crises de 1974, 1982, 1992, le cadre général actuel des finances publiques, marqué par la dictature austéritaire, affaiblit les traditionnels «amortisseurs sociaux» de la société française. Et les prévisions ne laissent apparaître que du sombre. D’abord le gel des dotations d’État aux collectivités pour 2013, autrement dit, une baisse en euros constants. Puis, en 2014 et 2015, ce que l’on peut d’ores et déjà considérer comme des réductions drastiques. Les cris d’alarme doivent donc être entendus. Non seulement les timides corrections dans les dispositifs complexes et mal adaptés de péréquation ne suffisent pas, mais le temps est venu de remettre à plat les dispositifs de concours de l’État et de redistribution des richesses. Pour lutter contre les discriminations territoriales et rétablir l’égalité – ce à quoi prétend le gouvernement –, les pouvoirs publics ne peuvent plus ignorer durablement la question des écarts de moyens dédiés à l’action publique…
[EDITORIAL publié dans l'Humantié du 19 novembre 2012.]
Le maire de Sevran a dû se brûler les ailes pour mendier 5 millions d'euros (si mon chiffre est bon d'après ce que j'ai lu dans la presse). J'entends aussi en radio que le coût de l'aéroport international de Nantes serait de 600 millions d'euros alors que les caisses de l'état seraient ""soit-disant vides"...pendant ce temps-là la planète UMPISTE va réunir la CONARE - terme lu dans la presse provinciale, si, si cela ne s'invente pas...- (commission nationale des recours de l'UMP) pour éteindre l'incendie de l'avion UMP qui est en train d'imploser en vol....bref...la planète folle France s'atomise une fois de plus aux yeux du monde terrien pendant que les chiffres de la précarité s'envolent et qu'encore et encore les banques alimentaires alimentent! dommage que la politique gouvernementale socialiste n'ait toujours pas décollé sur des sujets prioritaires et urgents (loi sur les licenciements boursiers, avancées sur la santé, logement, etc...etc...). PAT
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