Depuis quinze jours, le « service après-vente » de toute la Macronie ne passe pas.
Élisabeth Borne
ne manque décidément pas de toupet. À la veille du début de l’examen du projet
en commission à l’Assemblée, alors que la France s’attend à vivre l’acte 2
de la mobilisation contre la réforme des retraites, ce mardi 31 janvier,
la première ministre s’est donc exprimée sur France Info. Ses mots en disent
long sur la méthode et confirment que la tentation du passage en force au
Parlement est non seulement actée, mais théorisée. «Ça n’est plus
négociable, la retraite à 64 ans et l’accélération de la réforme Touraine»,
a déclaré la cheffe du gouvernement, ajoutant: «C’est le compromis que nous
avons proposé.» La bataille dans l’Hémicycle n’a même pas débuté, mais
l’exécutif montre déjà les dents. La brutalité comme vraie nature politique.
Et ce n’est pas
tout! Dans une séquence de communication pour le moins téléguidée, il fallait
également lire le Parisien et l’entretien surréaliste du ministre de
l’Intérieur, Gérald Darmanin, qui a accusé la Nupes de vouloir «bordéliser
le pays», fustigeant au passage ce qu’il appelle le « gauchisme paresse
et bobo ». Selon lui, « ceux-là » auraient «un profond mépris de
la valeur travail». Avant de préciser: «Le travail n’est pas une
maladie.» Les Français apprécieront, surtout les 74% d’entre eux qui
estiment que la réforme est «injuste», «inefficace» et «pas
nécessaire».
Opinion,
Parlement, majorité instable et coincée entre son aile gauche et la nécessité
de trouver des alliés du côté de la droite LR: les pontes du gouvernement
paniquent. Et pour cause. Depuis quinze jours, le «service après-vente» de
toute la Macronie ne passe pas. Au contraire, 57% de nos concitoyens «comprendraient
que les grévistes bloquent le pays», «seul moyen» à leurs yeux de
faire capoter le projet de loi. La base sociale est perdue, d’où la
volonté de tordre un peu plus la démocratie parlementaire, jusqu’à en bafouer
les usages. Une chose est certaine: mardi, une grande partie de la réponse sera
dans la rue. Laurent Berger lui-même met en garde l’exécutif. Pour le leader de
la CFDT, ne pas tenir compte des mobilisations «serait une faute».
Macron et Borne sont prévenus…
[EDITORIAL
publié dans l’Humanité du 30 janvier 2023.]