Hollande. En cultivant avec bonhomie la lenteur dans l’ascension, un peu contre l’époque, François Hollande s’est-il déjà interrogé sur son propre rapport au temps ? Au royaume de maître lapin et du zapping informationnel généralisé où la prise de décision se doit d’être quasi instantanée, le futur candidat socialiste à la présidentielle apparaît comme une incongruité, une faute de casting, phénomène d’autant plus ressenti que lui-même entretient le doute, depuis toujours. En 1984, lorsqu’il cosigne une tribune dans le Monde intitulée «Pour être modernes, soyons démocrates», ce qui résume assez l’ambition de ce socialiste coincé entre Mitterrand, Rocard et Delors, le jeune Hollande ne comprend déjà pas que le tournant de la rigueur assumé par son parti vient d’anéantir, pour le «peuple de gauche», des années d’espérance et d’engagements. Jamais par la suite François Hollande ne dérogera à cette stratégie, maintenant sa ligne d’Européen social-démocrate, heureux dans l’unité, en permanence à la recherche d’un dénominateur commun – souvent le plus petit.
Centriste. Curieux moment. Et curieux socialistes. L’expérience sondagiaire de 2007 (et autres) n’aura donc servi à rien. Souvenons-nous de la théorie ânonnée sur tous les tons durant des mois : «Ségolène Royal est la seule à pouvoir battre Nicolas Sarkozy.» L’impression de revivre le même film ? Crédité depuis quelques jours d’intentions de vote au premier tour qui atteignent le zénith (jusqu’à 38% !), François Hollande singe l’Édouard Balladur de 1995. Et si la comparaison ne s’arrêtait pas là ? Strauss-kahnisé dès le retrait de qui vous savez (il avait suffi de cinq jours après la sidération provoquée par l’affaire du Sofitel pour qu’un premier sondage permette au vide d’être comblé), le président du conseil général de Corrèze peut-il se balladuriser, comme certains socialistes, en coulisses, l’annoncent déjà ? Pour étayer leur théorie de «l’effondrement programmé», ces amis de trente ans évoquent un «professionnel du consensus» certes «habile à produire de la synthèse» mais surtout «attentif à ne pas brutaliser le système», bref, un «candidat centriste». L’un d’eux nous avouant : «François a d’ailleurs fondé avec quelques amis les “transcourants”, dont on sait qu’ils vont toujours quelque part sans jamais savoir où… Sa capacité à être d’accord avec tout le monde est un atout, seulement quand tout va bien.»
Temps. Les Français ont-ils besoin d’être «rassurés»? Osons le dire autrement. Le «n’importe qui sauf Sarkozy» peut-il constituer sinon un programme du moins une feuille de route pour le printemps 2012? Le peuple de gauche peut-il s’entendre dire pour tout argument que, cette fois, «les socialistes veulent vraiment le pouvoir»? Ce peuple en souffrance se contentera-t-il passivement d’un débat entre partisans de l’austérité et de la superaustérité : «Je suis le plus crédible pour gérer la dette»? Si le «rêve français» de Hollande consiste à accompagner le pays dans son lent et progressif déclin, attendons-nous à quelques jacqueries… Les socialistes semblent heureux. Ils ont un candidat, qui, de son propre aveu, n’a jamais pris qu’«une seule décision d’autorité». C’était en 2004, quand il décida d’appeler à voter «oui» au référendum sur la constitution, avant de poser en une de Paris Match à côté de Nicoléon. On sait ce qu’il advint. En peu de temps.
[BLOC-NOTES publié dans l'Humanité du 21 octobre 2011.]
(A plus tard...)
Mélenchon a bien raison, et Ducoin aussi: le candidat socialiste offre le «tarif super-minimum de la gauche». Désormais, la ligne est claire. Face à un François Hollande considéré comme un «social-démocrate assumé» c'est le Front de Gauche qui incarne «la rupture à gauche : une véritable alternative et non pas seulement l'alternance», comme l'écrivait JED l'autre jour dans un édito. Vivement un débat entre Mélenchon et Hollande, qu'on rigole un peu.
RépondreSupprimerDucoin a bien raison de poser ces questions sur le candidat socialiste, qui ne vise qu'une élection au centre, en effet. Cette stratégie est déjà perdante, j'en suis certain.
RépondreSupprimerVive le Front de Gauche !
Bravo pour cette liberté de ton.
RépondreSupprimerC'est vrai que tout cela est très inquiétant...et si le pauvre ne croit plus qu'à la loi des riches alors qu'il ne cesse de dire que les riches sont tous pourris (feuilleton bettencout et autres porteurs de valises, le "plus belle la vie politique!" du moment, il y a des scandales en permanence et depuis des décennies...) il faut au moins une révolution (une "vraie") pour s'en sortir...Il me semble qu'Hollande n'est capable que d'une "révolution de palais" qui s'arrêtera aux marches du Peuple...un jour il faudra que les citoyens passent de la critique à l'acte et se bougent (tous) vraiment dans ce pays en prenant leur destin politique en main...les Français l'ont déjà fait dans d'autres siècles.... à méditer...PAT
RépondreSupprimerOui, Mélenchon a bien raison en effet, et Ducoin aussi : "dans la tempête" actuelle, piloter le bateau comme Hollande le propose ce n'est pas du tout raisonnable, ça ressemble même à la gauche sociale-démocrate des années 90, complètement dépassée par les évènements. Hollande nous conduit droit dans le mur: le peuple de gauche ne votera pas pour celui qui nommera Bayrou à Matignon.
RépondreSupprimerPeuple de France, tu as cautionné par ton silence assourdissant la destruction d'un pays " la Libye " tu as permis à un moins que rien de t'entrainer dans ce massacre, maintenant tu remets ton sort et ton destin entre un autre moins que rien pour battre le nabot. je regrette mais tu as perdu de ta superbe, tu es devenu un peuple troulliard et randoulliard, prépare toi à souffrir jusqu'à la lie
RépondreSupprimerUn vrai langage de vérité, merci JED !!! C'est ça l'Huma, c'est ne rien laisser passer à la gauche qui trahit nos idéaux.
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